Archive | Mai 2023

Tronche, Rosépine de Philippe Curval

Présentation de l’éditeur : 

Surgie d’un épisode fiévreux de Philippe Curval lors d’un séjour à l’hôpital, la saga de la famille Tronche met en scène une héroïne avant-gardiste et libre, incarnation des années 60′ : Rosépine.
Fuyant sa famille vers Paris dès son plus jeune âge, certaine de porter en elle un destin singulier, Rosépine devient tour à tour maçonne, styliste en tricot pour les plus grandes maisons de mode. Avant de s’installer dans un village insolite de ses Cévennes natales afin de réaliser une oeuvre picturale, révolutionnaire pour son temps, qui l’amènera à la conquête de New York. Paysages magnifiques, rencontres amoureuses et sensuelles, plongée visionnaire au cœur de l’art contemporain, l’auteur s’inspire de faits et personnages issus de ses fantasmes familiaux, pour raconter une époque, dans un tourbillon des sens. Plus qu’une autofiction, une extrafiction.
Mon avis : 
Merci aux éditions La Volte et à Babelio pour ce partenariat.
Il est toujours difficile de rédiger un avis pour un roman que l’on n’a ni apprécié réellement, ni détesté. Ce fut une lecture sympathique, une lecture assez facile, les pages se tournaient toutes seules, mais c’est vraiment tout. En revanche, je ne peux pas dire que j’ai trouvé le personnage de Rosépine sympathique. Oui, elle est une femme, elle est indépendante, elle n’a besoin de personne, mais elle ne se préoccupe pas beaucoup des amis qu’elle se fait et qu’elle délaisse, voire abandonne. Il faut dire que, dans sa jeunesse, elle n’a eu personne qui prenne pleinement soin d’elle – elle a choisi la fuite, plutôt que de continuer à vivre ce qu’elle vivait. Elle n’est pas très attachée à son fils Balthazar. Elle ne le maltraite pas, non, elle le nourrit, veille à son éducation, à sa santé, à sa culture mais elle ne se préoccupe pas nécessairement de ses besoins affectifs. Ce qui est positif, c’est sa capacité à s’en sortir toute seule, à repousser les hommes qui ne l’intéressent pas. Elle ne compte que sur une seule personne : elle-même. Elle ne tient pas en place, Rosépine, mais finalement, son parcours de femme libre semble presque classique, de la province à Paris, pour finir aux Etats-Unis.

La règle de l’or de Juana Salabert

Présentation de l’éditeur : 

Tout commence en 2012 à Madrid avec le cadavre d’un bijoutier égorgé, un message épinglé sur la poitrine. Il vendait et achetait de l’or aux familles victimes de la crise, il était aussi usurier. Mais c’est le troisième cadavre de la série. Le jeune inspecteur Alarde, perspicace et réfléchi, est chargé de l’enquête, et il tente de recomposer le puzzle. Les suspects sont nombreux et les mécanismes complexes de la cupidité prennent des formes variées : évasion des fortunes vers les paradis fiscaux, vol d’héritages, fausse croisade contre les usuriers…

Mon avis : 

Ceci est le dernier titre que je propose pour le mois espagnol « officiel » – je terminerai peut-être quelques titres en juin. En effet, depuis huit jours, j’ai mis volontairement en pause mon mois espagnol personnel – et je tape avec une main gauche presque guérie.

Ce roman n’est pas seulement un roman policier, il est surtout un roman noir, très noir, qui nous plonge dans une Espagne en pleine crise. Les Espagnols n’en peuvent plus, les espagnols ne s’en sortent pas, eux qui se sont endettés sur quarante ans pour payer leur logement. Et quand les banques ne veulent plus ou ne peuvent plus prêter, la seule solution qui reste, c’est recourir à des prêteurs sur gage ou, pour mieux dire, des usuriers. Ils sont nombreux, très nombreux, bien plus que je ne pouvais le penser. Depuis le début de l’année 2012, ce sont déjà trois usuriers qui ont été tués. Etaient-ils détestés ? A des degrés divers, oui, même si certains tentaient de faire « honnêtement » leur travail. Certains auraient-ils pu passer à l’acte ? Oui, peut-être, mais pour l’usurier qui les avait mis encore plus bas que terre, pas pour trois usuriers, même si, forcément, quand on doit recourir aux services de ces personnes, l’on a tendance à en consulter plusieurs.

