Archive | février 2020

Amitié Amoureuse par Hermine O.L. du Nouÿ

Meurtres à Atlanta par James Baldwin

Présentation de l’éditeur :

Entre 1979 et 1981, vingt-huit enfants, tous âgés entre 7 et 16 ans, tous noirs, tous issus de familles pauvres sont assassinés à Atlanta, Géorgie, dans le Sud profond des États-Unis.  En juin 1981, un Noir de 23 ans, Wayne Williams, est arrêté pour le meurtre de deux hommes. C’est le suspect idéal. Et c’est lui qui sera jugé, puis condamné à la prison à vie pour le meurtre des vingt-huit enfants, sans aucune preuve tangible.
Quand James Baldwin, qui s’est toujours senti du côté des plus faibles, est invité à écrire un livre sur les meurtres de ces enfants, il accepte. Après une enquête menée sur place, quatre ans après les événements, Baldwin ne conclut ni à la culpabilité de Williams, ni à son innocence. L’essentiel est ailleurs.
Le drame d’Atlanta agit en effet à la manière d’un révélateur et montre la limite des conquêtes du mouvement des droits civiques. Baldwin décrit une société déchirée par la haine et la peur, par la hantise raciale.
Trente-cinq ans après sa première publication, ce texte n’a rien perdu de sa force ni de sa modernité. Ni, tragiquement, de son actualité.

Merci aux éditions Stock et à Netgalley pour ce partenariat.

Mon avis :

Comment se fait-il que ce livre ne soit pas plus connu en France ? Paru pour la première fois en 1985, il est aujourd’hui édité à nouveau par Stock. J’ai envie de vous dire : ne lisez pas mon avis, lisez le, lui !

Cet essaie parle de meurtres, à Atlanta, en Georgie, un état qui tint un rôle important dans la guerre de Sécession, côté sudiste. UN homme,noir, fut condamné pour deux meurtres, mais surtout, un homme noir qui fut implicitement accusé de la mort de vingt-huit enfants, sans que l’enquête soit suffisamment approfondie pour prouver qu’il était bien le coupable – voire même pour trouver LE coupable.
Point commun de tous ces morts ? Ils étaient tous noirs, ils étaient tous pauvres, et leur mort n’a pas suscité beaucoup d’intérêt. Leur mort n’a pas bouleversé l’économie locale, elle n’a pas entraîné une psychose, elle a eu loin des quartiers où vivent les Blancs.

personne ne protège les pauvres, ils doivent se défendre eux-mêmes. Les pauvres n’existent pour les autres que comme une gêne, une menace, une occasion de faire du fric ou une œuvre missionnaire ou parfois l’envie de faire une bonne action sincère. « les pauvres, vous les aurez toujours avec vous », disait le Christ. Soit, mais vous les voyez rarement et ne les écoutez jamais.

Ce n’est pas tant l’enquête qui est reconstituée, que ses errances, ses erreurs, les peurs qu’elle engendra, les idées reçues qu’elle fait ressurgir. Le procès est inclus aussi, sans oublier le procès, implicite, fait à la famille de l’accusé – cet homme qui n’avait pas réussi, aux yeux de la société, à devenir pleinement un homme. Cette affaire est le point de départ d’une réflexion sur la condition des Noirs, aux Etats-Unis mais aussi dans le monde entier, mais aussi sur la pauvreté. A une époque (les années 80) où beaucoup pensaient que les droits des Noirs avaient nettement progressé, James Baldwin montre, démontre que ce n’est pas du tout aussi évident qu’on le pense – du point de vue des Blancs. Oui, ce livre contient de profondes réflexions sur le racisme, la culture, les droits que les Blancs octroient à tous les autres (ou pas), les droits que les Blancs s’octroient de se mêler des affaires des autres, d’aller rendre ce qu’ils estiment être la justice, ailleurs, dans n’importe quel autre pays tant que cela correspond à leurs intérêts économiques. Les USA se présentant comme sauveurs du monde, cela ne date pas d’aujourd’hui, et James Baldwin montre bien que cela continuerait : il ne s’était pas trompé.

