Archive | novembre 2015

The anomalies de Joey Goebel

anomaliesPrésentation de l’éditeur :

Dans une petite ville paumée du Kentucky, une improbable complicité se noue entre cinq excentriques. Opal, octogénaire lubrique en bottes de cow-boy. De soixante-douze ans sa cadette, Ember, bassiste surdouée aux pulsions destructrices. La satanique Aurora, bombe frigide qui ne prend son pied qu’à la batterie. Ray, Irakien efféminé à la recherche du soldat qu’il a blessé pendant la guerre du Golfe. Enfin, le charismatique Luster, poète afro-américain,éternel incompris qui gagne sa vie comme commissaire de piste dans un cynodrome. Tous ont une passion, la musique, et un rêve conquérir le monde avec leur groupe totalement déjanté, The Anomalies.

Mon avis :

Petite interro express : que savez-vous du Kentucky ? Peu de choses, sans doute, mis à part, peut-être, l’existence du comté de Bourbon, qui a donné son nom à une boisson à consommer avec beaucoup de modération. L’action de ce roman se passe donc dans le Kentucky, état, donc où il ne se passe rien, presque rien, rien qui soit digne d’être noté.

Les personnages de ce roman, créateurs d’un groupe de rock,  ne sont pas en reste, puisqu’ils ont tous un point commun : ne surtout pas être dans la norme. Prenez Luster, le poète, il est le seul de sa famille (dont la police ne se fatigue guère à distinguer les membres) à ne pas verser dans la petite délinquance. Le lire est un plaisir – heureusement qu’on peut le lire, d’ailleurs, puisque peu de monde l’écoute. Les deux membres les plus proches de ce quintette ont le plus grand écart d’âge : Ember, toute jeune pré-adolescente incomprise par ses parents et Opal, qui a des points communs certains avec Mémé Cornemuse, sans être toutefois aussi déjantée qu’elle.

Ce n’est pas le cas de cette histoire, je vous rassure (ou vous effraie) tout de suite. Si vous additionnez ces cinq personnalités, que vous mélangez bien, vous n’obtiendrez pas une histoire lisse. Leurs cinq points de vue sont complémentaires et même eux ne se comprennent pas tout à fait. Autant dire que, pour la population locale, digne représentante de l’Amérique profonde, ce n’est pas gagné.

The anomalies est un roman contraire au rêve américain : les anomalies sont priées de très vite rentrer dans les rangs, ou bien un moyen sera très vite trouvé de les dissimuler.

50

Un automne à River Falls d’Alexis Aubenque

Présentation de l’éditeur :

En ce début d’automne, deux assassinats commis coup sur coup viennent troubler la tranquillité toute relative de River Falls, déjà ébranlée par un sordide fait divers quelques mois plus tôt. Le premier crime fait grand bruit : Robert Gordon, un avocat brillant, philanthrope à ses heures, est retrouvé électrocuté dans le Jacuzzi de sa luxueuse demeure, sur les hauteurs de la ville. Tout laisse penser que le meurtrier a voulu faire croire à un suicide, mais le subterfuge est grossier. Le même jour, le corps d’un SDF roué de coups et jeté dans la rivière arrive à la morgue, sans susciter beaucoup d’émoi. A priori, aucun lien entre les deux affaires. Le shérif Mike Logan, épaulé par sa compagne, la célèbre profileuse Jessica Hurley, va devoir élucider les meurtres. Commence alors une plongée inquiétante dans les noirceurs de l’âme humaine qui révélera des secrets dévastateurs.

50

Mon avis :

Ceci est le troisième roman que je lis d’Alexis Aubenque, mais c’est la première fois que je me rends à River Falls en sa compagnie. La communauté a été secoué par la précédente affaire (7 jours à River Falls – que je n’ai pas lu) et Jessica Hurley, la compagne du shérif, est restée à ses côtés pour l’épauler. Elle est officiellement en congé pour quelques mois, mais quand cette double affaire survient, elle ne peut s’empêcher de participer à l’enquête, quitte à payer de sa personne. Ce duo me rappelle lui aussi Emmet/Anna, les héros de Kirk Mitchell, si ce n’est que Jessica est une forte femme, décidée, que peu de choses, et encore mois de personnes, parviennent à faire reculer.