L’on presse l’inspecteur Alarde de trouver le coupable. Cela ne peut durer, un tueur en série à Madrid, cela fait désordre. Alarde enquête, oui, mais il est aussi sensible, sensible aux personnes qu’il rencontre, qu’il interroge, dont il voit les douleurs, les souffrances. Sa propre histoire en a fait un enquêteur particulièrement attentif à ce qui se dit et ce qui ne se dit pas. Et s’il arrêtera le/la coupable (ne divulguons rien), j’ai aimé que la fin du roman ne soit pas consacré à lui, mais à des personnes qu’Alarde a croisé et apprécié au fil de l’enquête.

Duane est amoureux de Larry McMurtry

Présentation de l’éditeur :

Duane a 64 ans. Il a perdu sa femme dans un accident de voiture, et ne s’en remet pas. Réalisant un vieux rêve, il est parti en Égypte pour tenter de soulager son chagrin, mais le retour à Thalia, la petite ville texane où il a passé toute sa vie, s’avère bien difficile : ses amis sont partis (quand ils ne sont pas morts), son entreprise, désormais dirigée par son fils Dickie, se porte très bien sans lui, ses filles l’ennuient et son cœur est en train de le lâcher. Heureusement, il y a l’amour… ou plus précisément la poitrine d’Annie Cameron, une jeune géologue particulièrement affriolante embauchée par son fils, et qui ne semble pas insensible aux charmes de notre héros. Il y a aussi Honor Carmichael, sa psychanalyste lesbienne, avec laquelle Duane s’est lancé dans une sorte de défi aux lois de l’attraction.

Mon avis : 

J’ai commencé par la fin, c’est à dire par le dernier tome de la série et comment dire ? Mon avis est plutôt mitigé, et je ne suis pas sûre qu’il aurait été différent si j’avais lu les trois tomes précédents, mettant en scène Duane.

Il revient d’un voyage en Egypte, accomplissant ainsi l’un de ses rêves. Et sa vie amoureuse, sexuelle, prendra un nouveau tournant, avec forces détails. Je n’irai pas jusqu’à dire que le sexe est devenu son sujet principal de préoccupations, mais cela y ressemble grandement. Veuf depuis deux ans de sa femme, décédée dans un accident de voiture, Duane a été amoureux de sa psy lesbienne Honor. Il est maintenant amoureux de la jeune Anne, qui travaille dans sa compagnie pétrolière. Il doit aussi faire face à des soucis de santé assez importants, qui risquent de l’emmener plus vite que prévu dans l’autre monde, d’autant plus qu’il ne se ménage absolument pas, renonçant certes à faire du vélo par grandes chaleurs, mais ayant une très grande appétence pour le sport en chambre.

Ce roman n’est pas désagréable à lire, mais je ne m’attendais pas à un contenu si débridé. Je ne m’attendais pas non plus à lire l’antisémitisme totalement assumé des deux filles de Duane, qui elles aussi ont une vie sentimentale des plus mouvementée : l’une a fait son coming out, l’autre veut rentrer au couvent. J’ai eu l’impression de découvrir une certaine Amérique, une Amérique qui a survécu à la crise, une Amérique qui a tenu vaille que vaille, en dépit de nombreux rebondissements (voir la vie personnelle de Bobby, le meilleur ami de Duane). Je pense que la brièveté des chapitres m’a aussi permis de lire ce livre sans trop de soucis.

Pour ma part, j’aimerai savoir ce que ceux qui ont lu les autres tomes de la saga ont pensé de ce final.

 

 

In vino Veritas de Magali Collet et Isabelle Villain

Présentation du livre : 256 pages

Lors d’un vernissage, une galeriste est assassinée.
Secrets, mensonges et trahisons vont secouer la quiétude d’une petite commune en plein cœur du vignoble bordelais.
Et lorsque deux frères se retrouvent après des années de séparation, la liberté de l’un va dépendre de la détermination de l’autre.

Un thriller psychologique délicieusement machiavélique.

Mon avis :

Merci aux éditions Taurnada pour ce partenariat.