En lisant cet essai, j’ai pensé aux discours de certains hommes politiques, discours fortement orientés – parce que l’Histoire est écrite, toujours, par les Blancs :

L’Histoire est un hymne aux Blancs écrit par des Blancs. Nous autres, tous les autres, avons été « découverts » par les Blancs, qui détiennent le droit de nous laisser entrer ou non dans l’Histoire.

Un essai remarquable.

L’amour est dans le trek de Lauren Weisberger

Présentation de l’éditeur :

Katie, New-Yorkaise bon teint, désire faire un break avant de  » devenir adulte  » (se marier, trouver un travail…). Sur un coup de tête, elle décide donc de partir au Vietnam, pour un séjour  » routard « . Ses parents et son petit ami avocat ont bien du mal à comprendre ses motivations. Ce voyage sera pourtant l’occasion pour Katie de faire le point sur sa vie…

Mon avis :

Nouvelle gratuite retrouvée au fin fond de ma liseuse. Si, si. Qui dit nouvelle, dit texte court, par conséquent il ne m’a fallu que peu de temps pour découvrir Katie, et surtout Lauren Weisberger, cette autrice que je n’ai jamais lue.
Katie vit en couple avec un avocat – et c’est lui qui a décidé qu’ils habiteraient ensemble, annonçant lui-même à sa colocataire qu’elle devrait se trouver… eh bien, une autre colocataire. Katie est elle-même fille d’avocats et ne voit pas trop de différences entre son père et son petit ami, si ce n’est le journal qu’ils lisent. Or, Katie a décidé de frapper un grand coup : elle part effectuer un trek au Vietnam. C’est peu de dire que personne, sauf sa meilleure amie, ne la comprend dans son entourage. Qu’à cela ne tienne ! Elle part – et se demande si son fiancé s’apercevra ou pas de son absence.
C’est un texte très court, relativement amusant, parce qu’il ne joue pas avec les clichés de « je-suis-une-ew-yorkaise-et-il-m’arrive-plein-de-problème ». Oui, tout se passe relativement bien au Vietnam, pays dans lequel, son père le lui rappelle, il a tout fait pour ne surtout pas aller.
Katie trouvera-t-elle l’amour ? Non, elle trouvera en revanche ce qu’elle veut vraiment, et se prouvera qu’elle est capable de vivre, d’agir seule – enfin.

Des gens comme nous de Leah Hager Cohen

Présentation de l’éditeur :

Walter et Bennie Blumenthal s’apprêtent à célébrer le mariage de leur fille et de sa petite amie. L’heure devrait être à la fête, mais Walter et Bennie ont pris une décision qui pourrait bouleverser leur vie. Pour l’instant, il s’agit d’accueillir les premiers invités.
Cinq jours durant, des liens se (re)noueront, des actes antisémites seront commis, des policiers s’inviteront à la noce, une alliance disparaîtra et des secrets – certains dissimulés depuis des décennies – seront percés à jour.

Merci à Babelio et aux éditions Actes Sud pour ce partenariat.

Mon avis :

Une fois le livre refermé, je ne parviens pas à dire si j’ai aimé ou non ce livre. En fait, si je creuse un peu, je crois que je ne l’ai pas vraiment aimé. Il fut agréable à lire, cependant je n’ai pas accroché à cette histoire, et quand je n’apprécie pas totalement, je me lance toujours dans de grandes explications.
Tout d’abord, l’action se passe pendant cinq jours, mais le lecteur se trouve très souvent embarqué, emmené bien plus loin dans le passé que ces cinq jours. A vrai dire, il se retrouve dans le passé de chacun des personnages, et si cela permet d’en savoir beaucoup sur les différents protagonistes, ce procédé littéraire n’est pas vraiment mon préféré. De même, l’on en apprendra aussi sur le devenir de certains – notamment le mariage de Clem et Diggs, l’avenir professionnel de Tom. Pour faire court, le présent du roman s’enrichit avec les retours en arrière et les anticipations.
En effet, nous sommes à Rundle Junction, dans l’état de New York, et la maison des Blummenthal a vu grandir cinq générations, avant que Walter et Bennie ne songent à vendre. C’est un des secrets qu’il ne faudra pas révéler avant la cérémonie. Cinq générations, plus d’un siècle, des événements douloureux aussi qui sont tellement ancrés dans la mémoire collective que les Blummenthal ne s’interrogent pas sur eux. Ainsi, dix-huit enfants de la commune sont morts en 1927, lors d’un immense incendie : tante Glad, l’arrière-grande-tante nonagénaire de Clem, a porté toute sa vie les cicatrices – physiques et morales. Fait-on vraiment attention aux personnes à côté de qui l’on vit ? Ou, plus largement, parvient-on à vivre avec autrui et non à côté ?
Walter, et surtout Bennie tentent de maintenir la cohésion au cours de ces cinq journées, autour des membres de la tribu qui sont tous venus. Je pense à Lloyd, en particulier, le petit frère, dont les choix de vie, les errances, n’ont pas véritablement convenus à ses soeurs – ou comment s’échapper de la vie que l’on avait souhaité pour vous.
Oui, ce livre suscite aussi beaucoup de questionnement – qu’est-ce qu’appartenir à une communauté ? Que reste-t-il de l’existence d’un homme ? Alors même si je n’ai pas apprécié ce livre, même si je me suis peu attachée aux personnages, à l’exception de Lloyd, Tom et tante Glad, il n’en reste pas moins un grand livre.