S’il est un sujet que montre ce livre, c’est à quel point l’Amérique est dure avec ceux qui sont différents. Et ce mot recouvre bien des choses. Ceux qui sont trop minces, trop gros, trop pauvres, trop handicapés, tous ceux que l’on ne veut pas voir ou que l’on se plaît à humilier quand on les croise – quand on ne souhaite pas les voir disparaître. Aussi, qui s’inquiéterait du meurtre d’un SDF, d’un John Doe ? A part le shériff et sa compagne, presque personne.

De l’autre côté, nous avons les riches, les très riches, ceux qui peuvent tout se permettre – et que Robert Gordon soit un bienfaiteur de la communauté ne change rien au fait que ses associés se passeraient bien de voir certaines de ses affaires exposées au grand jour. D’ailleurs, j’ai eu l’impression que, de ce côté de l’enquête, on passait plus de temps à mettre des bâtons dans les roues des enquêteurs qu’à leur permettre de trouver l’identité du coupable. Robert Gordon, sa vie, son oeuvre, passe très rapidement à l’arrière-plan du récit.

Un automne à River Falls est à mes yeux le roman du double. Double meurtre. Un couple d’enquêteur. Deux frères. Deux soeurs. Deux fraternités. Il n’est pas question de part d’ombre et de lumière, mais d’exploration des facettes du genre humain, complexes. Les enquêteurs ne sont pas des êtres sujets à caution. Ils peuvent commettre des erreurs, avoir parfois des jugements hâtifs, ne pas prendre suffisamment de précautions. Il ne s’agit pas là de nourrir le suspens, ou de faire traîner l’intrigue en longueur. Non, il s’agit de montrer, de construire des personnages faillibles – donc humains. Et le roman n’en est que plus prenant. Lire Un automne à River falls, c’est avoir toujours envie d’entamer un chapitre de plus et de regretter de ne pas avoir le temps de le faire. Je ne puis que vous conseiller de vous rendre vous aussi à River Falls.

 

J’ai lu ce livre dans le cadre du challenge

Ma partenaire de challenge est Stellade dont voici le blog. Elle avait choisi pour l’occasion ce titre, L’atelier des miracles de Valérie Tong-Cuong et Si je reste de Gayle Forman.

Pour ma part, je lui avais proposé Debout les morts de Fred Vargas, la Quête d’Ewillan, tome 1 de Pierre Bottero, et Un calice de sang de Peter Treymaine.

Folie furieuse de Lee Child

édition Fleuve noir – 382 pages.

Présentation de l’éditeur :

Un lieu public d’une petite ville de l’Indiana.
Un homme armé est retranché dans un parking. Puis soudain, c’est la panique. Des coups de feu retentissent, tuant cinq personnes. Mais dans sa précipitation, le sniper laisse des traces qui permettent à la police de l’appréhender rapidement. L’interrogatoire du tireur fou, du nom de James Barr, ne donne rien, et les propos qu’il tient à son avocat restent énigmatiques :  » Faites venir Jack Reacher « . Aux yeux de tous, il constitue le coupable idéal.
Seule sa sœur, Rosemary, est persuadée de son innocence.

Mon avis :

Je suis allé en Indiana mais c’était fermé.

Belle entrée en la matière de la part de Jack Reacher. Pour une fois, tout allait bien pour lui. Absolument tout. Il continuait son périple à travers les Etats-Unis, sans anicroche particulière. Seulement, il y eut cette fusillade dans l’Indiana, provoquée par un homme que Jack ne connaissait que trop bien, qu’il n’avait pas oublié – comme si Jack Reacher oubliait quiconque avait croisé sa route professionnelle. Il se rend en Indiana, et enfonce davantage James Barr, le tireur fou.

