Archive | février 2024

Homicides, tome 4 de Philippe Squarzoni

édition Delcourt – 154 pages

Présentation de l’éditeur :

Des ados, avec plus de gueule que de jugeote, ont buté une conductrice de taxi pour une poignée de bijoux et quelques dollars de plus. Le plus jeune est persuadé que s’il rend la camelote, il pourra dormir au chaud chez lui ce soir. Il s’est pourtant vanté partout d’avoir tabassé la victime à mort. Ce genre de crétin facilite l’enquête mais ça en dit long sur la valeur qu’il donne à la vie humaine…

Mon avis : 

Je poursuis la lecture de cette série avec celle du tome 4 (les tomes 1 et 2 sont empruntés, je les ai donc réservés). Nous retrouvons Pellegrini qui met toute son énergie dans une enquête, une seule – même s’il est bien forcé d’en mener d’autre – le meurtre de Latonya Wallace, cette gamine de onze ans qui a été retrouvé assassinée à la fin du premier tome d’Homicides. Les pages de droite du premier chapitre sont saisissantes, elle nous le montre devant la montagne de documents que cette affaire a générée, la montagne de documents qui a dû être rédigée, tous ceux qu’il a dû remplir, pour que la procédure reste dans les clous. Face à toutes ses informations, il se livre aussi à un auto-examen des plus  durs. Il n’est pas le seul dans ce cas, à se reprocher ce qui, à leurs yeux, apparaît comme des négligences impardonnables. Pellegrini ruine peu à peu sa santé au fil de ce tome, au point d’être obligé de prendre un arrêt maladie. Et c’est pendant cet arrêt qu’une avancée décisive semble avoir lieu  – ou comment le destin peut se jouer de nous, mais pas du tout de la manière dont on peut le penser.

Dans ce quatrième tome, nous retrouvons d’autres enquêteurs acharnés et compétents. Edgerton, par exemple – regarder bien la double page 68-69 qui lui est consacrée. Comme Pellegrini, il est un solitaire, il aime mener ses interrogatoires seuls, travailler seul, ce qui ne l’empêche jamais d’être un policier consciencieux. Troisième policier que nous retrouvons, Worden, un cas à part parce qu’il est un vieux de la vieille, il pourrait largement être à la retraite, sauf qu’il ne prend pas sa retraite. Depuis le début de l’année, il accumule les affaires non résolues, non parce qu’il est un mauvais enquêteur, mais parce que, certaines affaires, personne ne peut les résoudre, et l’on s’en aperçoit très vite. Worden a beau être un sexagénaire, il a trois immenses qualités : un immense sens de l’observation, une incroyable mémoire qui lui permet de bien connaître sa ville, et, dernière qualité qui devrait être banale, évident, il n’est pas raciste. Aussi, je me suis surpris à lui souhaiter le meilleur, à cet enquêteur consciencieux et chevronné.

Mais tous les enquêteurs ne réussissent pas. Prenons Ceruti, arrivé aux homicides en même temps que Pellegrini. Tous les deux ne semblaient guère différents, et pourtant, le second a très vite montré un acharnement et une minutie remarquée, tout comme il a su s’atteler à la rédaction de toutes les procédures certes ennuyeuses, mais utiles pour un enquêteur. Ceruti n’a pas su s’y attacher. Viré ? Non. Mais il est d’autres services que les homicides dans la police de Baltimore.

Tout un chapitre est consacré aux autopsies, aux procédures qui doivent être suivies, aux sensibilités aussi, propres à chaque enquêteur. Il s’agit de montrer la réalité, de démythifier aussi, tout en montrant qu’elles sont un des temps forts de l’enquête, mais qu’elles ne peuvent avoir lieu sans tout ce qui a précédé, c’est à dire toutes les constatations sur les scènes de crime.

Ce tome se termine sur un clifhanger, sur ce qui est annoncé comme étant « l’affaire d’une vie ». Cela donne encore plus envie de lire le tome 5.

Challenge « American Year » – The Cannibal Lecteur et Chroniques Littéraires (du 15 novembre 2023 au 15 novembre 2024).

