Archive | février 2013

La guerre des clans, tome 3 d’Erin Hunter.

forêts

édition Pocket – 328 pages.

Quatrième de couverture :

La tension est à son comble dans le Clan du Tonnerre : une terrible inondation s’abat sur la forêt et les alliances entre tribus changent sans cesse. Quant à Cœur de Feu, il continue d’enquêter sur la mort de Plume Rousse, l’ancien lieutenant du Clan. Il ignore encore quelle sombre machination il va découvrir…

Circonstance de lecture :

Ce livre, comme les deux premiers tomes, m’a été prêté par un de mes élèves.

Challenge-anglais

Mon avis :

Je ne vous cacherai pas qu’il faut surmonter une difficulté : ne pas se mélanger entre les noms des personnages. Je n’ai donc pas lu les pages  du début, qui énumère le nom des personnages et n’auraient servi qu’à me plonger dans la confusion. Il faut retenir que :
– Coeur de feu est le héros. Comme son nom l’indique, il est roux ;
– Griffe de Tigre est l’aspirant traître.
– Etoile Bleue est la chef du clan du Tonnerre.
– Croc Jaune est la guérisseuse, après la mort, dans le tome 1, de la précédente guérisseuse.

Bien sûr, quand je regarde mes charmants chats domestiques, j’ai un peu de mal avec la saga, même si mon cher Chablis, 12 ans, est revenu récemment avec une belle blessure à la cuisse. D’un côté, ses chats se comportent comme des chats sauvages, ils protègent leur territoire, ils chassent (musaraignes, écureuils, lapins), ont des portées, pas nécessairement à la bonne saison, et les chatons ne sont pas toujours assez forts pour survivre. De l’autre, certains comportements sont typiquement humaines, comme la traîtrise, l’ambition, et, parfois, le sacrifice de proches.
L’action est toujours au rendez-vous, les alliances se nous et se dénouent, avec parfois des déchirements à la clef. Les scènes de bataille sont particulièrement réussies.
Quant à Coeur de Feu, il voit son coeur déchiré entre son turbulent neveu, son meilleur ami, et son ancienne apprentie qui prend une toute nouvelle voie – sans oublier de sombres prophéties.
Qu’en sera-t-il dans le tome IV ? Je le saurai très bientôt.

Seule la fleur sait, tome 1 de Rihito Takarai

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édition Taifu comics – 192 pages.

Présentation de l’éditeur :

Arikawa fait une rencontre inattendue avec un étudiant, Misaki, en lui donnant un coup de main. Le même jour, en rentrant à la maison, il le rencontre à nouveau par accident en lui rentrant dedans. Il récupère accidentellement le collier de fleur de Misaki qui semble avoir une valeur sentimentale…

Circonstance d’écriture :

Je participe au Challenge Challenge : Sur les pages du Japon depuis presque un an. Ce mois-ci est consacré à la romance, à l’érotisme. J’ai un livre dans ma PAL qui conviendrait bien, mais je crains de ne pas le finir avant la fin du mois. Je me rabats donc sur ce manga.

Mon avis :

Ceci est un yaoi, un yaoi tout mignon, tout gentil, pour ne pas dire un peu niais. Bref, un yaoi qui peut être mis entre toutes les mains, car il ne comporte pas de scènes trop osées ou choquantes. Je ne vous cacherai pas non plus que ce qui m’a attiré est la couverture, que je trouve vraiment très belle.

Misaki et Akirawa sont deux étudiants. Ils se sont rencontrés une première fois, puis une seconde fois, puis ils vont être amenés à travailler ensemble, dans le laboratoire de botanique – plutôt étrange qu’un étudiant en droit, qui devrait être débordé, décide de travailler dans ce labo, pour aider un Misaki surchargé de travail, non ? Bien sûr, avoir postulé pour cette charge n’est pas un hasard, c’est un moyen comme un autre de se rapprocher du discret Misaki qui-n’était-pas-le-garçon-qu’Arikawa-a-bousculé-deux-fois. Il n’était pas non plus le garçon qui portait ce collier de fleur (un truc de filles !). Bref, le presque aussi timide Arikawa aura bien du mal à se rapprocher de lui, ce qui fait que le rythme de ce manga sera lent, très lent, et en même temps représentatif des hésitations des deux personnages principaux. L’action culmine en une scène touchante, mais rien n’est encore définitif, pas comme dans d’autres yaio bien plus crus.

