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Ecriture 6

Nous retrouvons Anita, James et Jamey.

La première mission d’ange gardien d’Anita ? Elle s’est très bien passée. Les suivantes aussi. Dix ans ont passé, et bien qu’Anita soit devenue une ange gardien parfaitement autonome, James et Jamey ont continué à participer à ses missions, de temps en temps. Jusqu’à ce que…

– Mais quelqu’un peut m’expliquer ce qui s’est passé ? hurla James. J’ai l’impression de me retrouver en plein bombardement !
– Pas mieux, souffla Jamey.
– Vous ne me ferez pas croire que cette explosion a des causes naturelles, s’exclama Anita.
– Ah ça, moi, je peux vous le dire, il n’y a rien de naturel là-dedans, que du surnaturel !
Tous les trois se tournèrent vers la nouvelle arrivée, qui venait de parler. Elle s’était assise près d’eux, attendant comme eux que cela se tasse.
– Madelaine-Isabelle de Fleurypart, ange gardien assermentée de niveau 3, dit-elle en tendant sa main vers Anita. Mady pour les intimes parce que là, je pense que l’on est devenu intime !
– Anita d’Arsonval, ange gardien assermentée de niveau 1. Vous êtes l’ange gardien de qui ? Moi, de l’adolescente aux longs cheveux blonds qui essaie de retirer tout le plâtre de ses cheveux.
– Moi ? Je suis à deux doigts, mais alors deux doigts de démissionner de mon poste. Je suis l’ange gardien du maigrelet châtain. On condamne des gens pour mise en danger de la vie d’autrui, lui devrait être condamné, et elle s’époumona pour dire la fin de sa phrase pour mise en danger de sa propre vie ! Vous savez ce qu’il a fait la semaine dernière ? Il a sauté dans ses douves ! Vous savez ce que c’est, des douves ?
– Oui, lui répondit Jamey, mon château en a, et c’est très pénible à entretenir.
– Ah, enfin quelqu’un qui me comprend ! s’exclama Mady en levant les bras au ciel. Le plus beau, c’est qu’il a plongé comme ça, sans raison, parce que quand monsieur ne va pas bien, il pique une tête dans ses douves, et tant pis s’il choppe une maladie grave, très grave, très très grave, voire même un simple rhume. Et là, boum ! cette explosion chez lui alors qu’il n’y a même pas le gaz !
– Vous êtes sure ? dit Anita.
– Certaine ! Il est des membres de la famille qui sont un peu maladroit, et ils avaient un peu peur de tout faire sauter par accident. Non, il y a quelqu’un qui joue contre nous, un fantôme vindicatif, un esprit frappeur, je n’en sais rien, mais je vais trouver !
James se dit qu’il ne savait pas vraiment ce qu’était un esprit frappeur.
– Une catégorie de fantôme. Alors, je vous l’accorde, il y a des gens très bien chez les esprits frappeurs, des gens qui ne font cela que pour le fun, mais là, ce n’était pas. Non, je retire ce que j’ai dit, pour obtenir un tel résultat, il faudrait une bonne dizaine d’esprits frappeurs surentraînés, et cela ne se trouve pas comme ça, il faut vraiment avoir focalisé un énorme paquet de haine sur soi.
– Parce que vous croyez qu’un seul fantôme vindicatif ???
– Je ne dis pas non ! Cela fait deux cents ans que je suis l’ange gardien attitré de cette famille, et croyez-moi, ce Georges, il est très fort. Et son petit frère Philippe, pas mieux ! Non, il n’y a guère qu’Alexandre qui ne me cause pas trop de soucis.

Petit topo de la mission : Anita était en terrain connu, puisqu’elle devait protéger Cléophée, la petite-fille de James et Jamey. « Protéger », parce que, comme Gaël, son frère, elle était de santé fragile – mais alors très fragile. Presque la routine, surtout qu’elle était accompagnée de Simon, son meilleur ami pas gay (Oui, le petit ami est toujours gay dans certains livres/certaines romances. Là, Cléophée et Simon se connaissent depuis le CM1, et non, leur histoire d’amitié ne s’est pas changé en histoire d’amour). L’objectif était d’assister à une conférence sur la Restauration. Oui, il est des ados, qui ont envie de faire des études d’histoire, que cela intéresse. Tout devait bien se passer, si ce n’est qu’Anita avait l’impression que quelque chose couvait, comme une tension dans l’air – et pourtant, pour une fois, le château n’était pas entouré de brume. Ils étaient tous réunis dans la cour intérieure du château quand boum ! les vitres des quatre portes-fenêtres et quelques autres ornements avaient littéralement éclatés.