Attention : lire ce roman peut vous placer dans des situations impossibles. Je me suis retrouvée, liseuse à la main, dans ma cuisine, ne voulant pas lâcher ma liseuse tant j’étais prise par l’intrigue du livre – si ce n’est que cuisiner d’une seule main, ce n’est pas vraiment facile. Je vais simplement essayer de ne pas trop vous spoiler l’intrigue (oui, l’on peut être professeure de français et utiliser ce terme) en écrivant cet avis.

J’ai eu l’impression, en lisant ce livre, de me trouver dans un huis-clos, tant l’ambiance était étouffante.

Nous sommes face à des familles qui ont un membre qui les unit toutes les trois : Mathias Clavery. Il est le fils cadet, choyé, adoré de la famille Clavery, de grands propriétaires terriens, bourgeois, qui respectent parfaitement les règles non écrites de la bourgeoisie : pas de bruit, pas de vague, pas de scandale, tout linge sale doit être lavé en famille, et gare aux « faibles » qui ne pourraient résister. Je pense ici aux beaux-parents de Mathias : les deux familles ont toujours été proches, au point d’unir leurs enfants. Seulement, les parents d’Aurélie n’ont pas surmonté (financièrement) les aléas qui ponctuent la vie des vignerons, et les conséquences furent désastreuses, pour eux, pour Aurélie.

Aurélie, justement. C’est elle qui a été assassinée dans sa galerie. Elle n’était pas simplement une grande admiratrice de l’art aborigène, elle était une grande spécialiste de cet art, tenant à le faire découvrir absolument, à partager les créations de ses artistes dont, finalement, l’on sait peu de choses ici. Le premier suspect, c’est Mathias, son mari, gendarme de son état. Eh oui : la gendarmerie est une grande famille, cela n’empêche pas les collègues de Mathias de douter sérieusement de son innocence – il faut dire que Mathias n’a jamais cherché véritablement à s’intégrer à cette famille-là, restant un Clavery de bout en bout. Les gendarmes, le lieutenant Fabrice Dupuis en tête, se fient davantage aux preuves qu’à leur esprit de corps. Ils se fient aussi au nombre croissant de féminicides, et la mort d’Aurélie en est un de plus. Quel meilleur suspect qu’un mari qui se ne souvient plus de rien, qui a une attitude étrange, et se dit atteint du syndrome de Stendhal ?

Heureusement, il a une collègue, le major Fanny Cipriani, qui sera de son côté et s’acharnera à prouver son innocence. Et c’est là qu’intervient Augustin. Le fils prodigue. Ou plutôt le fils maudit pour une faute originelle que l’on découvrira peu à peu, et surtout, dont on découvrira l’ampleur des répercutions sur sa vie, sur la vie de sa famille, dans laquelle les mots « solidarité » et « fraternité » n’ont aucun sens. Augustin apparaît véritablement seul, surtout que Mathias ne fait pas grand chose pour l’aider – une habitude, chez lui.

Etouffant ? Oui. Prenant ? Aussi. Je me suis laissée prendre au jeu de cette lecture, et j’espère qu’il en sera de même pour vous.

La folie des papillons de Laetitia Casado

Présentation de l’éditeur : 

Dans un Paris dirigé par les hommes et marqué par la guerre, le gang des « Papillons Noirs » sévit la nuit. Tout porte à croire qu’il s’agit d’un groupe de voleuses qui s’en prend aux biens des hommes riches. Un sujet qui sème la discorde dans toute la ville…

Alors que la police mène l’enquête sur ces Robins des bois au féminin, trois amies, Léontine, Alice et Emma, tentent de trouver leur place dans la société des années folles. Journaliste, couturière ou passionnée d’art, c’est à travers leurs passions, leurs revendications et les rencontres du hasard, qu’elles prendront en main leur destin.

Merci aux éditions Scrineo et à Netgalley pour ce partenariat.

Mon avis : 

Un livre intéressant et nécessaire.

Oui, je sais, la formule est un peu courte, et j’aimerai vous dire que ce roman parle d’une chose qui est totalement passé, à savoir la difficulté, quand on est une femme, de se faire une place dans une société régie par et pour les hommes. Or, ce n’est pas passé, ce n’est pas terminé, les femmes doivent encore se battre pour pouvoir faire ce qu’elles veulent, pour ne plus être réifiées aussi par leur conjoint. L’on peut cependant, en lisant ce roman, mesurer le chemin parcouru, et se dire aussi qu’un retour en arrière est malheureusement toujours possible.