J’ai le tome 2 – il faut juste que je trouve le temps de le lire, entre deux romans policiers.

Banniere-fevrier

Une anglaise à Paris de Nancy Mitford.

Mitford

édition Payot – 138 pages.

Présentation de l’éditeur :

« Je sais désormais que je ne pourrais plus supporter de vivre ailleurs qu’à Paris », écrivait peu après la guerre à son ami Evelyn Waugh l’aînée des excentriques sœurs Mitford (1904-1973). Si ses œuvres sont mondialement célèbres, beaucoup de ses lecteurs ignorent que Nancy habita la capitale française de 1948 à 1966 puis Versailles jusqu’à sa mort, et qu’à sa francophilie naturelle s’ajoutaient des sentiments contrariés pour le gaulliste Gaston Palewski.

Mon avis :

Un cappuccino, un muffin, un livre : voici le programme de la matinée d’hier.
Le reproche que je ferai à ce livre est qu’il est trop court : je pense que Nancy Mitford, qui vécut à Paris, puis à Versailles, a écrit bien d’autres chroniques.
Ce livre-ci est divisé en cinq parties, d’inégales longueurs (entre dix et soixante pages). Dans la première, Nancy parle de l’élégance, et compare parisiennes, anglaises et américaines – les anglaises, selon elles, sont élégantes jusqu’à l’âge de dix ans et après, copient volontairement la mode parisienne, avec deux/trois ans de retard. Un peu plus, j’avais l’impression de lire le texte de Montesquieu sur la mode et les disparités Paris/Province.
Ses chroniques des années cinquante montrent avant tout la vie littéraire : Cocteau côtoie Colette, Claudel, Gide, et il est amusant de voir ses écrivains reconnus, sacralisés de nos jours, dans des activités presque de journalistes (écriture d’article, participation à des jurys littéraires, présentateurs d’émissions de radios) mais aussi dans leurs petites querelles – deux égos d’écrivains qui se rencontrent peuvent faire très mal.
J’ai aimé aussi les instantanés de la vie quotidienne, comme ces chèvres que l’on trait encore sur le trottoir (et la pasteurisation ? Euh… laissons cela de côté) ou les hérissons dans le jardin de l’auteur, à Versailles. N’oublions pas les concierges, indispensables, ou les facteurs.
Le recueil se clôt sur l’évocation de mai 68, dans un journal tout aristocratique – Nancy Mitford est gaulliste, et n’apprécie guère Daniel Cohn-Bandit (sic) ou François Mitterrand, dont elle doute de l’avenir politique.
Pour terminer, je mettrai deux citations :
Les Anglais ne croient pas un mot de ce que je leur raconte. Ils me considèrent comme leur fournisseuse officielle de conte de fées.
On ne vote pas pour quelqu’un, on vote contre.

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Le mutant apprivoisé de Ken Bruen

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édition Gallimard – 212 pages.

Mon résumé :

Voici le deuxième tome des aventures de Brant et Roberts. Tandis que celui-ci, en plus de quelques soucis familiaux, découvre qu’il souffre d’un cancer de la peau, Brant est victime de menaces physiques et se ratatine chez lui, à cause d’un certain mutant, qui ne perd rien pour attendre.

Mon avis :

Si vous cherchez une enquête policière policée et bien construite, passez votre chemin. Ici, comme toujours dans ce charmant commissariat, les policiers sont aussi imprévisibles et irrespectueux des lois que le commun des délinquants – si ce n’est plus. Je ne vous parle même pas du superintendant, qui mâche consciencieusement son thé (si, c’est possible), ou des agents qui ne souhaitent qu’une chose : une promotion.