Le Manoir de Castlecatz, tome 2 – Les Larmes de Kernunnos par Alain T. Puysségur

Présentation de l’éditeur :

Le Manoir a survécu à la catastrophe de Chamonios ! Kovhan et Bruyne ont permis d’éviter le pire et se questionnent : comment un batrapaud a-t-il pu infiltrer leur monde ? Qu’est-il arrivé au Cristal d’Eau-pâle ? Pourquoi les perturbations magiques se poursuivent-elles ? Sur ordre du Sanctumancia, ils doivent garder le secret de leurs découvertes. Tandis que les cours reprennent et se compliquent, le Deuxième quart apporte une énigme de taille : Kernunnos. Ce mot n’évoque rien aux Aspirants et ne semble exister nulle part. Que signifie-t-il ? La perspective d’un voyage à la célèbre cité d’Ar Run enthousiasme tout le monde. Mais hors du domaine de Castlecatz où l’hiver s’installe, une autre menace grandit. Les rumeurs disent vrai, la Mer des brumes s’étend et engloutit des villages sur son passage… Découvrez les aventures de Kovhan et Bruyne, deux chats apprentis magiciens au sein du renommé Manoir de Castlecatz !

Mon avis : 

Merci aux éditions Scrineo et à Netgalley pour leur confiance.

Retrouver Kovhan et Bruyne fut un plaisir. Savoir que je devrais patienter de longs mois avant de les retrouver l’est un peu moins; Mais savourons l’instant, savourons ce tome 23 comme le tome 1 l’a été.

Kovhan et Bruyne poursuivent leurs études, franchissent une à une les étapes de leur apprentissage, et doivent, comme les autres aspirants, se confronter à une nouvelle épreuve-énigme : Kernunnos. Non, elle ne sera pas facile, l’on monte d’un cran dans les difficultés, l’on monte d’un grand aussi dans la connaissance que l’on peut avoir de soi et des autres, chaque personnage se retrouvant caractériser petit à petit. L’on découvre aussi la cité d’Ar Run, la rigidité de ses règles qui ne fait que dissimuler une immense inquiétude. Il y a ce que l’on sait, il y a ce que l’on redoute, il y a aussi ce que l’on dissimule, et si l’hiver est là, les menaces sont bien réelles et viennent de tous côtés.

Une très belle série de fantasy.

Jeux mortels en hiver d’Alfred Lenglet.

Présentation de l’éditeur :

Vivian Verdier, un étudiant de vingt ans, est retrouvé dans un bois des environs de Mâcon. Il a été abattu d’une décharge de fusil de chasse alors qu’il faisait son footing.
Pour Léa Ribaucourt, lieutenant de police chargée de l’enquête, la piste du règlement de compte est la plus probable : Vivian se livrait à un trafic de stupéfiants. Mais Léa a beau passer l’entourage de la victime au crible, les suspects sont rares. Et que signifie le chiffre 4 que le jeune homme a tracé sur le sol avant de sombrer dans le coma ?
Léa ne le sait pas encore, mais elle est la prochaine cible d’un adversaire particulièrement machiavélique…

Mon avis : 

Je tenais à rédiger mon avis, même si je n’ai pas vraiment apprécié ce livre. Ce n’est pas non plus une lecture désagréable, non, c’est plutôt que j’ai aimé certains choses, que j’en ai moins aimé d’autres, et cet avis sera le reflet de ces impressions.

Tout d’abord, j’ai aimé l’intrigue et sa construction. Léa et Aurel enquêtent au départ sur un trafic de drogue, ils entendent bien interroger l’un des membres avérés de ce trafic, Vivian Verdier, un petit dealer comme les autres. C’est alors qu’ils devaient procéder à son interpellation, avec tout le respect de la procédure, qu’ils découvrent sa disparition. Il sera retrouvé rapidement, agonisant dans un bois, victime d’une décharge de fusil de chasse. Non, il ne s’agit pas d’un accident de chasse, il s’agit d’un meurtre, de quelqu’un qui lui en voulait personnellement – pour faire souffrir autant quelqu’un, il faut vraiment que cela soit personnel. J’ai apprécié cette intrigue, qui nous mène sur des chemins que l’on ne pensait pas explorer, au côté de personnages que l’on n’attendait pas forcément : quelques chapitres nous mettent d’ailleurs dans la peau du tueur, sans pourtant que ceux-ci nous en dévoilent trop sur son mobile, voire sur son identité.

Ce que je n’ai pas aimé, en revanche, c’est la personnalité des enquêteurs. Même si Aurel, le vaillant adjoint de Léa, sera toujours d’un soutien sans faille, je le trouve bien « sensible » après sa rupture avec sa femme – sensible, dans le sens très facile à séduire, ne voyant pas … certaines choses (oui, je n’en dévoilerai pas trop non plus). Quant à Léa, je l’ai trouvée très midinette, très sensible elle aussi, ne pouvant exprimer ce qu’elle ressent réellement – il faut dire que son compagnon ne lui en laisse pas l’occasion, ne se montre pas très à l’écoute non plus et se trouve, finalement, plutôt satisfait de la situation.