– Ah, commenta Mady, je ne voudrai pas être le policier qui enquêtera là-dessus.
– Pourquoi, des enquêteurs surnaturels seront aussi sur le coup ?
James se dit qu’il avait parlé trop vite, en voyant le regard que lui avaient lancé Mady et Anita : les enquêteurs, ce serait eux.

Ecriture 5

Je suis en train de lire, entre autre, un roman qui parle qu’il est bon, pour se débarrasser d’idées noires et autres, d’écrire « automatiquement », « sans y penser ». Là, je suis plutôt partie d’une « image » qui m’est venue, à la suite de lecture, image qui m’a faite sourire. On verra bien s’il en est de même pour vous – même si ce texte est plus long qu’une image. 

Bonjour

Je m’appelle James et je suis un fantôme.

Non, ne cherchez pas, nous ne nous connaissons pas.

Tout d’abord, laissez-moi remettre en cause tout ce que vous savez sur les fantômes. Non, je ne suis pas resté sur terre parce que j’avais eu une mort violente, ou parce que je subissais un châtiment. Je suis là parce que je suis écossais, nation qui a fourni, au cours de l’histoire, le plus de fantômes. Ensuite, j’avais un fort sentiment d’inachevé : je suis mort à l’âge de 44 ans, de mort naturelle et prématurée. J’ai eu le bonheur de retrouver mon ennemi préféré, James (oui, nous avons le même prénom), Jamey pour les intimes (prononcez son surnom comme vous voulez, il s’en moque comme de sa première hache), lui aussi victime d’une mort naturelle et prématurée, à l’âge de 36 ans. Nous hantons chacun régulièrement nos châteaux, tantôt le mien, tantôt le sien.

Si vous avez déjà eu peur en voyant un fantôme, je peux vous dire qu’il y a bien plus flippant. J’étais tranquillement en train de descendre l’escalier de mon château quand j’ai croisé l’un de mes petits-fils, Gaël, qui montait l’escalier pour rejoindre sa chambre. Il m’a vu, et m’a dit :

– Bonjour grand-père.

Le choc que j’ai eu ! Surtout que Gaël ne m’a pas connu, il est né 17 ans après ma mort.

– Mais… tu me vois ?
– Oui, m’a-t-il répondu, comme si c’était parfaitement naturel, et c’est le plus naturellement du monde qu’il a poursuivi l’ascension de l’escalier avant que je puisse le questionner davantage.

Je m’en suis ouvert à Jamey, qui n’a pas, mais alors pas du tout eu l’air étonné.
– Ma fille me voit, et nous parlons ensemble tous les soirs, pendant qu’elle prépare le repas. Alors pourquoi son fils ne te verrait-il pas ?
Oui, figurez-vous que mon fils cadet et la fille de Jamey se sont mariés. Pour ma part, cela faisait fort longtemps que je pensais à ce mariage, dès la naissance de mon second fils en fait, j’imaginai bien l’union de nos deux châteaux. Jamey m’avait répondu : « moi vivant, jamais ma fille n’épousera ton fils ». Nous étions tous les deux morts depuis plus de dix ans quand ils se sont unis.

Jamey et moi, nous nous étions fait pour nous entendre, finalement, et pour aller hanter des endroits qui nous tentaient.
– Allons chez Richard.
– Oui, mais il ne faut pas qu’il nous voit, il est sensible !
– Allons hanter son grenier !

Nous avons très vite renoncé, non que son grenier ne soit pas confortable, mais parce que Richard passait un temps fou dans son grenier, pour s’isoler : il était sûr que personne n’irait le chercher ici. Quelle idée !
– Je n’ai aucunement envie d’aller dans le mien, dit Jamey, rejoignant ainsi ma pensée.