L’amitié entre Roberts et Brant connait un flottement dans ce volume. Roberts ne parvient pas à dire à Brant qu’il souffre d’un cancer, quant à Brant, il prendra des congés pour se remettre de ce que le mutant, l’homme de main de Bill, lui a fait – mais après avoir signifié au sus-nommé Bill sa façon de penser, sa manière de voir, et je suis au regrêt de vous dire qu’une innocente peluche a été injustement maltraitée. Il faut vraiment être naïf pour le menacer ET le laisser en vie.

En attendant, Brant fait du tourisme. En Irlande. Chez son cousin Pat. Qui lui fait découvrir les vertus du thé au petit déjeuner. Mais pas n’importe lequel. Surtout, Brant se voit confier une mission : ramener en Angleterre l’un des deux membres du duo Sparadra, duo de tueurs découverts dans le premier tome, Le gros coup. Ce duo n’aurait pas dû, lui non plus, s’en prendre à Brant, ils n’auraient pas dû tuer le jeune agent pour lequel Brant avait beaucoup d’estime. Partir à New York était une bonne idée (d’autres ont choisi San Francisco), s’attaquer aux américains, grands possesseurs d’armes à feu devant l’Eternel n’en était pas une. Et Brant sur le sol américain, en flic représentatif de la police anglaise vaut à lui seul le détour.

Le mutant apprivoisé illustre à lui seul deux maximes : le hasard fait bien les choses et on n’est jamais si bien servi que par soi-même. A méditer.

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Barbe-Bleue d’Amélie Nothomb

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Quatrième de couverture :

La colocataire est la femme idéale.

Mon avis :

Je commencerai par une phrase, qui s’approche de mon univers d’écriture (ou plutôt de celui de Nunzi) : « Récemment, un best-seller mondial a prétendu qu’il y avait des vampires gentils et innocents ». Je persiste et signe : il existe des vampires « gentils » et « innocents ». Prenez Dracula, ou Carmilla – ils sont relativement sympathiques, pour des vampires, et après tout, Dracula a eu la gentillesse de ne pas tuer Mina Harper, simplement de la vampiriser devant son mari (et je vous laisse interpréter cette scène comme bon vous semble). Quant à Lucie, cette gourde, elle a été métamorphosée en vampires, est-ce vraiment si dramatique ? Son fiancé aurait pu la laisser tranquille, après tout.

Après cette digression, revenons à ce roman, ou plutôt ce huis-clos qui met en scène deux caractères aux noms improbables, comme seule Amélie Nothomb sait en trouver : don Elemirio et Saturnine. Il est espagnol, elle est belge. Il n’est pas sorti de son appartement depuis 1991, elle effectue un remplacement à l’école du Louvres. Il aime cuisiner, elle lui fait découvrir le champagne – et je ne vous cacherai pas que tous les passages sur le champagne m’ont rappelé Le fait du Prince, lu voici deux ans. Ils parleront beaucoup, et chaque dîner se transformera en joute oratoire. La religion, l’amour, le secret sont au cœur de ses échanges, dans lesquels Saturnine prendra peu à peu le dessus.

Je ne suis pas très fan d’Amélie Nothomb, et ce n’est pas cette relecture de Barbe-Bleue qui me fera changer d’avis. De temps à autre, elle convoque d’autres contes, comme Peau d’âne (avec la robe couleur de temps), elle se montre très réaliste (les difficultés de logements), elle joue sur les couleurs, sur le mouvement et sur l’immobilité. Les nourritures terrestres prennent trop de place, et même si la cause des femmes semble l’emporter dans un dénouement étonnant, je ne suis pas conquise par ce que j’ai lu.

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Mini Swap Wish-list

swapJ’ai participé au mini-swap wish-list, organisé par Nelcie.
Le contenu du colis :
– Un livre format poche choisi parmi les 10 à 20 livres proposés par votre swappé
– Un ou plusieurs marque-pages
– Une carte postale sur laquelle vous aurez écrit un gentil petit mot à votre swappé.