C’est le deuxième roman que je lis mettant en scène cette enquêtrice (pour une fois, je respecte l’ordre de publication), et je ne pense pas lire les deux tomes suivants.

Poèmes du Wessex – Poèmes d’hier et d’aujourd’hui – La Risée du Temps de Thomas Hardy

Poésie/Gallimard – 240 pages;

Mon avis :

J’ai l’impression de m’éloigner un peu, beaucoup du mois du polar, pour la rédaction de cet avis sur un recueil de poèmes emprunté à la bibliothèque de Rouen, en vue de poursuivre le challenge Solidaire Babelio. Thomas Hardy est en effet un des trente auteurs sélectionnés, et, quand j’ai découvert qu’il était aussi l’auteur de plusieurs recueils de poèmes, je me suis dit que cela me sortirait de mes propres sentiers battus.

Trois recueils différents, publiés en 1898 (Poèmes du Wessex), en 1901 (Poèmes d’hier et d’aujourd’hui) et en 1909 (La risée du temps) nous montrent que Thomas Hardy né en 1840, n’a jamais cessé d’écrire des poèmes. Le thème qui m’a le plus frappée, c’est sans doute celui du souvenir. Que restent-ils des morts, une fois qu’ils sont morts, si ce n’est la manière dont les vivants se souviennent encore d’eux et les empêchent de sombrer dans une mort définitive, la pire de toutes ? (voir, entre autre, le poème « Immortalité »). Il en est de même des amours, qui ne sont pas éternelles, qui sont parfois remises à plus tard, à cause de circonstances de la vie (« Longtemps promis »), à cause d’amours qui ne sont pas vraiment dans la norme (« Gens du bourg »). L’on peut préférer aussi le souvenir de l’être aimé, à la confrontation de ce que l’être aimée est devenue (« Ma Cicely »).

La mort et la douleur des vivants, douleur de recevoir une lettre de l’être aimé alors que celui-ci est mort (« Une épouse à Londres »). La guerre n’est jamais loin, elle aussi cause mort et douleurs, les survivants, ceux qui en sont revenus, peuvent en témoigner (« Les capitaines de Casterbridge »). Au milieu de ce désespoir, le lecteur peut se demander ce qui apportera au poète un peu de sérénité. Il sera alors simple de dire « les beaux paysages de la campagne anglaise ». Ils sont là, effectivement, ils accompagnent morts, vivants, amoureux déçus, amants désespérés, mais les rassénèrent-ils ? J’en doute.

Je terminerai par citer « Elle, à ses funérailles » (traduction de Frédéric Jacques Temple)

On l’emporte à son dernier repos
En majestueuse et lente procession
Que je suis, à ma place d’étrangère
La famille, ici. Moi, son amante, là.

J’ai gardé ma robe voyante ;
Eux, portent des habits de deuil.
Mais ils l’entourent les yeux secs,
Tandis que la douleur me consume.

 

Les jonquilles de Mick – février 2024

Bonjour à tous

Non, ce n’est pas un billet polar que je propose aujourd’hui, parce que je n’apprécie pas la lecture que je suis en train de faire.

Je vais vous parler des jonquilles qui ont fleuri dans le pré d’Urgente de Longuemare (même si elle n’est plus et si aujourd’hui ce sont des moutons bretons qui vivent dans son pré, cela reste « son » pré.)

Mick était, dans les années 1980, le chat de nos voisins. Après sa mort, des jonquilles ont été plantées en son hommage. Pour des raisons que nous n’expliquons pas vraiment, les jonquilles ont fini par passer sous le grillage. Quarante ans plus tard, elles fleurissent toujours.

La photo est un peu floue, mais je ne voulais pas entrer dans le pré et déranger les moutons.

Mick était le papa chat de Rose, mon premier chat (1980-1995). J’avais deux ans et demie quand mes parents l’ont adopté, je me souviens simplement de notre retour à la maison avec elle – six mois plus tard, elle mettait au monde une portée de chaton, et mes parents ont découvert ensuite les bienfaits de la stérilisation. Mes parents ont gardé deux chatonnes, et la troisième a été adoptée par ma grand-mère.

Bon dimanche et bonnes lectures à tous.