Présomption d’innocence ? A croire que cette notion n’existe pas dans la loi américaine. Bien que l’avocate de Barr espérait mieux, bien que la soeur de Barr soit convaincue de l’innocence de son frère (pourquoi a-t-elle déménagé quelques mois plus tôt si son frère était si charmant qu’elle le dit ? ), Jack Reacher s’apprête à reprendre sa route.

S’apprêtait, plutôt, parce qu’un grain de sable, puis deux se glissent dans la belle machinerie. Reacher ne peut pas s’empêcher… de réfléchir, ce sont des choses qui arrivent, de poser des hypothèses et de constater que tout colle trop bien. Surtout quand lui-même se trouve poussé vers la sortie plus vite qu’il ne l’aurait prévu (même fermé, l’Indiana contient tout de même quelques bars) par de gentils habitants du cru. Reacher sachant additionné deux plus plus, il comprend bien que, si tout allait si bien, on ne l’ennuierait pas, lui, parfait témoin de l’accusation. Du coup, il se plonge bien plus avant dans les faits, creusant toutes les anomalies qu’il a cru relever.

L’Indiana, c’est l’Amérique profonde, un état méconnu où les fusillades sont monnaie courante et où tous les moyens pour s’enrichir sont bons.  C’est aussi l’état qui a vu naître les Jackson Five. Comme souvent dans les romans de Lee Child, la famille joue un rôle très important – et beaucoup de militaires peuvent se targuer d’avoir une femme dans leur vie qui prend soin d’eux, veille sur eux en toutes circonstances. Non, je ne vous parle pas de leur femme, je vous parle de leurs soeurs, qui les soignent comme elle le faisait peut-être, enfant, quand môssieur s’était blessé après une bonne bagarre entre copains.

Folie furieuse, qui fut adapté au cinéma avec Tom Cruise et Rosamund Pike dans le rôle de la jeune et jolie avocate en confllit avec son père, est à lire pour tous les fans de Lee Child et pour ceux qui veulent découvrir l’Indiana.

image50

Mary d’Emily Burnett

tous les livres sur Babelio.com

Présentation de l’éditeur :

De l’enfance sauvage aux atermoiements amoureux d’une femme dans le New York d’après-guerre, Mary sonde les thèmes de l’adultère, de la maternité et de la filiation. Un premier roman à la forme soignée et maîtrisée qui emprunte à la Rebecca de Daphné du Maurier et aux romans de Laura Kasischke.

Mon avis :

Autant vous le dire tout de suite, je n’ai pas compris ce livre. Mais alors pas du tout. Quelle est la frontière entre la folie et la réalité ? Y en a-t-il vraiment une d’ailleurs ? Y a-t-il réellement un lien entre les deux héroïnes de ce roman ? Beaucoup de questions, et peu de réponses. le style est agréable, ce n’est cependant pas suffisant pour trouver un réel plaisir de lecture et prolonger le questionnement né autour de ce livre.

index

Mort ou vif de Patricia Wentworth

tous les livres sur Babelio.com

Présentation de l’éditeur :

Lorsque la police annonce à Meg O’Hara la mort de son mari, celle-ci ne peut s’empêcher de ressentir un immense soulagement. Tyrannique et manipulateur, Robin O’Hara aurait été assassiné alors qu’il enquêtait sur la bande du Vautour pour le compte des services secrets anglais. Libre mais dans une situation financière précaire, Meg se fait à sa nouvelle vie. Mais lorsqu’elle reçoit des lettres signées par le mort, la peur reprend vite le pas sur ses certitudes. Bill Coverdale, un ami de longue date, secrètement amoureux d’elle, est le seul à la croire quand elle affirme que son mari est encore en vie.

Mon avis :

Est-il possible de créer une héroïne plus gourde que Meg ? Oui, bien sûr. Cependant, alors qu’il est fréquent de rappeler que Patricia Wentworth a crée Miss Silver avant qu’Agatha Christie n’invente Miss Marple, il devrait également être rappelée qu’Agatha a inventé une catégorie d’héroïnes indépendantes, conquérantes même, aptes à s’en sortir toutes seules, voire même à donner un coup de main à l’enquête.