Ma swapée est klicia et je tiens à la remercier pour avoir choisi dans ma wish-list un livre d’un de mes auteurs préférés. Quant aux marque-pages, ils sont vraiment très beaux. Mais je préfère me taire, et laisser parler les photos.

Tout d’abord, voici ce que j’ai découvert en ouvrant l’enveloppe :

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Voici les marque-pages dont un fait main à mon prénom, vraiment superbe et un badge le monde de Fleurine.

 

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Voici la carte et le livre : le tout dernier Henning Mankell, Le chinois.

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Merci à Nelcie pour l’organisation et à Klicia pour ce swap.

Les Mac Cabées de Ken Bruen

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édition Gallimard – 166 pages.

Quatrième de couverture (extraits) :

La situation est toujours aussi tendue dans les quartiers chauds de Londres, et Brixton n’a jamais autant ressemblé à une chanson des Clash : le commissaire Roberts est à la poursuite de l’assassin de son frère, une petite frappe londonienne qui se fait passer pour un Irlandais, histoire de paraître encore plus teigneux. Pendant ce temps, Brant et l’agent Falls sont sur les traces d’un violeur en série qui sévit dans les boîtes de nuit du coin. Brant n’attend qu’une chose : coincer ce salaud et lui faire sentir sa douleur…
Mon avis :
J’ai un problème, un très gros problème : j’ai acheté le dernier tome de cette saga, Munitions,  chez mon bouquiniste préféré – ce livre était; paraît-il, très bien. Il est pire que cela, il est addictif. Depuis, je suis allée dans deux des bibliothèques que je fréquente, et ô miracle, ils possèdent une bonne dizaine de romans de cet auteur. Bref, mon porte-monnaie est sauvé, et moi avec.
Les Mac Cabées est le troisième volume des aventures de Roberts et de son ami Brant. Roberts est tout juste guéri d’un mélanome, et la mort de son frère, bien qu’il ne l’ait pas vu depuis dix ans, est un coup dur. En effet, c’est lui que son frère a appelé, se sachant mourant, et ce que son flic de frère a découvert n’était vraiment pas beau à voir – le tueur a pris du plaisir à massacrer sa victime au-delà de toute désespérance. Et ne parlez ni  d’enquêtes, ni de justice, le tueur est protégé par des gros bonnets. Circulez, y’a rien à voir.
L’erreur serait de sous-estimer Brant. Ses méthodes sont tellement particulières, pour ne pas dire innovantes, que ses proches font toujours appel à lui dans le cas d’affaires impossibles à résoudre avec des méthodes strictement légales. Les indics, il connait. Les petites frappes, aussi. Les flics qui pensent à leur carrière et à leur bien-être plutôt qu’à enquêter, également. D’où son amitié pour Porter Nash, toute nouvelle recrue, flic gay totalement assumé, et pour l’agent Falls.
Si vous lisez leurs aventures, oubliez les idées reçues sur les romans policiers, et délectez-vous de ces chapitres percutants, qui vous expliqueront mieux que je ne saurai le faire comment éliminer un malfrat grâce à la méthode Brant.
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Les plumes d’Asphodèle

 LOGO PLUMES2, lylouanne tumblr com La première partie de ce texte a fait partie de  Des mots, une histoire 92.

Nous sommes en 1906, chez le député-maire d’une petite ville de Province.

–          C’est un grand jour !

Charles-Marie frappait dans ses mains, autant pour appeler les domestiques à se réunir autour de lui que pour se convaincre de la réalité de cette journée. Il en avait presque le vertige : il recevait aujourd’hui Hugo et Elisabeth de Nanterry, et si tout se passait comme lui et Hugo le souhaitaient, la fin de la journée verrait la proclamation officielle des fiançailles entre Antoine de Nanterry et Claire Liénart.

Charles-Marie avait donné ses ordres, et chargé Eugénie, sa confidente… pardon, sa gouvernante de veiller à ce que tout se passe bien. Il avait le souvenir de quelques repas particulièrement houleux.

Autant dire qu’il se souvenait de ses propres fiançailles.

Les premières.