Un espoir rêvé de Roukiata Ouedraogo

Présentation de l’éditeur : 

Burkina Faso. Ella et Lamine se rencontrent dans un camp de réfugiés. IIs ont fui leur village, lui à cause des inondations et des persécutions, elle pour échapper aux kalachnikovs des djihadistes. Certain que leur avenir est ailleurs, Lamine propose à Ella de partir avec lui. Elle ne peut se résoudre à quitter sa famille Mossi, qui voit d’un mauvais œil sa relation sentimentale avec le jeune Peul. Lamine s’en va seul. De l’Afrique de l’Ouest à l’Europe tant idéalisée, il connaît tous les dangers : le franchissement de frontières où les passeurs le dépouillent, l’esclavage en Libye, la traversée chaotique de la Méditerranée. Au camp, Ella, elle, fonde une petite école pour aider les enfants réfugiés. Arrivé en Italie puis en France, Lamine survit vaille que vaille. Finalement, une association et ses bénévoles lui permettent d’obtenir la nationalité française. Quelques années après, il revient au Burkina Faso avec des enseignants et des ONG internationales qui examinent le projet éducatif de la jeune fille. Au camp, ses espoirs rejoindront-ils les rêves d’Ella ?

Mon avis : 

Merci à Netgalley et aux éditions Rageot pour leur confiance.

Quand j’ai un tel livre entre les mains, j’ai une crainte : qu’il ne trouve pas son public. En effet, si la couverture est belle et juste, le sujet est dur, et je crains que certains parents, pour protéger leurs enfants, ne veulent pas que ceux-ci ne le lisent. Ce serait dommage, même si cette lecture est dure. Dure parce que réaliste.

Nous sommes au Burkina Faso. Nous rencontrons deux adolescents, qui n’ont plus vraiment le temps d’être des adolescents. ils ont dû fuir leur village, et savent qu’ils ne pourront pas y retourner. Ils ont perdu beaucoup et se  demandent quel sera leur avenir. Ils choisissent des voix différentes : rester pour Ella, partir pour Lamine. C’est ce dernier que nous suivrons, à travers un parcours semé d’embûches et de profiteurs (oui, je fais court). Pour arriver à destination, il lui a fallu non seulement beaucoup de chance, mais aussi une volonté chevillée au corps – corps et esprits ont souffert tous deux. Ella est restée, mais elle aussi devra se battre pour mener à bien son projet, monter une école pour que les enfants du camp étudient à nouveau. Les organisations humanitaires, telles qu’elles sont montrées dans ce livre, ne m’ont pas toujours semblé très humaines – parce que débordées ? parce que trop attachées aux formes, aux professionnelles, bref à ceux qui savent mieux que les réfugiés ce qui leur est vraiment utiles ? Oui, je suis un peu dure face à eux, mais je ressens cependant un immense sentiment d’impuissance face aux faits qui nous sont racontés, comme si rien ni personne ne pouvait changer quoi que ce soit à ce qui est arrivé à cause de la folie de certains hommes.

Le Stream, tome 1 : Au fond de l’eau d’Amandine Peter

édition explora – 300 pages

Présentation de l’éditeur : 

Et si vous plongiez dans le Stream ?
Le Stream, cours d’eau artificiel qui sillonne l’île d’Hakinahi, est le coeur de l’éco-cité de Woda. Nyna Waters est une streamer. Avec son équipe de la centrale hydroélectrique, elle assure la maintenance du Stream en le parcourant. Un jour, pendant qu’elle navigue, Nyna perd tout contrôle et se retrouve éjectée du Stream. Alors que tous la croient coupable d’une erreur, la jeune femme est persuadée qu’une anomalie est responsable de l’incident. Secondée par son meilleur ami Darian et le Capitaine Fury qui se détestent cordialement, Nyna mène l’enquête. Elle est loin de se douter que sa vie et celle de toute la cité est sur le point de basculer…

Mon avis : 

Merci aux éditions Explora et à Netgalley pour ce partenariat.

Ce livre appartient au genre de la science-fiction, genre pour lequel je n’ai strictement aucune prédilection, et pourtant, j’ai apprécié la lecture de ce livre, sans doute parce qu’il se double d’une intrigue policière.