Nous suivons trois héroïnes, Léontine, Alice et Emma. La première veut être journaliste, si ce n’est que les hommes, qui se sont arrogés le droit de protéger les femmes, pensent que des mains de femmes ne sont pas faites pour taper à la machine – alors ne parlons même pas du sérieux qu’ils peuvent accorder à leurs articles. Léontine est donc obligée de signer « Léon », en attendant mieux, en espérant enfin s’imposer, et pas seulement pour écrire des articles de mode (si l’on cherche encore actuellement, le désir de cantonner les femmes à des domaines féminins est encore très fort). Alice est couturière, elle prend soin de sa mère qui ne s’est pas remise du choc de la première guerre mondiale. Le travail est dur, tout ce travail invisible effectué par les petites mains, et dont personne ou presque n’est conscient (ma grand-mère était couturière, ma grand-tante, dentellière). Pour Emma, la vie semble facile :  elle a épousé l’homme qu’elle aimait, elle est amatrice d’art, elle n’a aucun souci financier, mais elle est totalement sous la coupe de son mari, qui exige de tout savoir de ce qu’elle fait de ses journées, qui lui impose de ne plus fréquenter ses amies, qui veut absolument qu’elle reste à la maison.

Ce qui changera tout ? Des rencontres, avec d’autres femmes, qui veulent que la place des femmes évolue, qui voit qu’elles ne sont pas les seules, elles, françaises, à se battre, pour réparer les injustices qu’elles ont subi, pour faire avancer leurs droits. Ce n’est pas simple. Et la lecture de ce livre n’est pas simple non plus, parce que certaines scènes sont très dures, parce que l’on sait qu’un dénouement heureux, totalement heureux est quasiment impossible. L’intrigue montre aussi comment certains hommes peuvent véritablement soutenir le combat des femmes, soutenir les femmes, sans empiéter sur leurs revendications, sans se substituer à elle dans leurs luttes.

Vous l’aurez compris, ce n’est pas un livre léger, c’est un livre qui interroge, mais qui montre aussi à quel point les femmes peuvent faire avancer la société – la sororité n’est pas un vain mot.

 

Le diamant (S 607) de Jérémy Wegmann

Précision sans lien avec ce livre :

J’ai passé une semaine particulièrement douloureuse d’un point de vue personnel. J’ai aussi cumulé les soucis. J’ajoute que voir son médecin deux fois en deux jours n’est pas la chose la plus fun pour démarrer le week-end de la Pentecôte. Je déteste le mois de mai. Je n’ai qu’une hâte : qu’il se termine ! J’espère donc que l’auteur a de l’humour.

Présentation de l’éditeur :

Fabrice Duprat

La flotte française dispose de quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins : les SNLE, notre dissuasion nucléaire. Il y a également six sous-marins nucléaires d’attaque : les SNA, qui remplissent des missions de renseignement, des missions d’une grande sensibilité. Depuis quelques années, la France remplace ses six SNA de classe Rubis par une nouvelle génération de classe Suffren. Toujours six. Mais un septième manque à l’appel. Le Diamant (S 607) est un hybride entre cette classe Rubis et la classe Suffren, et, surtout, le seul qui officiellement n’existe pas. Caché du reste du monde. Je suis le commandant de l’équipage bleu de ce Diamant. Je suis le pacha.

Anne Lecourt

Je viens d’être nommée seconde du Diamant (S 607). Première femme à ce poste au sein de la Force océanique stratégique, la FOST. C’est ma première mission à bord de ce secret d’État.

Nicolas Hans

Je suis l’oreille d’or du Diamant. Je sonde les eaux où navigue notre soum. J’identifie le son de tout ce qui nous environne. Je sais identifier n’importe quelle menace.

Mon avis : 

J’espère bien que ce roman aura une suite ! Oui, je préfère le dire tout de suite : j’espère sincèrement revoir les personnages de ce roman, à commencer par Nicolas Hans, l’oreille d’or du Diamant, et Anne Lecourt, la seconde du Diamant.