Ron-ron, ça tourne ! de Gérard Chevalier

Présentation de l’éditeur :

Rose me fait tourner en bourrique, un comble pour une chatte géniale comme moi ! Rose est le bébé de mes bipèdes, Catherine et Erwan, j’assure sa garde et son éducation.
Aussi quand le commissaire Yvon, notre ami, vient me solliciter pour participer à une enquête sur le décès d’une actrice en plein tournage, c’est l’occasion pour moi de prendre des vacances.
Je découvre l’équipe du film à la sortie de sa garde à vue. Quel monde de tordus ! Enfin… pas tous. Et puis je fais la connaissance d’Hector, un chien Saint-Hubert exceptionnel. Il est le fidèle compagnon un peu décrépi du comte Guerrouane de Pennec, vivant au manoir de Kerpennadec. Un vieux noble avec de la thune ne peut pas être complètement mauvais…

Mon avis :

Chère Catia,

j’espère que tu vas bien et que tu es remise de tes émotions pour ta deuxième enquête. partir loin de chez soi, loin des siens, même en compagnie de proches amis, c’est compliqué. Fort heureusement, tu as pu faire la connaissance d’un ami sincère, Hector, chien de Saint-Hubert de son état que, je te rassure, tu seras amené à retrouver dans une prochaine aventure. Un être aussi sympathique ne pouvait être ton compagnon dans un seul et unique volume.
Il faut dire que le contraste est grand entre le charme désuet des lieux, des châtelains, absolument exquis, et la modernité, voire la crudité de langage de certains techniciens. Si j’ajoute à cela qu’il en est pour ne pas apprécier à sa juste mesure la gente féline, je me dis que ton séjour n’a pas été de tout repos.
Heureusement, tu pouvais compter sur tes amis, sur Juliette, notamment – et les enquêteurs pouvaient compter sur elle aussi.
Rien ne fut simple dans ce milieu cinématographique assez pourri, il faut bien le dire, où il en est pour profiter de tous les avantages de leur position, sans que (presque) personne ne trouve à redire, et c’est bien dommage.
Heureusement (oui, il est des moments heureux) même si ton éditeur t’a imposé un scripteur humain, ils t’ont laissé relativement libre de garder « ton » style, ta griffe, si j’ose dire. Il ne fait pas bon censurer les félins.
Je te quitte sur ces quelques mots, et te souhaite encore beaucoup de belles enquêtes.
Sharon.

Miaou, bordel ! de Gérard Chevalier

édition Palémon – 192 pages

Présentation de l’éditeur :

Catia, minette quimpéroise « surdouée », mène l’enquête en assistant son maître, journaliste d’investigation, dans ses recherches.
Elle maîtrise le langage humain dans ses nuances les plus intimes et emploie parfois des termes fleuris pour juger les comportements des « bipèdes ».