Nous voici à l’éco-cité de Woda, qui est sillonnée par le Stream, cours d’eau artificiel dont les streamers assurent la maintenance. Ce n’est pas aussi simple que cela en a l’air puisque ceux-ci passent leur temps, eh bien, dans l’eau. Risqué ?  Non, pas quand on maîtrise toutes les techniques est que l’on connait parfaitement le Stream. Bref, tout irait pour le mieux dans le meilleure des mondes si un jour Nyna, streamer fière de son métier et de ses compétences, ne se trouvait éjectée, et sauvée presque miraculeusement. Bien sûr, il serait facile de dire que c’est de sa faute, qu’elle n’a pas maîtrisé une manoeuvre. Elle sait très bien qu’il n’en est rien, elle sait aussi que les anomalies se multiplient, anomalies qui se résolvent quasiment miraculeusement, sans que cela n’inquiète personne au sommet de la cité : une bonne anomalie est une anomalie disparue.

Or, ce n’est pas la première fois que ce problème apparaît : le capitaine Fury pourrait en témoigner, lui qui n’a plus nagé dans le Stream depuis douze ans, depuis un accident qui a causé la mort de son co-équipier. Douze ans, c’est également le nombre d’années qui se sont écoulées depuis la mort des parents de Nyna et de Komo.

Ce que j’ai aimé dans ce roman, c’est qu’il faut toujours s’attendre à être surpris, l’intrigue ne se déroulant pas du tout comme l’on pourrait s’y attendre – parce que les dirigeants de la cité eux-mêmes ne mesurent pas vraiment l’ampleur du problème, l’ampleur de ce qui a été dissimulé depuis tant d’années. Les personnages ne sont pas manichéens, ce qui est plutôt une bonne chose. Si Nyna est déterminée, et le nombre d’épreuves qu’elle devra traverser ne fera que renforcer sa détermination, elle devra aussi se demander à qui elle peut réellement se fier. J’ajoute que, pour elle comme pour d’autres, il n’est pas forcément facile de remettre en cause ce en quoi l’on a toujours cru.

Un bon roman, une bonne intrigue, des personnages d’une grande richesse, que demander de plus ?

Évaporé d’Anne-Solen Kerbrat-Personnic

Présentation de l’éditeur : 

Pierre Alleux, courtier en assurances, doit se rendre à Bruxelles pour négocier un gros contrat. Il n’y arrivera jamais. Il disparaît des écrans radars avant d’attraper son train. Inquiète de son silence, son épouse s’en ouvre aux forces de l’ordre. Mais elle n’est pas la seule à s’interroger sur cette « évaporation » soudaine. Pierre avait une existence moins lisse qu’il n’y paraissait…

Mon avis :

Ne cherchez pas, je suis casse-pieds ! Je vous explique :  il m’arrive de voir dans des intrigues des choses que d’autres ne remarquent pas, ne voient pas, et cela ne me pose pas de problèmes.

Ce que je note dans les romans d’Anne-Solen Kerbrat-Personnic est la place des femmes et des problèmes qu’elles peuvent rencontrer dans leur vie de couples. Par extension, il est question aussi de la parentalité. Dans ce roman, il est des femmes qui ont désiré avoir des enfants, et d’autres qui ne l’ont pas désiré, et donc n’en ont pas eu. Dans la première catégorie, nous avons Astrid, ou encore la mère de Pierre, dans la seconde Romane, la soeur d’Astrid et Laetitia. Il ne s’agit pas ici de parler de ne pas pouvoir avoir d’enfants – puisque deux de ses femmes entraient dans cette catégorie, et l’une  a adopté, preuve que vouloir un enfant n’est pas du tout incompatible avec le fait de ne pouvoir en porter un. Astrid est prête à tout pour son fils, Romane n’a jamais éprouvé le désir d’être mère, pour de nombreuses raisons que je respecte, et que son mari, malgré son propre désir de paternité, a respecté aussi. De son côté, Perrot souffre de ne voir ses enfants qu’un week-end sur deux, lui qui aimerait tant pouvoir passer plus de temps avec Clara et Simon. Pour résumer, l’on peut écrire un roman policier et s’intéresser à la société qui a « donné naissance » à ce roman.

Pierre, justement. Il a disparu, et cette disparition n’est pas du tout volontaire de sa part. Perrot et Lefèvre enquêteront sur sa disparition, et cela sera moins facile qu’il n’y paraît, parce tous, ou presque, ont des secrets, parce qu’ils n’ont pas forcément envie de partager leurs secrets, et tant pis si cela réduit les chances de retrouver Pierre. Pour eux, de deux maux, il a fallu choisir le moindre – pour eux, pour ne pas compromettre leur confortable existence. Plus l’on a à perdre, moins l’on est disposé à aider autrui.