Rien de tel pour Meg O’Hara, pauvre petit oiseau sur la branche. Elle n’a pas fait d’études, son oncle et tueur ne lui en a pas fait faire – elle n’aurait pas aimé, de toute façon, et se montre ravie qu’il ne l’ait pas forcé. Elle a trouvé un travail, qu’elle n’a pu conserver. Elle ne mange pas à sa faim et du coup maigrit, maigrit. Son salut ? Il ne peut venir que d’un homme, Robin, qui l’aime en secret depuis des années, l’a même demandé en mariage quelques années plus tôt. Comme elle est très brillante, elle a refusé, voulant épouser un homme dont elle ne sut rien, pour pouvoir le découvrir lors du mariage – concept intéressant dont elle paie les pots cassés depuis deux ans.

Robin, son mari, est décrit de la façon la plus noire. Il faut dire qu’il ne l’a épousée que pour son argent, et qu’il a changé du tout au tout quand il a compris qu’elle n’obtiendrait pas de pension de la part de son oncle. Note : j’ai du mal à concevoir qu’un ménage pense, au lieu de faire sa vie, à être immédiatement entretenu. Du coup, il s’est montré particulièrement pervers avec elle – de nos jours, on parlerait de harcèlement moral – et ce harcèlement semble se poursuivre post-mortem.

Je dis bien « semble » parce que le chef de Robin au service secret a la certitude qu’il est mort – malheureusement pour le service. Et ce n’est pas parce que ce Garrett a des goûts plus que douteux en matière vestimentaire et qu’il est d’une misogynie totale que je ne lui accorde pas ma confiance. Meg est persuadée du contraire, et Bill, son amoureux transi qui a tout de même les pieds sur terre, émet des doutes, surtout vu les incidents dont il est témoin. Que faire ? Rendre visite à l’oncle de Meg !

L’oncle célibataire, monomaniaque, qui a élevé une pauvre orpheline est un personnage fréquent dans l’oeuvre de Patricia Wenthworth, de même que le fait de se retrouver sur une île déserte, coupée du monde – non, nous ne sommes dans Les dix petits nègres. Le narrateur pourra me répéter une fois, deux fois, dix fois, qu’il est un homme remarquable qui se consacre tout entier à son oeuvre et du coup, est totalement déconnecté de ce qui se passe à côté de lui, je ne peux m’empêcher de le voir comme un fieffé égoïste, avare de surcroît.

Et l’intrigue ? Oui, il y en a une, nous sommes dans un roman d’espionnage, après tout, mais elle me semble repousser à l’arrière plan, après la romance entre Meg et Bill, après les quelques recherches pour découvrir ce qu’est devenu Robin. Puis, l’espion est un être tellement insaisissable et brillant…

Mort ou vif n’est pas le roman le plus réussi de Patricia Wentworth, il est à réserver à ceux qui aiment les romances plus que les intrigues policières.

imageThrillerPolar-PatiVore3

 

Au revoir et bon vent (et la pluie d’automne) de Tormod Haugen

Présentation de l’éditeur :

Parce qu’ils ont juré de s’aimer toute la vie, Grégoire offre à Gloria une bague avec une pierre bleue et Gloria donne à Grégoire une bague avec une pierre rouge. Mais un jour, Gloria trouve abandonnée dans l’herbe du parc la bague de Grégoire. Grégoire l’a-t-il perdue ? Grégoire l’a-t-il jetée ? Grégoire aime-t-il encore Gloria ? Et pourquoi est-il en retard à leur rendez-vous ? Gloria ne trouve pas de réponse à ses questions.