Mon avis :

Ceci est le premier tome des enquêtes de Catia, chat policier presque malgré elle – il faut bien aider les forces de police ! Surtout, il faut bien faire bénéficier de ses dons extraordinaires son maître, Erwann, qui a dû quitter la police à la suite d’un scandale dont il n’était pas responsable – ou comment se débarrasser de quelqu’un qui se met à fouiller là où il ne fallait pas. Devenu journaliste, il est cependant rester en lien avec Yvon, et ils ont bien l’intention tous les deux de faire tomber ceux qui continuent à traficoter en toute impunité. Vaste programme, surtout que, du côté « policier pas très honnête », on n’a pas l’intention de se laisser faire. Au contraire, tout est mis en oeuvre pour découvrir ce qu’Erwann a pu trouver.

Catia a des facultés que d’autres n’ont pas : elle comprend le langage humain (note : beaucoup de chats aussi, sauf qu’ils se gardent bien de nous le faire savoir) et sait même se servir d’un ordinateur pour communiquer. Reste à le faire comprendre à « son » humain, sans que celui-ci ne tourne de l’oeil, ce qui n’est pas le plus facile dans cette intrigue. Je ne passerai pas sous silence les libertés qu’elle prend avec la langue française, ni les tourments qu’a subi l’auteur chargé de mettre en forme les écrits de Catia, j’ai nommé Gérard Chevalier – l’entente entre eux deux ne semble pas vraiment au beau fixe !

Qu’à cela ne tienne ! Alors que la vie sentimentale d’Erwan et celle d’Yvon se révèlent mouvementées (ils finiront cependant par retomber sur leurs pattes), l’enquête continue, ce qui permettra à Catia de s’aventurer en dehors de son cocon, et de rencontrer des humains, certains très sympathiques, d’autres pas du tout, et même un compère félin très mal en point.

Miaou, bordel ! ou le cri de guerre de Catia, est un roman policier drôle et sympathique.

Trouille Académie – La Boîte maléfique par Bertrand Puard

édition Poulpe fictions – 168 pages.

Présentation de l’éditeur :

Dans une vieille malle du grenier, Emma trouve une drôle de poupée dans un coffret ouvragé. Que fait-elle là ? Et surtout, pourquoi lui ressemble-t-elle tant ? Intrigué, la jeune fille la rapporte dans sa chambre. Mais bientôt une voix sinistre s’insinue dans ses pensées et une ombre menaçante pèse sur ses proches… Convaincue d’avoir affaire à un jouet maléfique, Emma saura-t-elle se libérer de son emprise ?

Merci à Netgalley et aux éditions Poulpe fictions pour ce partenariat.

Mon avis :

Je dois dire que c’est la première fois que je ne suis pas totalement séduite par un livre édité par Poulpe fictions – et pourtant, j’en ai lu, des livres publiés par cette maison d’édition.
Pourquoi donc ? Tout avait pourtant bien commencé. Ce livre d’horreur pour enfants (non, je n’ai pas inventé cette catégorie) revisitait pourtant des thèmes classiques : la poupée maléfique, la fête foraine hantée (ou pas). Il était à la fois ancré dans le réel et intemporel : Emma est la descendante de riches industriels, qui, grâce à leur usine, font vivre toute la commune, et ont ainsi le droit de faire ce qu’ils veulent ou presque. Note perso : et aussi le droit, pour les habitants, de ne pas envisager une autre orientation professionnelle que travailler dans cette usine. Aussi, Emma ne fréquente pas le collège de la ville – pas question de se mêler au petit peuple (oui, encore une tranche de réel), ses amies non plus – vive les cours à domicile, qui, en plus, permettent à Emma de prendre des cours de golf, sport dans lequel son père entend bien la voir exceller. J’ajoute que presque tout le monde se montre très obséquieux avec ce bon monsieur Salpêtre, et que son personnage m’a rappelé celui de Guillaume Daubray-Lacaze, joué par Louis de Funès dans la Zizanie, ce patron à qui personne ne peut rien refuser.
Puis, j’ai un peu décroché, parce que, justement, je me sentais un peu hors de notre temps., Le fantastique a fait irruption aussi, entraînant quelques catastrophes, dont les blessures du boulanger ou du professeur de golf, deux personnages qui n’ont rien fait de mal. Et c’est justement ce qui me dérange, c’est que toutes les personnes blessées à cause de la magie mise en oeuvre dans l’histoire n’ont rien à voir avec le mal initial qui a été fait, qui était grand, et qui a encore de lourdes conséquences au moment du récit. Emma, après avoir subi bien des épreuves (et remercions au passage papa qui l’a bien préparée sans le lui dire explicitement), posera d’ailleurs directement la question : « Pourquoi m’avoir jeté un sort avec cette poupée, à moi qui ne vous ai rien fait ? » J’ai toujours du mal avec cette thématique de l’innocent sur lequel la personne, qui a des reproches légitimes à adresser à son père, se venge pour faire souffrir le responsable de ses malheurs. Quant à la réponse « tu sortiras grandie, tu verras« , c’est tout de même un peu facile. Oui, les épreuves font grandir, c’est ce que les adultes répètent aux enfants depuis des générations. Certes. Cependant, la vie est assez chargée d’épreuves sans qu’on en rajoute.
Reste, heureusement, Claude Dieuleveut (je ne peux pas m’empêcher de penser à Philippe quand j’entends ce nom de famille), professeur de la Trouille Académie, et les précieux adjuvants qu’il envoie pour soutenir Emma, j’ai nommé Mina et Mariana.