Depuis des années, les Liénart et les Flandrin étaient rivaux, briguaient les mêmes postes, convoitaient les mêmes terres. La mort de Georges Liénart  avait plongé Augustin Flandrin dans une joie intense – s’il avait pu se douter que c’était Marie Liénart sa force, son guide, il ne  se serait pas réjouie si vite. En fait, il avait même très rapidement déchanté, au point qu’une trêve avait été signée et, pour marquer à jamais l’alliance entre les deux familles, l’union entre Charles-Marie, unique fils survivant, et Jeannette Flandrin avait été décidée.

Pourtant, très vite, Marie Liénart avait eu des doutes quant à cette union. Une intuition. Une fulgurance qui ne saurait s’expliquer.

–          Si cette union ne devait pas avoir lieu, en serais-tu chagriné ?
–          Bien sûr que non !

Cri du cœur.

–          Pourquoi veux-tu rompre ce futur mariage ?

Elle ne pouvait le lui expliquer puisqu’elle-même ne pouvait se l’expliquer. Elle était simplement rassurée que son fils ne se soit pas épris de Jeannette Flandrin.

Charles-Marie était amoureux. Oui. Il savait ce qu’était l’obsession amoureux, les égarements de la passion – il savait aussi que son amour était sans espoir. Ils n’appartenaient pas au même milieu, même s’il la voyait tous les jours. Et elle était mariée. Elle avait trois enfants.  Elle était trop lucide pour ne pas savoir que les délicieux moments qu’ils avaient passés ensemble était tout ce qu’il y aurait entre eux.

Tout ? A voir.

L’automne était arrivé. Avec lui, un événement atroce – la mort de maître Flandrin, lors d’une partie de chasse. Le mariage avait été repoussé d’un an, pour respecter le deuil de la famille. Un mois plus tard, on frappait à la porte, en pleine nuit.  Marie Liénart avait ouvert elle-même la porte, devant elle se trouvait Flandrin Fils, le docteur Thévenin, et d’autres notables. Ils semblaient très gênés.

–          Madame Liénart, dit Pascal Thévenin en se découvrant, je suis désolé de vous déranger ainsi en pleine nuit, savez-vous où se trouve votre fils ?
–          Ici même ! s’exclama Charles-Marie. Il descendit l’escalier avec toute la dignité que lui permettait sa petite taille, sa maigreur et son manque de sommeil. Que se passe-t-il messieurs, et pourquoi troublez-vous le repos de ma mère ?

Jules Flandrin murmura des paroles inintelligibles à l’oreille de Pascal Thévenin qui lui répondit :

–          Vous voyez bien. Il faut cesser cette folie.
–          Mais enfin, pouvez-vous vous expliquer ? s’exclama Marie Liénart.
–          Jeannette Flandrin a disparu. Elle a laissé une lettre disant qu’elle partait avec son bien-aimé, et nous avons cru…

Le feu était monté aux joues de Charles-Marie Liénart.

–          Messieurs, je vous sais gré de m’annoncer ici mon infortune. Pour quelles raisons aurais-je soustrait à l’amour de sa famille ma légitime fiancée ?
–          Je vous l’avais bien dit ! murmura Pascal Thevenin.

Le scandale fut immense, les rumeurs intenses, et Jules Flandrin vécut un véritable calvaire pendant des années. Puis, on oublia, il ne fut plus question de la trop belle Jeannette Flandrin.

En revanche, son frère n’eut de cesse d’alimenter la rivalité entre les Liénart et les Flandrin pendant les vingt-cinq années qui suivirent. Force était de constater que ses efforts ne portaient pas leur fruit – pour jouer à ce petit jeu, il faut être deux.