Mon avis :

Grégoire et Gloria vivent une tendre histoire d’amour, comme seuls les enfants peuvent en vivre. Les obstacles ? le quotidien, déjà, les séparations nécessaires, qui ne sont pas, comme pour les adultes, la semaine et le travail, mais bien le week-end en famille. Ils sont jeunes, et pourtant, ils se posent déjà des questions sur leur histoire, sur les mots qu’ils se disent; les présents qu’ils échangent. Sur cette sensation de manque qu’ils ressentent quand ils sont séparés. L’écriture, très poétique, participe grandement au plaisir de lecture. Un livre à conseiller !

challenge jeunessemini_501337challengelpf2bannire

Triburbia de Karl Taro Greenfeld

Quatrième de couverture:

Quartier de Tribeca, Manhattan. Ici, il faut avoir beaucoup d’argent, sans passer pour un banquier. Affecter un job artistique et un mariage d’amour. Se surprotéger mais feindre l’insouciance bohême. Comme ces quelques pères de famille ? journaliste, cuisinier, marionnettiste, photographe ? qui se retrouvent chaque matin au café, après avoir déposé leurs enfants à l’école chic du coin.Au fil de l’année scolaire, ils dévoilent leurs secrets et leurs passions, leurs mariages et leurs adultères, leurs espoirs et leurs illusions perdues.Car ici comme ailleurs, on s’ennuie, on s’aveugle, on se trompe?

Mon avis :

Merci au forum Partage-Lecture et aux éditions Pocket pour ce partenariat.

En lisant le quatrième de couverture, je m’attendais à lire un Desperate Housewife au masculin. Quel père peut en effet prendre le petit déjeuner avec ses amis tous les matins ? En cela, j’ai vite déchanté puisque nous ne voyons que rarement les pères ensemble. Bien au contraire, chaque chapitre est consacré à un personnage, pas toujours un personnage masculin d’ailleurs, puisque la femme et la fille du premier narrateur ont droit elles aussi à leur chapitre. Non, s’il me fallait vraiment chercher un parallèle, ce serait avec Arlington Park de Rachel Cusk, qui présente la même technique narrative – et les mêmes défauts. J’aurai aimé pouvoir passer plus de temps avec certains personnages, peut-être cela m’aurait-il permis de m’attacher à eux. Je dis bien « peut-être » parce que rares sont les personnages à être attachants. Le photographe, quand il se remémore son enfance. Les jumelles, Anouk et Amélie, sous l’oeil aimant de leur mère. Cela fait peu.

Cela fait peu de noms, aussi, puisque les personnages sont définis avant tout par leur adresse et par leur profession – au point qu’ils pourraient presque paraître interchangeables. Ils se considèrent comme des artistes, ils n’en sont pas, non qu’ils ne vivent de leur travail, mais parce que, justement, ils sont avant tout des commerçants, ayant su parfaitement mener leur barque et remplir leur compte en banque, que des artistes. De la rock star qu’ils ne sont pas (aucun véritable musicien, d’ailleurs), ils n’ont conservé que le sexe et la drogue, qu’ils consomment (leur femme également) sans culpabilité ni arrière-pensée.

Père ? Oui, parfois, dans le sens où ils véhiculent leur progéniture à l’école ou à la maison. Et encore. De là à dire qu’ils prennent réellement soin de leur enfant, s’inquiètent de leur bien être, il y a un pas (de géant) que certains ne franchissent pas, par respect pour les conventions et pour pouvoir conserver leur petit confort. Certains enfants ont d’ailleurs bien compris comment, déjà, se comporter comme des tyrans de cour de récréation.

Peu à peu, des liens se tissent entre les différents protagonistes, surtout dans la seconde moitié du roman, des personnages de second plan se retrouvent soudain en pleine lumière, éclairant au passage certains faits, sans provoquer, encore une fois, un attachement, une empathie pour ses pauvres petits artistes ratés riches malgré tout.

Une nuit à Reykjavik de Brita Svit

9782070134649Présentation de l’éditeur :

Lisbeth Sorel est cadre supérieur pour une grande compagnie aérienne. A Buenos Aires, elle rencontre Eduardo Ros, danseur de tango et gigolo. Leur rencontre les amène à se dévoiler et à remettre en question leur vision de la vie.

Mon avis :

Après la lecture de ce livre, je crois que je peux encore une fois revendiquer mon insensibilité. Je n’ai pas été touchée, encore moins émue par l’héroïne, rien.