Trouille académie : l’école de toutes les peurs de Bertrand Puard

Présentation de l’éditeur :

Il se passe des choses étranges au collège de Victor et Leïla : des voix dans les murs, des créatures terrifiantes qui rôdent dans les couloirs une fois la nuit tombée… Et ce n’est pas tout : un garçon que personne ne connaît est apparu sur leur photo de classe ! Décidés à découvrir ce qui se trame, les deux amis vont devoir affronter leurs plus grandes peurs !

Merci à Poulpe fictions (j’adore le poulpe) et à Netgalley pour ce partenariat.

Mon avis :

Je vais me faire une joie de partager ce titre avec mes élèves. Si, si. Premier tome d’une série, la trouille académie ouvre ses portes, et si les enseignants sont aussi perchés que ceux d’autres académies très célèbres (et que mes élèves actuels sont trop jeunes pour avoir connu), ils ont un objectif plus louable : Il ne faut jamais accepter d’avoir peur et toujours se rebeller ! Contre toutes les situations injustes, et surtout contre ceux qui nous les font subir….
Oui, il ne s’agit pas ici de lister des phobies, mais de prendre le taureau par les cornes, et se rebeller. Note perso : nous vivons dans une société qui a peur, nous vivons avec des gens qui veulent nous terroriser et nous forcer à vivre autrement. IL est bon de commencer tôt à parler de surmonter ses peurs que je qualifierai de « sociale ». Peurs et lutte contre cette peur qui évolue en même temps que notre société.
En effet, comment en est-on arrivé là ? Nous commencions par une histoire des plus ordinaires : une rentrée en sixième, une photo de classe, et un élève mystérieux qui est en photo dessus. Comment est-il arrivé là ? Et surtout, comment a-t-il fait disparaître l’élève dont il a pris la place ? Certes, cet élève est fort peu sympathique, lui qui a une forte tendance à s’en prendre à son souffre douleur attitré, ce n’est pas une raison pour le faire disparaître de la photo – ne le faire disparaître tout court, ce qui ne manque pas de survenir.
Victor et Leïla vont donc mener l’enquête. Ils sont tous les deux issus d’une famille décomposée : Leïla est élevée par un père seul, Victor aussi, sa mère ayant fondé une nouvelle famille « ailleurs ». N’allez pas croire cependant que leurs pères soient laxistes : Odin, le père de Victor, impose des règles pleines de bons sens (un cas rare pour un magicien professionnel) et entend bien faire respecter ses règles ! Comme dans les bons vieux romans pour la jeunesse, Victor et Leïla doivent donc trouver des parades quand ils veulent enquêter en dehors des heures ouvrées.
Ce qu’ils découvrent ? Il faut d’abord se plonger dans le passé, une époque où, quand on était différent, pas assez costaud, pas assez dans les normes, on était harcelé, avec la bénédiction de la plupart des professeurs, et même de ses parents. Oui, c’est possible, et si j’ose croire que les temps ont changé, j’espère fortement avoir raison. Victor et Leïla découvriront bien d’autres choses, qui permettront à cette histoire – à ces histoires – de se terminer, pas forcément de la façon dont on aurait pu le penser. Malgré le passé, il est important de penser que l’on peut changer, et surtout, faire changer les comportements d’autrui.