Nous menions donc une vie de fantôme des plus ordinaires quand l’on me confia une mission. Je reçus donc la garde d’un bébé ange gardien prénommée Anita dont je devais surveiller la croissance. Déjà, j’avais beau être un fantôme, je ne savais pas que les anges gardiens existaient – même mort, on peut encore apprendre. De plus, je ne savais pas que les anges gardiens naissaient, grandissaient, puis devenaient aptes au service. Je croyais… en fait, je ne sais pas ce que je croyais. Je sais simplement que courir après un bébé qui vole dans tous les sens, c’est compliqué – et fatiguant. Même si ce bébé semble bien s’amuser !
– Nous vous avons choisi parce que vous êtes un fantôme voyageur, encore fortement attaché aux humains. Vous allez l’emmener avec vous et lui ferai découvrir le monde et ses dangers.
Qui m’avait confié cette mission ? Apparemment un ponte, un expert es anges gardiens. Pas un expert en éducation ! Je me rendis alors compte à quel point mes deux fils étaient sages. Je m’inquiétais même : n’avaient-ils pas été trop sages ? Ils passaient des après-midi à lire, l’un allongé à plat ventre par terre, l’autre assis en tailleur dans un fauteuil, alors que le fils de Jamey passait son temps, avec ses amis, à batailler avec ses amis contre des ennemis imaginaires.
Je conclurai bien sur une formule spirituelle « être mort, c’est fatiguant », mais je dois vous laisser : cela fait dix ans que je m’occupe d’Anita, qui a bien grandi, et qui n’a qu’une envie : effectuer sa première mission.

Ecriture 4

Ce texte fait suite à écriture 3. Le garde-champêtre Gaëtan Mauduit nous en dit un peu plus sur cette enquête qui n’en était pas vraiment une.

– Trois cadavres repêchés en six mois, cela faisait beaucoup. Cela faisait trop au lieu d’un juge qui a tenu absolument à m’interroger. Si. Comme si c’était moi le responsable. Je n’aurai peut-être pas dû lui dire que les cadavres ne poussaient pas comme des pâquerettes au printemps et que je n’étais pas responsable de leur cueillette. Il n’a pas vraiment apprécié. Je lui manquais de respect. Son idée était complètement tordue, et monsieur le maire, qui m’a reçu juste après pour me renouveler sa confiance, m’a dit que ce juge était un peu bizarre. En clair, quand il avait une idée en tête, il la suivait, la suivait, et tant pis si son idée le menait tout droit dans une impasse – les murs, c’est fait pour être escaladés. Je n’ai pas tout compris.

Le juge, ce qu’il m’a demandé ? Si je connaissais les frères Dacier. L’aîné, oui, les autres, un peu moins, rapport au fait que le second est monté à Paris et qu’il est maintenant dans les chemins de fer. Il m’a demandé si je connaissais Henri, le troisième, celui qui était porté disparu.
– Faites excuses, monsieur le juge, il n’est pas porté disparu, il est mort. Il est même enterré dans le cimetière du village.

J’ai eu l’impression de lui en boucher un coin, au juge. Alors, je ne sais pas ce qu’il a fait, ou pas fait, mais il a dû confondre avec quelqu’un d’autres. Ou mal lire les dossiers militaires, je n’en sais rien, ne m’en demandez pas plus. Je sais seulement qu’il avait dans le nez les frères Dacier, parce que les deux plus jeunes auraient fait des bêtises pendant qu’ils étaient au régiment. Au régiment, hein, pas au front, parce que, si tu fais des bêtises au front, soit tu meurs, soit ce sont les autres qui meurent. Bref, les frères Dacier auraient eu un tempérament un peu belliqueux pendant leurs années de service militaire, et plus de dix ans après, je ne voyais pas le rapport.

Mais le juge, lui, il était persuadé qu’Henri Dacier n’était pas mort, qu’il avait fui le front (depuis septembre 1914 donc, date à laquelle il a été tué dans la Marne), qu’il aurait été caché jusque là, que ses frères en auraient eu marre de le cacher et l’auraient tué.

C’est dangereux à quel point un juge qui a autant d’imagination ?

Et si vous vous demandez comment une telle idée lui est venue, c’est tout simplement parce que le jeune homme que j’ai retrouvé avait à peu près trente ans, l’âge qu’aurait Henri Dacier s’il était en vie, et parce qu’il était roux – comme les frères Dacier. Oui, les cinq frères Dacier ont les cheveux roux tous les cinq. Et alors, ce ne sont pas les seuls ! Mon collègue, Antoine Mâchefer, qui a moins de souci que moi parce qu’il n’a pas de fleuve qui traverse sa ville, il est roux aussi, et son fils – qui a sept ans – il est rouquin également.

Alors, je vais vous dire une bonne chose, monsieur le juge, si Henri Dacier avait été vivant, il aurait fait comme ses frères, il serait resté au front et il serait revenu comme tous ceux qui ont pu revenir.