L’action se passe en effet entièrement dans un sous-marin, et pas n’importe quel sous-marin, le joyau le plus secret de la flotte française, un mystère bien gardé, dont seuls une pincée d’élus connaît l’existence, un sous-marin hybride indétectable. Bref, nous sommes dans un huis-clos, et cela peut très vite devenir étouffant, surtout quand un incident vient tout remettre en cause. Je pourrai presque dire « accident », sauf que rien n’était accidentel dans ce qui s’est passé, que les secrets les mieux gardés peuvent se retrouver partagés presque malgré soi. Pardon ? Je ne suis pas très claire ? Je ne tiens pas à vous dévoiler l’intrigue, qui nous fait naviguer dans le présent de la mission (les sous-marins nucléaires se déplacent rarement pour des promenades de santé) et dans le passé des principaux protagonistes, passé récent (quelques semaines), ou passé plus ancien (dix ans). Cela nous permet aussi de connaître leurs états d’âme (pas le temps pour cela en mission, il faut être solide), leurs rêves, leurs aspirations personnelles et professionnelles. Cela nous permet aussi de mieux comprendre la manière dont ils réagissent face à ce qui se passe et qui n’était pas prévisible. Ce qui m’a intéressé aussi est la place qui est faite aux femmes dans la marine, et la forte misogynie qu’elles doivent encore affronter, si talentueuses fussent-elles.

Thriller ? Roman d’espionnage ? Roman psychologique ? Les trois sans doute !

Pour moi, un auteur à découvrir.

 

 

La Cité du savoir par Nadia Coste

Présentation de l’éditeur :

Sur l’île d’Hiklion, Sophia rêve depuis toujours d’intégrer l’école de Philopolis, la Cité du Savoir. Là-bas, elle pourra enfin apprendre à maîtriser la magie des mots ! De son côté, son meilleur ami Théo n’a jamais voulu apprendre à lire : son grand frère fait partie de ceux qui sont revenus de la Cité affectés par la dyspnoïa, une maladie mentale qui touche les étudiants recalés à l’examen final… Lorsque Sophia est admise à l’école, Théo embarque pour Philopolis afin de la protéger. À peine arrivé, il se joint à la guilde des voleurs qui résiste dans l’ombre à la magie des Penseurs. Mais ils découvrent que la Cité cache bien des secrets… et leur vision du monde s’en trouve ébranlée. Leur amitié résistera-t-elle aux épreuves qui les attendent ?

Merci à Netgalley et aux éditions Scrineo pour leur confiance.

Mon avis :

Ce livre pourrait sembler un conte de prime abord, puisqu’il nous montre, par le biais de la conteuse qui narre l’histoire et celui des enfants qui l’écoutent, la transmission orale d’un récit, presque en passe de devenir légendaire, si ce n’est qu’il est suffisamment récent pour que certains protagonistes soient encore là, et connus par la jeune génération.

Avant, il y avait une autre société sur l’île d’Hiklion. Elle était très hiérarchisée, et rares étaient ceux qui pouvaient ou voulaient étudier. « Pouvaient », parce que rares étaient ceux qui avaient la chance d’être sélectionnés pour intégrer l’école de Philopolis. Voulaient : parce que cela faisait peur aux parents, non parce qu’ils se retrouveraient avec des bras en moins, mais parce qu’ils craignaient la perte de l’enfant qu’ils avaient connu, si celui-ci échouait. En effet, tous les étudiants recalés se retrouvent atteints d’une maladie, la dyspnoïa, qui les privent de leurs facultés mentales et les rendent entièrement dépendants de leurs proches.

Les personnages principaux sont deux amis, et bien seulement des amis, quoi qu’en pensent ceux qui les entourent. Je trouve intéressant de nous montrer qu’un garçon et une fille peuvent être des amis, et le vivre très bien. L’autrice prend le temps de construire un récit qui dure, sachant manier l’art de l’ellipse, entre les étapes espérées et redoutées par les étudiants : les examens.