Les deux enquêteurs m’ont semblé un peu en retrait dans cette enquête, mais c’est peut-être simplement mon impression. Ils se montrent cependant pugnaces lors des interrogatoires, il n’est pas question de laisser passer quoi que ce soit.

Evaporé – un titre aux multiples sens.

 

 

Honolulu noir de Rodney Morales

Présentation de l’éditeur : 

Hawaii, 2007. A la suite d’un divorce douloureux, David Kawika Apana quitte le journalisme pour devenir détective privé. Sa première enquête porte sur la disparition d’une jeune activiste, fille d’un criminel abattu dix-huit ans plus tôt à Honolulu. David avait alors suivi cette affaire qui n’a jamais été résolue.

Mon avis :

Si vous aimez les romans noirs, délicieusement noirs, les classiques de la littérature américaine, si vous n’aimez pas nécessairement les oeuvres trop sanglantes, si vous appréciez de voir des personnages nettement caractérisés et fortement intéressants, alors ce livre est fait pour vous.

David Kawika Apana est détective privé. Il a de l’expérience, pas tant dans cette activité que dans celles des enquêtes, et il sait ce qu’il en coûte quand les enquêtes dérangent. Sa première affaire officielle consiste à enquêter sur la disparition d’une jeune activiste et de son compagnon, disparition qui n’a sans doute rien de volontaire.

Polar solide qui emprunte aux codes des années cinquante, Honolulu noir se passe cependant de nos jours, ou peu s’en faut (l’intrigue se passe en 2007) et nous parle de nos problèmes actuels : le racisme ordinaire, par exemple, les magouilles de personnes puissantes, très puissantes, qui ne pensent pas qu’un jour, l’addition leur sera présentée. Pourquoi donc, puisque leur puissance, de plus en plus grande, ressemble fortement à un totem d’impunité. Je ne parlerai pas non plus du sort qu’ils peuvent réserver à d’autres êtres humains, aussi j’ai tremblé pendant l’enquête de David, me demandant ce qui avait pu arriver à ces deux jeunes gens déterminés et, même si nous ne les connaissons qu’indirectement, sympathiques par leur volonté que justice soit faite.

Personnage principal, Honolulu est décrite de manière très éloignée des images de carte postale, et c’est tant mieux.

Challenge « American Year » – The Cannibal Lecteur et Chroniques Littéraires (du 15 novembre 2023 au 15 novembre 2024).

La cité des brumes oubliées de Sachiko Kashiwaba

Présentation de l’éditeur : 

Partie seule dans un lieu reculé pour les vacances, Lina se perd dans un épais brouillard. Lorsque la brume se dissipe enfin, la jeune fille découvre au cœur de celle-ci un village incongru… peuplé de personnages mystérieux et hauts en couleur.
Coincée dans la pension d’une vieille mégère à la tête bien trop grosse, Lina va alors devoir travailler dans des boutiques plus extravagantes les unes que les autres pour regagner sa liberté au cours d’un voyage d’apprentissage rythmé par des rencontres inoubliable

Mon avis : 

J’ai décidé cette année de (re)lire de la littérature japonaise, d’au moins lire un titre par mois, et je dois dire qu’avec ce titre, je n’ai pas vraiment très bien commencé l’année. Je n’ai pas accroché aux personnages, y compris à ce personnage principal, Lina, qui a été envoyée par son père dans ce lieu reculé, pour y passer des vacances, mais pas vraiment. Je dirai plutôt qu’elle subira un voyage initiatique quasiment immobile, comme son père des années plus tôt, sans qu’il ait vraiment pris la peine d’avertir sa fille de ce qui l’attendait – à moins que lui-même ne le sache pas vraiment.

Je n’ai pas été sensible à l’intrigue, j’ai même très vite décroché. L’une des raisons est peut-être parce que je n’ai pas trouvé les personnages assez développés, assez caractérisés, l’autre est que je me suis demandé quel pouvait bien être le message délivré par ce roman conte pour enfant. Je n’ai pas trouvé, contrairement à ce que promettait le quatrième de couverture, les personnages « mystérieux » et « hauts en couleur ». Je les ai trouvés bizarres, excentriques, et c’est tout. J’ai aussi prêté ce livre à un de mes élèves, qui n’a pas plus accroché que moi mais a bien compris pourquoi je n’avais pas apprécié ce livre. J ne désespère pas : j’ai d’autres romans japonais dans ma PAL.