J’ai quand même tenu à lui dire que le garde-champêtre du village voisin – Antoine Mâchefer si vous me suivez bien – était roux aussi, et avant qu’il me demande si cela ne pouvait pas être lui, je lui ai signifié qu’il pesait deux cent livres dont au moins deux de moustaches. Je ne l’ai même pas fait rire.

Ecriture – 3

Soit j’écris un article sur mes coups de blues, soit j’écris des textes sans rapport, et c’est plus profitable. Toute ressemblance avec un garde-champêtre ayant existé est purement fortuite. Je me mets simplement à la place de cet homme, qui n’a pas dû trouver son travail très drôle tous les jours.

– Ah ce n’est pas vrai !
Je suis Gaëtan Mauduit. Je suis le garde-champêtre du village depuis deux ans. Je clopine un peu, rapport à une blessure reçue au mollet pendant la guerre. Si l’on me dit « vraiment pas de chance », je réponds « mais si, j’en ai eu », parce que c’était en 1915 et que le front, c’était terminé pour moi. La guerre, non, mais on m’a trouvé un poste à l’arrière. J’ai eu l’impression d’être utile, malgré tout.

Là, par contre, je songe de plus en plus à rendre ma casquette de garde-champêtre, parce que cela fait trois fois cette année que l’on m’appelle parce qu’un corps a été repêché dans la Seine. Je ne suis pas devenu garde-champêtre pour cela !

Pardon ? Tueur en série ? Qu’est-ce que c’est que cela ? On est en 1920, et l’on ne sait pas ce que cela veut dire ! Lire des romans policiers ? Ah non, moi, la seule chose que je lis, c’est le journal, tous les jours, mais l’on n’a pas encore entendu ce mot, dans notre village, au bord de la Seine.

Passer à côté d’une série de crimes ? Mais il n’y a pas de crime ! Le premier corps qui a été retrouvé, eh bien, il a été prouvé que l’officier, il s’était suicidé. Comment cela a été prouvé ? Mais je n’en sais rien moi, je ne suis pas médecin ! Je sais seulement que cela a fait un foin pas possible, parce que l’officier était professeur à l’école militaire, et qu’ils ont été bien embêtés. Vous trouvez le mot faible ? Vous auriez dit quoi, vous, à la place ? Qu’ils ne savaient pas du tout comment expliquer qu’une personne qui était chargé de former les futurs officiers en avait tellement marre de sa chienne vie qu’il avait décidé de se foutre en l’air ? Ah, bien sûr, ils ont essayé de dire qu’il avait des problèmes personnels, et que c’était à cause de cela qu’il avait mis fin à ses jours. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression que cette excuse, elle sera encore utilisée bien des années après.

La seconde victime ? Je ne sais rien sur elle. Non, ce n’est pas qu’il y a eu un silence généralisé, c’est qu’elle a été retrouvée dans un tel état que l’on n’a même pas su dire si c’était un homme ou si c’était une femme. Comment ça, c’est facile  à voir ? Et bien moi, je voudrais vous y voir, le jour où vous retrouverez un squelette, ou peu s’en faut, sur une berge ! Il ne restait plus que des lambeaux de tissu sur les os ! Vous voulez vraiment que je poursuive la description ?

Non, cette fois-ci, nous n’avions pas eu de personnes disparues. Puis, l’on n’aurait pas vraiment pu faire un signalement. L’on n’avait pas de signalement ! Si quelqu’un avait disparu dans la ville voisine, oui, on l’aurait su. Dans les petites villes, tout se sait toujours, surtout à cette époque. Si cela se trouve, il venait de très loin, et il se sera échoué sur notre berge.