Le lecteur vigilant peut être inquiet, en relevant certains indices de cette société où commande la magie des Penseurs. Je pense, ainsi, au fait d’isoler de leur famille les enfants choisis pour étudier, que ce soit physiquement et moralement. Au contraire, la guilde des voleurs, eux qui résistent aux Penseurs, eux qui ont une autre version de leur histoire, ne cherche pas à couper les liens entre leurs membres et leur famille, elle leur enjoint simplement la prudence.

J’ai  beaucoup apprécié cette histoire, qui sait échapper à tout ce que l’on aurait pu prévoir, qui sait nous surprendre jusqu’au dénouement – parce que, comme l’a montré Sophia quand elle utilisait la proversion, ce pouvoir qui permet de lire l’avenir, tout n’est pas écrit d’avance, et bien des variations sont possibles.

 

L’homme apprivoisé

Présentation de l’éditeur :

La vie d’Erasmo Aragón change soudainement quand il est faussement accusé d’abus sexuel. Il perd son travail dans une université américaine et ne peut plus renouveler son permis de séjour. Après une crise nerveuse il rencontre Josefin, une infirmière suédoise, à laquelle il s’accroche désespérément. Afin d’oublier son passé, ils démarreront une nouvelle vie ensemble à Stockholm, mais les fantômes latino-américains, la monotonie, la dépendance et les anxiolytiques feront ressurgir la paranoïa…

Mon avis : 

Moronga est dans ma PAL, mais je ne l’ai pas encore lu. Je découvre qu’Erasmo, le personnage principal de L’homme apprivoisé, est aussi celui de Moronga. Pas grave : je lirai Moronga plus tard.

Nous découvrons une tranche de vie d’un personnage déraciné, un personnage en errance. Il ne va pas bien, Erasmo, si tant est qu’il ait, un jour, été bien. Il a la cinquantaine. Ayant quitté son pays, le Salvador, il travaillait dans une petite université américaine mais, à la suite de fausses accusations, il a été renvoyé. Son salut ? Josefin, son infirmière quand il a été interné. Ils vivent ensemble, puis, quand elle retourne dans son pays, elle lui propose de partir avec elle en Suède. Nouveau déracinement pour un homme qui tente de se reconstruire et qui ne parvient pas à se reconstruire.

Nous suivons l’histoire du point de vue d’Erasmo, à travers les méandres de son cerveau, qui, en période de crise, tord, retord, et distord tout ce qu’il voit, entend, à la fois à cause de ce qu’il a vécu dans son pays natal, à cause de ce qu’il a vécu dans le Wisconsin, mais aussi à cause des médicaments qu’il prend, ne prend pas, et des interactions avec l’alcool qu’il ne doit surtout pas prendre. Sa dépendance, affective, financière envers Josefin, la seule personne qu’il connait dans ce pays, n’arrange rien. Et Josefin, me suis-je demandé ? Qu’est-ce qui a bien pu pousser cette infirmière, mère célibataire d’une jeune adulte, à tendre la main à Erasmo ? Nous ne le saurons pas, parce que ce n’est pas le sujet du  livre, nous entendrons, comme Erasmo, ces constats, ces reproches aussi, ce qui le force, à (re) prendre sa vie en main.

Retrouvera-t-on ce personnage, délivré de ses calmants, de retour en Amérique du Sud un jour ? J’ai en tout cas apprécié ce mélange d’ironie et de lucidité qui préside à l’écriture de ces tortueux monologues intérieurs.

Merci aux éditions Métailié et à Netgalley pour ce partenariat.

Mort sur le fil Au service de Marie-Antoinette – 9 par Frédéric Lenormand

Présentation de l’éditeur : 

La saison des amours débute à Versailles ! Rosalie de Beauchamp, lectrice de la reine Marie-Antoinette, s’est éprise d’un courtisan du château. Hélas, le bellâtre ne peut lui accorder ses faveurs : un maître-chanteur détient des lettres compromettantes écrites par le jeune homme. Leur divulgation ruinerait sa réputation, et celle de Rosalie ! La Reine s’offusque. Qui ose ainsi entraver les passions naissantes de ses fidèles servantes ? Aidée de son fidèle duo d’enquêteurs, Rose et Léonard, elle concocte un plan pour dérober les lettres au maître-chanteur. Et quoi de mieux qu’un grand bal masqué pour faire diversion et attraper le malfaiteur ? Vêtue de sa dernière création – une capeline aux motifs pommes de terre, le nouveau légume à la mode à la Cour – Rose pénètre chez le maître-chanteur et lui dérobe les lettres. Méfait accompli ! Mais bientôt de jeunes parisiennes, toutes vêtues de la même capeline « pommes de terre », se font assassiner les unes après les autres…

