Archive | 22 juin 2014

La berceuse de Staline de Guillaume Prévost

Mon résumé :

Mars 1920. Alors que l’enquête sur laquelle il travaille à Paris – l’assassinat sauvage d’un ancien espion des services secrets du tsar – piétine, François-Claudius Simon, brillant inspecteur du 36, quai des Orfèvres, est envoyé en mission officieuse à Moscou, pour tenter de trouver un accord avec les autorités russes sur une autre affaire, délicate, qui met en cause un ministre de premier plan. Le jeune inspecteur est prévenu : s les choses tournent mal, il devra se débrouiller seul. Pas question que le gouvernement français prenne le risque de rallumer les hostilités avec ce régime incontrôlable. Or, dans l’atmosphère de paranoïa aiguë et de complot permanent qui caractérise la Russie de Lénine, les choses ne peuvent que mal tourner. Surtout quand un certain Joseph Staline s’en mêle….

Mon avis :

J’ai résisté trois mois à la tentation d’acheter ce quatrième volume des aventures de François-Claudius. Pour quelles raisons ? Tout simplement parce que je voulais que l’auteur me le dédicace ! C’est chose faite depuis hier, salon du livre de Saint-Maur-des-Fossés (plus qu’une dédicace, d’ailleurs, une vraie rencontre).

François-Claudius n’évolue plus dans les milieux du cinéma, comme dans le Quadrille des maudits, il ne fait pas le point sur ses amours mortes, il est au contraire préoccupée par Elsa, qui, enceinte, a traversé l’Europe pour gagner la Russie et participer à la « reconstruction » du pays, après la Révolution. Il a reçu trois lettres, toutes les trois rassurantes, et garde un maigre contact avec le frère d’Elsa, confiné à des tâches administratives depuis la grave blessure qu’il a reçue. Il tente aussi de percer le secret de ses origines et celui de la folie de sa mère. Sa progression est lente, au contraire de celle de Koko, son perroquet, qui a « koko-loniser » l’appartement de l’inspecteur.

Mais l’enquête en cours lui offre une chance inespérée : aller en Russie, jouer les agents de liaison officieux afin de convoyer un prisonnier français en Russie et d’enquêter sur un jeune français accusé de meurtre. Le gouvernement français est bien soucieux de ses ressortissants, me direz-vous. Surtout s’ils leur sont proches.

Chance aussi pour lui de rechercher jusqu’en Russie le coupable de meurtres sordides, qui émeuvent jusqu’aux policiers les plus endurcis. Endurci, le meurtrier l’est aussi, lui qui signe ses crimes de deux balles (une dans le coeur, une dans la tête) et n’hésite pas à tuer des enfants, afin de ne pas laisser de témoins derrière lui. Organisé et méthodique, il semble avoir toujours plusieurs coups d’avance sur les enquêteurs.

Et la Russie, me direz-vous ? Les Russie, devrait-on dire. Nous avons d’un côté le paradis sur terre : chacun a un logement, tous les enfants sont scolarisés, les adultes qui ne savent ni lire ni écrire peuvent apprendre. De l’autre, nous avons la réalité… et elle est bien différente. La volonté de pouvoir est bien présente, même chez ceux qui se disent révolutionnaires – comme si c’était réellement étonnant. Manger à sa faim ? Manger un peu est déjà bien, ne soyons pas regardant sur le contenu de l’assiette, tant qu’elle ne contient pas que la cuillère. Avoir un logement ? Un toit sur la tête, disons-le bien et la vie « en communauté » favorise beaucoup de travers humains. La scolarisation des enfants ? Oui, à condition qu’ils aient des parents – la première guerre mondiale, la révolution ont laissé beaucoup d’orphelins, et personne ne se préoccupe de leur sort.

S’il est vraiment un service efficace dans la Russie de 1920, c’est la police -toutes les polices. Discrétion et persévérance sont leurs maîtres mots, même s’ils les adaptent au(x) russe(s), tout comme François-Claudius leur fait profiter, parfois, de l’élégance française (et de sa boxe). De là à dire qu’il sortira indemne de cette enquête, il y a un pas que je ne laisse franchir, en lisant ce roman.