La fille qui avait de la neige dans les cheveux de Ninni Schulman

Présentation de l’éditeur :

De retour dans sa ville natale après son divorce, Madga décroche un poste au journal local. Entre fermetures d’écoles et expositions canines, il ne se passe pas grand-chose, à Hagfors. Quand Hedda, 16 ans, est portée disparue, Magda s’empare de l’affaire.

Mon avis :

La fille qui avait de la neige dans les cheveux. Un livre qui était dans ma PAL depuis à peu près quatre ans, voir plus. Un livre que j’avais déjà tenté de lire, puis reposer, avant de me dire, que là, il faudrait peut-être que je l’en sorte enfin, de ma PAL. Je l’avais acheté à cause de ce titre énigmatique, je l’avais acheté aussi parce que je lis beaucoup de romans policiers suédois, et que cela me fait une autrice de plus découverte.
Ce qui fait l’originalité première de ce polar est que l’héroïne, Magdalena dite Magda ou Maggie (pour les vraiment très intimes) est journaliste. Après son divorce, elle a pris son fils sous le bras et est retournée dans sa ville natale. Elle travaille donc pour le journal local, et tant pis si les articles qu’elle rédige ne sont pas vraiment sur des sujets très folichons – une exposition de peinture, par exemple. Ayant très bien su gérer son argent, elle a pu s’acheter une maison – et tant pis si cela ne plaît pas à tout le monde. Son ex-mari, déjà remarié, futur père d’un second enfant, n’a pas très bien pris l’éloignement de son ex-femme, lui qui aurait voulu s’impliquer davantage dans la vie de leur fils, qui aurait même voulu la garde alternée – ce qui est impossible vu la distance. Il accueille néanmoins Nils un week-end sur deux, Nils ayant fait le trajet de quatre heures en bus. Nils a été adopté, on le sait brièvement au début du livre. A aucun moment Magda ne voit Nils autrement que comme son fils – un net progrès, par rapport à des ouvrages où le mot « adoptif » est toujours mis. Pour dire quoi ? Non, si quelqu’un est bien incapable de voir les liens entre Magda et son fils, c’est bien la personne qui la menacera et traitera Nils de « chinetoque ».
Oui, être journaliste, c’est risqué, même si la police ne démérite pas dans cet ouvrage. Elle est simplement débordée, entre les vols, dont on parle peu mais sur lesquels il faut bien enquêter, la disparition d’une jeune fille de seize ans et le meurtre d’une autre toute jeune fille, retrouvée nue dans une cave. Qui est-elle ? Et qu’est devenue Hedda ?
La famille, ou plutôt les familles sont au coeur de ce roman, ainsi que l’égalité homme/femme. Christian, commissaire adjoint, et ami d’enfance de Madgalena, est célibataire ; il admet lui même rêver sa vie sentimentale plutôt que de la vivre. Ses parents ? Sa mère voit à quel point la vie de sa fille Tina et de son gendre est difficile, entre travail et enfants. Elle s’interroge aussi sur ce « besoin » d’égalité, elle qui pense (encore) que certaines tâches sont réservées aux femmes, et d’autres aux hommes. Petra, policière elle aussi, vit un partage des tâches presque théorique : son mari, depuis le début de cette enquête qui les nerfs de Petra à rude épreuve, est celui qui accomplit le plus de tâches ménagères, au point que c’est lui qui craque. De plus, leur fille Nellie se comporte d’étrange façon, ce qui est trop pour Petra. Quant elle saura pourquoi, eh bien, c’est elle qui sera soulagée, et c’est son mari qui aura plus de mal à l’être. Il est facile d’être ouvert d’esprit tant que l’on n’est pas concerné par le sujet.
S’il en est d’autres qui ne trouveront jamais l’apaisement, ce sont les parents d’Hedda. Si son père craignait au départ que l’on s’aperçoive qu’ils ne formaient pas la famille modèle qu’ils paraissaient être, il doit surtout se rendre compte qu’il ne savait rien de sa fille, qu’il ne s’était aperçu de rien – et que celle-ci en avait souffert.
Combien de famille semble seulement heureuse ? Petra, Madga, le diront : connaissons-nous vraiment ceux qui nous entourent ? Soupçonnons-nous véritablement les horreurs qui peuvent être commises tout prêt de nous ? Et au nom de quoi ? Magda se met en danger pour son métier, mais elle veille à protéger son fils de son mieux : prévenir la police est toujours LA bonne solution.
La fille qui avait de la neige dans les cheveux, un polar plus prenant que je ne l’aurai cru.