Mon avis : 

Après avoir terminé ce livre, je n’ai eu qu’un regret : l’avoir terminé ! Je passe toujours de très bons moments en compagnie de Rose Bertin et de Léonard, ou plutôt devrai-je dire de Rose Bertin et de l’insupportable Léonard. Il n’a qu’une idée en tête : se débarrasser d’elle ! Non, il ne s’agit pas de la supprimer – même si Léonard est parfois tenté, et vive-versa. Non, il s’agit de marier Rose, et pour cela, Léonard se donnera encore plus de mal que pour enquêter pour la reine.

Marie-Antoinette n’aime rien tant que les amours heureux. Or, il se trouve que sa lectrice, lectrice particulièrement douée, ne peut épouser le jeune homme qu’elle aime parce que celui-ci est victime d’un odieux maître chanteur. Rose et Léonard se trouvent donc chargés de récupérer les lettres. Comme si c’était facile !!! Non, cela ne l’est pas, mais la reine, qui a bien d’autres choses à faire, notamment promouvoir la pomme de terre entre deux séances de coiffure et d’essayage de vêtements, n’en a cure. Ce qui n’était pas, mais alors pas du tout prévu, est qu’un meurtre, puis un autre ait lieu non loin de la demeure où vit l’odieux maître chanteur – et que les plus hautes instances soient chargées de l’enquête.

Oui, le récit est rempli d’humour, bien construit, rempli de rebondissements. Claustrophobe s’abstenir ! Il comporte aussi quelques piques, notamment sur la manière dont on pouvait utiliser la reine pour détourner l’attention des problèmes de budget que connait le royaume, et quelques aphorismes, comme le fait qu’il se trouve toujours une soeur qui a été désignée pour assister son génie de frère – voir, dans le texte, l’exemple de Parmentier. Note personnelle : elle n’est pas la seule dans l’histoire à avoir occupé ce rôle.

Un roman à déguster sans modération.

L’échange d’Eugénie Almeida

Présentation de l’éditeur : 

À la sortie d’un bar, une jeune femme menace un inconnu puis retourne son revolver contre elle-même et se suicide, ça ne regarde pas la police. “Tout au plus un épisode confus. Sans danger pour les tiers.”
Mais Guyot, le journaliste, s’obstine. Il veut comprendre. Il consulte des archives. Il lit les cahiers de la victime. Il cherche. Il ne voit pas les signaux d’alarme.
Parfois, il vaut mieux laisser tomber. L’importance du passé est surestimée. Si les gens restaient tranquilles, tout irait mieux.

Mon avis  (court, parce que je suis fatiguée par des bobos de santé qui s’accumulent) : 

Ce livre est percutant, efficace, que ce soit dans son écriture, sèche et cruelle, ou dans la construction de son intrigue. Un livre dont je n’ai pas vu passer la lecture tant l’action va vite, très vite.

Nous sommes en Argentine, et la dictature, ce n’était pas si loin. Il est encore des personnes qui sont nostalgiques de cette période, des personnes qui ont encore de lourds secrets à cacher, et des personnes qui sont assez bêtes pour vouloir parler de leur passé, sans penser aux conséquences – pour eux, pour les leurs, pour les autres. Surtout quand leur ami, leur protecteur est froid, cynique, et prêt à tout pour être totalement tranquille.

Il faut dire que ceux-ci, ces nostalgiques, ces profiteurs, ceux qui s’en sont mis plein les poches et ont profité aussi pour faire à peu près tout ce qu’ils voulaient, sont partout, y compris dans la police : il est dur de revenir à une vie où tous les coups ne sont plus permis. Dans ce roman, on n’est plus au stade où l’on ramasse les pots cassés, l’on en est à celui où, si l’on survit, l’on se planque le plus loin et le plus vite possible. Si l’on parvient à survivre.

J’ai tellement aimé ce roman que je suis allée emprunter à la bibliothèque un autre titre de cette autrice.