Et ce matin, j’ai trouvé un troisième corps. Non, ce n’est pas un crime, il n’y a pas de traces de blessures. Ni de blessures par balle, ni de plaies au couteau, ni même de blessure à la tête, aucune trace de coup. Non, mais, je sais à quoi cela ressemble, des traces de coups ! J’ai beau être garde-champêtre, j’en ai séparé, des bagarres, que ce soit aujourd’hui ou avant la guerre. Problème : personne ne connait cet homme, qui semble âgé d’une trentaine d’années. Ni ici, ni dans la ville voisine, alors que cela se voit que la mort est toute récente. Une noyade, sûrement. Un signalement très précis a pourtant été fait cette fois-ci : trente ans environ, cheveux blonds roux, taches de rousseur, 1m 70, 60 kilos. Alors je veux bien ne pas connaître tous les journaliers du coin, seulement quelqu’un doit connaître ne serait-ce qu’un peu le journalier qu’il emploie, non ? Alors oui, l’on a pensé que c’était peut-être un journalier qui avait quitté une ferme et ne s’était pas encore fait embauché dans une autre. Les journaliers ont tout de même de la famille, des amis, ce ne sont pas forcément des solitaires. Et quelqu’un qui aurait débarqué comme ça, du jour au lendemain dans une ferme, sans que personne ne le connaisse, eh bien, cela aurait fait jasé, c’est moi qui vous le dis !

Sur ce, je vous laisse, j’ai besoin de me remettre.

 

Ecriture – avril 2023

Comme l’on dit, toute ressemblance avec une personne existante ou ayant existé est purement fortuite. 

J’ai tout laissé derrière moi.

Même mon nom.

J’en ai donné un autre. Ils n’ont pas vérifié.

J’ai dit d’où je venais.

Ils m’ont cru.

Je n’avais pas menti.

Ce que j’ai laissé derrière moi ne regardait personne.

Je n’ai pas de regret.

Un jour, je ne suis pas allée travailler. Ma porte était-elle ouverte ? Non, je ne crois pas, je la fermais toujours. Quelqu’un aurait pu venir me chercher jusqu’ici ? Non, je ne crois pas. L’on dit que pour se cacher, rien ne vaut les grandes villes, mais, en 1920, les toutes petites villes à 600 kilomètres de votre village natal convenaient tout aussi bien. L’on a toujours besoin d’une ouvrière.

Mais ce jour là, je ne suis pas allée à l’usine. Je ne suis même pas allée me coucher. Je me suis effondrée sur la table de la cuisine, l’une des deux seules pièces de ce logement que j’avais trouvé dans la rue la plus sinistre de la ville. Oui, après coup, il est facile de désigner cette rue comme sinistre. De là où je vous parle, j’ai vu tout ce qui s’est passé dans cette rue, tout ce qui n’a pas pu être empêché, tout ce à quoi l’on n’a même pas songé.

Alors, ne cherchez pas, je suis morte de mort naturelle, je suis morte d’avoir été usée par la vie, je suis morte d’avoir trop fait, et depuis toujours. L’enquête, heureusement, a conclu que je n’avais pas été agressée, que je ne m’étais pas suicidée, non, mon cœur s’était juste arrêté de battre.

L’on conclut ainsi que Marie, qui disait être venue d’Auvergne, était morte en Normandie alors qu’elle était âgée d’environ quarante ans.

Annunziata a treize ans et un jour.

Bonjour à tous

Annunziata a fêté hier ses treize ans. Pour moi, une année de plus est toujours une victoire, eu égard au début très difficile qu’elle a eu dans la vie.

Ce dont elle ne pouvait pas se douter l’an dernier, c’est qu’elle serait accompagnée, ou plutôt suivie depuis seize semaines par Sultan, chaton qui, depuis sa naissance dans un arbre à chat, a lui aussi multiplié les soucis de santé. Lui aussi a failli perdre un oeil, il a subi plusieurs tests étant chaton (en fait, il est toujours un chaton) pour déterminer ce qu’il avait (on sait ce qu’il n’a pas, pas ce qu’il a), il est capable de protester énergiquement quand il n’est pas content (mais moins énergiquement que sa soeur Odabella et, contrairement à son frère Azuro, il ne se transforme pas en chat ninja chez le vétérinaire) et sa croissance est plutôt très lente. Qu’à cela ne tienne, il aime beaucoup Annunziata, qui le lui rend bien jour après jour.

Je vous souhaite à tous un bon weekend.

Instant d’écriture : dans le domaine du jamais plus II

Nous sommes le 9 février.

Dans deux jours, ce sont les vacances scolaires.

Jamais plus tu ne me souhaiteras bonnes vacances.

Jamais plus tu ne me demanderas combien de copies j’ai à corriger cette fois-ci.

Jamais plus tu ne me souhaiteras bon courage pour les conseils de classe ou pour les réunions parents-professeurs.

Jamais plus tu ne joueras de la guitare.

Jamais plus tu ne peindras des tableaux très colorés.

Jamais plus tu n’écouteras de chansons de Jean-Louis Aubert.