– C’est un grand jour !
Et il était passé si vite. Après le déjeuner de fiançailles, Charles-Marie avait tenu à faire découvrir sa belle ville au Nanterry. Et il avait fallu qu’ils croisent la famille Flandrin au grand complet – maître Flandrin, madame Flandrin, et leur huit filles – contrairement aux Liénart, les Flandrin n’avaient aucune difficulté à concevoir un enfant, ils avaient simplement des difficultés à avoir un fils. Les échanges avaient été courtois et glacials. Bien sûr, à peine étaient-ils rentrés qu’Hugo de Nanterry s’étonna de cette hostilité ouverte. Charles-Marie raconta tout, absolument tout – quand on a rien à cacher, pourquoi jouer sur le mystère ?
– Nous avons tous un Flandrin autour de nous. Le mien se nomme Julien de Radeval, et son mauvais souvenir est lié à un mariage.
Ma jeune sœur Elisabeth était fiancée à Julien. Elle était amoureuse de lui, j’en suis certain. Ils avaient dansé avec une telle complicité à leurs fiançailles que s’en était presque – et je parle ici de ma sœur – érotique.
Le temps des noces arrivait trop lentement aux yeux d’Elisabeth, mais elle sut se montrer patiente et raisonnable. Comme la famille de Radeval venait de loin, ils vinrent dormir au château la veille du mariage. Seul Julien était logé chez les Vaudreuil, nos proches voisins.
Je fus réveillé à deux heures du matin, bien contre mon gré. Le marié n’était pas rentré ! On ne voulait pas encore réveiller mes parents, car on soupçonnait … on imaginait… Le rouge me monta aux joues, et je dus réveiller ma sœur Clémentine afin qu’elle aille elle-même constater si notre jeune sœur dormait seule, ou non. Je m’écriai que si tel était le cas, je jetterai moi-même Julien de Radeval par la fenêtre. Qu’on mette en doute la vertu de Julien, soit, qu’on suspecte ma sœur…
Un silence se fit, que Charles-Marie Liénart ne rompit pas. Leur parvenaient simplement les bavardages
En fait, je ne dus réveiller personne, Clémentine et Elisabeth papotaient allègrement en dépit de l’heure tardive.
Clémentine prit les soupçons qui pesaient sur l’innocence de notre sœur encore plus mal que moi. Elle resta près d’elle, ma mère la rejoignit, et nous organisâmes une battue dans la forêt alentours.
Nous le retrouvâmes, la tête ensanglantée. Vivant. Il resta plusieurs jours entre la vie et la mort. Quand il fut enfin sauvé, ce fut pour déclarer qu’il ne se souvenait de rien, comme si un gouffre avait englouti tous les jours passés. Il ne se rappelait même plus avoir été fiancé à ma sœur.
– C’est dément !
– Vous ne savez pas le pire : il affirme, lui qui est amnésique, que c’est moi qui l’ai agressé, parce que j’étais jaloux de lui. Ce que j’ai imprudemment dit s’était retourné contre moi. On n’a jamais retrouvé celui ou ceux qui l’ont attaqué.
– Et … votre soeur ?
– Elle a eu du mal à surmonter cette épreuve, elle a même songé à prendre le voile. Heureusement, elle n’en a rien fait. Elle a épousé Louis de Carduel, le frère d’Elisabeth, ma tendre compagne. Si vous le croisez, ne lui parlez pas de Julien de Radeval, il rêve de le plonger dans les douves de Carduel, pour lui faire payer le mal qu’il a fait à ma soeur.
Elisabeth de Carduel née Nanterry, Elisabeth de Nanterry née Carduel… les réunions de famille ne s’annonçaient pas simples !

L’âge du doute d’Andrea Camilleri

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édition Fleuve noir – 250 pages.

Quatrième de couverture (extraits) :

La nuit du commissaire Montalbano a été pour le moins mouvementée, il a rêvé de son propre enterrement. Décidément, le fait d’avancer en âge ne cesse de le tourmenter…
Le lendemain, Montalbano est convoqué au port. Un yacht vient d’y appareiller et il n’est pas arrivé seul. Sur le quai gît le canot auquel il a porté secours à l’embouchure du port. Seulement à l’intérieur de celui-ci se trouvait un homme, mort, défiguré… Que s’est-il passé au juste ? Qui était cet homme ? Et qui sont les membres d’équipage de ce yacht ?