L’une des raisons est simple : le maniérisme de l’écriture. J’ai eu beaucoup de mal à supporter les descriptions. D’abord, la description que Lisbeth fait de son propre corps – forcément parfait – puis de ses vêtements, ou encore de ses différents partenaires. J’ai eu l’impression que chaque élément était censé composer non une partie du portrait physique, mais du portrait psychologique des personnages. Plus facile, sans doute, que de permettre aux lecteurs de connaître les personnages par leurs actes. J’ajoute que j’en ai aussi eu assez très vite que Lisbeth rappelle qu’elle a « les cuisses nues ». Oui, tu n’as pas mis de collants, ni de bas, et alors ? Quelle audace quand l’on se trouve dans une chambre d’hôtel. De même, son insistance à juger les hommes sur leur bouche et la manière dont ils enfournent la nourriture (bâillements). Si cela l’amuse, moi pas vraiment.

Il faut dire que Lisbeth est riche. Célibataire, ayant deux amants, elle peut aller en Argentine quand elle veut suivre des cours de tango et proposer à son futur amant de passer une nuit avec lui en Islande pour 5 000 €. Elle et sa soeur ont perdu leurs parents très jeunes, elle a dû s’occuper de sa soeur, gérer les crises d’angoisse et les troubles alimentaires de cette dernière. Ainsi passa la vie, jusqu’à ce que sa soeur découvre qu’elle est atteinte d’un cancer. Et je n’ai toujours pas ressenti d’émotion, sans doute aussi à cause des techniques narratives employées. Le récit lui-même dure une nuit (et 167 pages) au cours de laquelle seuls des faits très banals sont racontés tandis que le passé de Lisbeth et Lucie est inséré dans cette trame, au cours de très brefs retours en arrière (quatre à six pages à chaque fois). Le désordre apparent provient du fait que c’est Lisbeth qui choisit de se souvenir – ou pas. Cette manière de tenir le lecteur en haleine a plutôt échoué avec moi. Et si la douleur de Lisbeth est bien là, j’ai l’impression que ni elle ni sa soeur n’ont réellement vécu, plutôt qu’elles ont regardé la vie passer.

Je suis certaine que l’auteur a ses fans… je n’en fais pas partie, mais j’essaierai de lire un autre de ses livres.

 

Les plumes – 21 novembre 2015

Voici ma participation aux plumes d’Asphodèle. Les mots étaient : belle, gardien, lapin, destin, envolée, fermer, souffle, partage, quitter, s’abstraire, voyage, cavale, réchapper, chose, respirer, poète, nid, rêve, vie, doux, fugue, oiseau, imaginer, balles, poudre,  bercé.

  • Cela m’a échappé.

  • Oui, nous nous en sommes aperçus !

Tempête dans quatre cerveaux, ou plutôt tempête pour une série dans quatre cerveaux. Le projet précédent étant tombé à l’eau, au sens strict du terme (les enquêtes dans une école de pilotage se déroulaient désormais dans une école de plongée, ou comment passer des oiseaux aux poissons), les quatre mousquetaires du scénario se retrouvaient sur un nouveau projet. « Nid de rêves», voilà un titre peu propice aux envolée lyriques! Deux châtelains fauchés comme les blés, plutôt que de quitter leur logement, ouvraient des chambres d’hôtes avec l’aide de leur gardien. Chaque couple qui venait ici voyait sa vie transformée, son destin bouleversé. Bien sûr, des éléments extérieurs pouvaient intervenir, un ado en fugue viendrait troubler un voyage de noces ou ….

  • Ou bien, si le budget nous le permet, j’imagine bien une toute autre chose : une malédiction en partage. Imaginons ! Nous sommes sous Louis XIV, un poète se meurt d’amour pour une belle. Il la regarde, montée sur sa cavale fringante, elle dont le teint n’a pas besoin de poudre….

  • Celui de la belle ou celui du canasson ?

  • LA BELLE ! grogna notre scénariste. Il ne respire que pour elle, qui est enfermée dans sa chambre . Hélas, il meurt, elle meurt.

  • Forcément, sous Louis XIV, ils ne peuvent plus être vivants.