Un petit quelque chose en plus de Sandy Hall

Présentation de l’éditeur :

Tout le monde sait que le courant passe entre Lea, une timide maladive, et Gabe, un garçon mystérieux. Quatorze personnes racontent l’histoire, comme le chauffeur du bus, la serveuse du restaurant où Gabe et Lea mangent, même un écureuil dans le parc.

Mon avis :

Ce livre, d’après Livraddict, existe avec deux couvertures, une bleue, une rose, cela « tombe » bien, entre deux lectures très noires : j’ai la rose. J’avais gagné ce livre lors d’un concours organisé par Mutinelle.

Un petit quelque chose en plus est un roman heureux, mais pas un roman niais, ce qui est assez rare, finalement. Il est aussi un roman choral, avec une pincée de fantastique aussi. Tous savent mieux que Léa et Gabe qu’ils sont amoureux, mais ils sont aussi trop timides, trop pudiques, trop maladroit aussi pour se le dire. Pourquoi fantastique ? Ah oui : même le banc et l’écureuil ont la parole, l’un, qui se plaint du manque d’attention de ceux qui s’assoient sur lui, l’autre, parce qu’il apprécie d’avoir des personnes qui lui parlent (si, si : encore un point commun entre Gabe et Léa).

Ce sont des jeunes gens normaux, ils suivent des études qui leur conviennent plus ou moins, sans sécher les cours. Ils ont des amies, des personnes qu’ils apprécient moins – la vie, enfin. Une vie, et des accidents de la vie dont ils n’ont pas forcément envie de parler – parce que cela ne les définit pas nécessairement. Accepter ce que l’on est devenu, accepter ce que l’on a perdu n’est pas toujours facile.

J’ai l’air sombre en parlant ainsi. Il faut se rendre compte que, si le roman est rempli de personnes bienveillantes, ou de personnes légèrement agacées par ces deux amoureux inconscients d’être amoureux l’un de l’autre, ce sont surtout des personnes qui n’ont pas souvent l’occasion de voir des personnes heureuses ou même d’avoir le temps de regarder autour de soir : les cadences de travail sont soutenues, pour ceux qui sont obligés d’accomplir des métiers peu gratifiants.

Oui, Gabe et Léa prennent leur temps, ce qui ne les empêchent pas de s’amuser, ce qui, dans ce roman, ne signifie pas se jeter dans les bras du premier venu et/ou d’enchaîner les conquêtes : chercher à tout prix à être deux n’est pas une fin en soi. Puis, Léa comme Gabe peut compter sur ses amis, surtout Danny, meilleur ami et gay. J’ai failli dire « l’inévitable meilleur ami gay », comme on le voit très souvent dans les comédies américaines. Oui, mais la professeure d’écriture créative est mariée à une femme, et personne ne s’en soucie. Ouf. Je regrette d’ailleurs, qu’en fac de lettres il n’existe pas (à ma connaissance du moins) des cours d’écriture créative. Décortiquer les textes des autres, c’est bien. Ecrire les siens, c’est tout de même mieux.

L’Amérique n’est pas la France, et en France, on oublie trop souvent à quel point les études peuvent coûter cher de ce côté de l’Atlantique. On oublie aussi que la sécurité sociale n’existe pas, et que les assurances ne font pas tout : l’accident de Gabe a contraint ses parents à prendre une seconde hypothèque sur leur maison.

Un petit quelque chose en plus – un roman heureux mais pas tout rose.