Jamais plus tu ne parleras de tes envies de voyage. 

Jamais plus tu ne seras victime de catastrophe en tout genre. 

Jamais plus tu ne m’offriras des orchidées.

Jamais plus tu ne mangeras de gâteaux au chocolat. 

Alors oui, des messages consolants ont été dits aujourd’hui. J’ai encore tellement de mal à me faire à cette réalité, à me dire que tu n’es plus là. 

Deuil

Bonjour à tous

Tout est dans le titre. 

Je viens d’apprendre aujourd’hui le décès de mon cousin B*** dont je suis très proche. La nouvelle a été tellement…  que je ne puis encore parler de lui au passé. Je précise qu’il est décédé aujourd’hui, subitement. 

J’avais programmé des articles jusqu’à …. je ne sais plus quand (cinq sont programmés, je viens de vérifier, je les laisse).. 

Pour le mois du polar, je ferai…. comme je pourrai. 

Vraiment comme je pourrai. 

Je le maintiens mais je pense que je serai très très peu active pour venir vous lire. 

Je fais confiance aux personnes qui me lisent et me suivent. Je sais qu’elles comprendront. 

Edit : je pense reporter le mois du polar en mars. Parce que je n’ai pas l’énergie pour ce mois. Parce que je pense à mon oncle, ma tante. Voilà. 

Edit de 18 h 33 : je n’ai pas touché aux articles déjà prêts, que ce soit les partenariats ou ceux que j’avais programmé pour cette semaine. Parce qu’ils ont été écrits avant. J’ajoute que j’avais commencé le brouillon de mes deux prochains billets. Je pense non les retoucher, mais les compléter, pour ne pas ôter ce que j’avais mis avant. 

Edit du 2 février : première…. dernière…. Je viens d’avoir l’aînée de mes cousines au téléphone. Trente ans nous sépare. C’est moi qui la tiendrais au courant de la date des obsèques, mot que je peine à écrire ce soir. En parler, mettre des mots sur ce qui est survenu, parler de lui avec elle qui le connaissait depuis sa naissance. Essayer de ne pas me sentir trop mal, parce que ma douleur ne changera strictement rien. 

Alors, pour terminer ce billet, pour lui, son chanteur préféré depuis quarante ans :

 

Court texte – retour à la nature

Ce texte m’a été inspiré par une photo du blog de Soène, article Deux en un le samedi.

Il n’y a pas à dire, les randonnées, c’est sympa – jusqu’à un certain point. Léonie aimait la nature, le silence – et voilà que l’un des randonneurs s’était improvisé guide touristique et ne cessait de décrire tout, absolument tout ce que l’on voyait, nommant chaque plante, chaque arbre en français et en latin. Pour la prochaine rando : prendre des bouchons d’oreilles.

Soudain surgit devant eux un mur d’enceinte – ou plutôt, ce qu’il en restait. La nature avait repris ses droits et recouvrait entièrement le mur, ou plutôt ce qu’il en restait, l’un des côtés étant entièrement détruit. Léonie regarda, intriguée, mais franchement, quand elle marchait… eh bien, elle marchait. Elle n’avait pas forcément envie de questionner ! Cependant, il fallut que Danielle, férue d’histoire depuis toujours, avait voulu en savoir plus, et bien sûr, Arthur, leur guide, les éclaira de ses lumières.

– La partie effondrée du mur d’enceinte l’aurait été en 1944, démolie par deux chars d’assaut enflammés. C’est pour la légende : les chars d’assaut n’étaient pas en flamme.
– Ravie de l’apprendre, commenta Léonie qui avait une folle envie d’en finir – elle n’aimait pas parler de cette période historique. Et il y a quoi, derrière ce mur ?
– Des terres, et un manoir datant du XIXe siècle. Il appartenait jusqu’à une date récente à une famille qui ne savait pas trop quoi en faire, si ce n’est venir de temps en temps pour aérer, constater qu’il ne s’écroule pas totalement, et le louer pour des tournages.
– Merveilleux, commenta Léonie avec une absence totale d’enthousiasme.
– J’ai mieux : ils auraient réussi à vendre, et bientôt, se tiendra ici un authentique cabaret champêtre, avec chambre d’hôtes et salon de thé.
– Merveilleux ! s’exclama Danielle avec un authentique enthousiasme. On pourra ainsi faire une pause lors d’une prochaine randonnée. Vous, je ne sais pas, mais moi, je n’en peux plus !