  • Ils sont tombés sous les balles…Non, ils ont été empoisonnés ! Je ne sais pas par qui, je vous laisse imaginer, je ne ferme aucune porte…

  • Je croyais qu’elle était enfermée.

  • Ils rendent leur dernier souffle, bercé par le doux espoir de la vengeance.

  • C’est vraiment stupide ce que tu dis.

Un grand silence suivit.

  • Cela m’a échappé.

  • Oui, nous nous en sommes aperçus !

  • Mais je ne regrette pas ce que j’ai dit. Il ne s’agit même pas de « budget », tu fais raconter l’histoire au beau milieu du salon par la châtelaine et tu peux t’abstraire un moment de ce problème de fric. Elle est débile, ton histoire d’amour contrariée, de vengeance à travers les siècles, d’ailleurs, toute cette histoire est idiote, elle ne vaut pas un clou planté dans un pneu rechapé.

Le quatrième scénariste, qui n’avait soufflé mot, murmura que venant de la part de quelqu’un qui écrivait des romances de la main gauche.

– Et j’assume totalement ! Je ne manque ni de budget pour mes décors, ni d’acteurs talentueux puisque les lecteurs peuvent imaginer qui ils veulent. Et je préfère écrire des romances à l’eau de rose plutôt qu’une série destinée à concurrencer une autre qui se déroule dans un camping. A bientôt, je dois terminer Muffin pour cœurs solitaires.

Descente à River Road de Meja Mwangi

Présentation de l’éditeur :

Radié de l’armée pour une sombre histoire de corruption, l’ex-lieutenant Ben Wachira vit mal sa réinsertion dans la vie civile. Hanté par un passé trouble et un ancien complice qui le tient responsable de son malheur, il passe ses journées comme ouvrier sur un chantier de construction et ses nuits à écumer les rues et les bars des bas-fonds de River Road. Un soir, il rencontre Wini, jeune prostituée occasionnelle. En compagnie de la jeune femme et de son garçon Baby, Ben essaye de réapprendre à vivre. Un soir, Wini disparaît, lui laissant son fils sur les bras…

Mon avis :

Ce roman nous plonge au fin fond du Kenya. Nous sommes dans une ville, en fait, ou plutôt, dans une ville entourée par des bidonvilles, des huttes que les services d’hygiène détruisent régulièrement, et qui sont reconstruites tout aussi rapidement. Là vivent ceux qui n’ont pas (ou plus) les moyens de louer un logement presque décents. Ils auront au départ été expulsés avec leurs meubles, c’est à dire jetés dans la rue.

Ben Wachira n’en est pas encore là. Il a cédé à la corruption, qui gangrène totalement le pays. Pourquoi n’aurait-il pas cédé ? Il cautionne parfaitement ce système : Il n’avait jamais rien trouvé à reprocher au système qui voulait qu’on paie en échange de ce qu’on obtient. Il y était habitué. Et il était tout à fait sûr que, sil il avait eu quelque chose à vendre à une femme, ce n’est certainement pas de l’argent qu’il aurait demandé en échange.

Autant vous dire que la place des femmes est vraiment mince, très mince. Reléguées à la campagne avec leur progéniture (nombreuse), elles doivent faire avec le peu que leurs maris leur envoie de la ville, et s’occuper des bêtes, du lopin de terres qu’elles possèdent. Les citadines ne sont pas mieux loties. d’ailleurs, on les voit peu, sauf dans les cafés où elles se prostituent sous couvert de payer d’hypothétiques études. C’est ainsi que Ben rencontre Wini et son fils, Bébé. Nous découvrons leur vie commune au cours de retour en arrière, les errances de Ben après avoir été chassé de l’armée.

Misère, solitude sont les maîtres mots. La solidarité, l’entraide, n’existent pas. Chacun pour soi face à la violence, voire à l’extrême violence. Un accident est si vite arrivé. Ne cherchez pas une note d’espoir, il n’y en a pas – sauf à tout quitter. Descente à river road est un constat désespérant.

ab4u