Mon avis :

Je commencerai par un avertissement : non, il n’y a pas un problème avec la traduction. Je vous invite d’ailleurs à lire la préface signée Serge Quadruppani, qui explique sa démarche, et sa volonté de retranscrire au plus près le parler utilisé par Andrea Camilleri. Après… je reconnais qu’il faut un temps d’adaptation, surtout quand je lis les propos de Catarellà, capable de déformer les mots et les noms les plus simples.

Maintenant, revenons au livre. Salvo Montalbano a 58 ans, il vieillit, et a bien conscience de vieillir – quand on ne le lui fait pas remarquer abruptement. Et s’il enquête sur ce mystérieux mort, repêché dans le port, il se questionne au moins autant sur le temps qui passe, sur ses capacités physiques et intellectuelles qui diminuent inexorablement mais aussi sur l’amour. Si Salvo est l’éternel fiancé de Livia, qui lui téléphone toujours régulièrement, il éprouve un coup de foudre pour la bien nommée Laura Belladonna, lieutenant de son état et elle-même, bien qu’elle soit plus jeune, bien qu’elle soit fiancée, ressent la même chose envers Salvo. Faut-il céder à cet amour en dépit de tout ce qui les sépare ? Faut-il au contraire se noyer dans le travail ? L’enquête qui les a réunit s’avère plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord, et Montalbano verra son enquête le conduire – virtuellement – jusqu’en Afrique du Sud, en passant par la Sierra Leone. Elle lui rappellera également, notamment en voyant les clandestins qui arrivent au port de Vigatà, une autre enquête, menée bien des années plus tôt, mais dont il garde encore les séquelles.

L’âge du doute est un roman à lire si, comme moi, vous êtes fan d’Andrea Camilleri et de son commissaire. Il est aussi un hommage à un auteur qu’il me tarde de relire : Georges Simenon.
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Dexter dans de beaux draps

Dexter dans de beaux drapsMon résumé :

Dexter mène une vie normale, et c’est normalement que lui et Rita passent leur lune de miel à Paris. C’est avec soulagement que Dexter rentre en Floride et constate que rien n’a changé – Dexter serait-il en train de s’humaniser ? Surtout, il se retrouve aux prises avec un nouveau tueur. Dexter, marié, beau-père de deux enfants, pourra-t-il faire face ?

Mon avis :

Pourquoi ai-je attendu autant de temps pour lire le quatrième volet des aventures de Dexter ? J’ai vraiment adoré ce volume, même si Dexter change.

Ce n’est pas le mariage qui le met dans cet état (encore que… ne ratez pas ses savoureux commentaires sur Paris). Ce n’est pas non plus la découverte de quatre cadavres artistiquement disposés. Dexter ne peut s’empêcher de se questionner sur la finalité de ces dispositions, comme si le plaisir de tuer n’était pas suffisant – et Dexter qui se questionne, lui qui connaît très bien les tueurs en série, de l’intérieur, ce n’est pas franchement rassurant.

Non, ce qui lui fera commettre des erreurs, c’est que le tueur s’en est pris à Debbie, sa soeur, et qu’après cette attaque, Dexter commence à ressentir ce qui ressemble à des émotions. Pas pratique, quand on est un tueur froid, lucide, qui ne commet jamais d’erreurs et que l’on reçoit le besoin intense non d’arrêter cette série de meurtres, mais de se venger de la personne qui a conduit sa soeur dans une chambre d’hôpital – et pas pour une petite blessure faite avec un cure-dents.

Il peut de plus compter sur ses meilleurs ennemis, toujours vaillants au poste, toujours prêts à chercher ce que ce cher Dexter peut bien leur cacher (beaucoup de choses, vous vous doutez bien) – et la situation tragique dans laquelle se trouve sa soeur ne les empêchera pas de manifester à son égard une animosité pas des plus légères.

Bref, après un départ sur les chapeaux de roue, des situations cocasses, Dexter dans de beaux draps nous montre un (anti)-héros un peu en retrait, plongé dans une situation qui risque de le dépasser – et je ne suis pas sympa, je ne vous parlerai pas du coup de théâtre final.

 

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