Mon avis :
Pendant le confinement, un journaliste a dit que plutôt que de regarder Netflix, il fallait mieux relire Hamlet. Cela signifie donc que ce journaliste (Guillaume Durand, pour le nommer) estime que tout le monde a lu Hamlet – et que, vraiment, sa lecture peut remonter le moral, distraire, pendant un confinement.
Pour ma part, ce doit être la troisième fois que je lis Hamlet. La première, c’était en 1995 pour le bac. La seconde fois, je ne sais plus, mais je sais que je ne l’ai pas relu quand j’ai vu Hamlet au théâtre. Cette mise en scène, je l’ai trouvé grotesque, avec une Gertrude ivre et un Claudius qui change le papier toilette dans les… toilettes lors d’une scène (c’était à la Comédie-Française pour les curieux). Bref, voici ma troisième lecture de l’oeuvre et un court avis, qui n’aura rien d’une analyse littéraire.
Peu de personnages féminins, si ce n’est Gertrude, la reine mère d’Hamlet, et Ophélie. Pauvre Ophélie ! Son frère parti étudier, elle reste avec son père qui lui donne quelques conseils : repousser Hamlet, même si celui-ci se dit amoureux d’elle, parce qu’il ne pourra jamais l’épouser. Sauf que, quand Hamlet commence à simuler la folie, Polonius, père d’Ophélie, se transforme en maquereau (l’allusion dans les répliques d’Hamlet sont claires) et tente de jeter Ophélie dans les bras d’Hamlet, pour prouver que les causes de la folie du jeune homme sont le dépit amoureux. Elle ne trouvera que le mépris d’Hamlet, et n’entendra qu’un autre conseil : entrer au couvent. Après l’assassinat de son père par Hamlet (il ne pensait pas tuer Polonius, mais pensait que Claudius les espionnait, lui et sa mère. Eh bien non : laissons un courtisan faire le sale travail), Ophélie sombre dans la folie, la véritable folie, et meurt. Accident ? Suicide ? Peut-on véritablement se suicider quand on n’a plus sa raison ? Son frère Laërte n’aura pu la sauver, ni se sauver lui-même.
Hamlet, c’est le triomphe de la mort. Seuls Horatio et Fortinbras survivront, c’est peu de personnages. La mort est là, dès les premières scènes, avec le fantôme d’Hamlet (le père) qui appelle son fils à la vengeance, vengeance qu’il ne pourra accomplir. C’est la scène première de l’acte V (mon sujet au bac de lettres en 1995, nouvelle épreuve spécialement créée pour les terminales L) dans laquelle les fossoyeurs exhument les ossements de Yorick, le bouffon dont il ne reste rien, si ce n’est le souvenir qu’en a Hamlet.
Hamlet, c’est aussi le théâtre dans le théâtre, avec cette troupe de comédien qui met en scène ce que le roi ne veut surtout pas voir, ne veut pas savoir. Certaines répliques seraient aussi des allusions aux conflits qui existaient entre différentes troupes de théâtre à l’époque de Shakespeare.
Et Hamlet, le personnage ? Rien ne serait arrivé si le roi l’avait laissé retourner à ses études ! Pourquoi le garder près de lui ? Pour mieux le surveiller ? Pour être sûr que le plus proche du trône ne fomente pas une rébellion contre lui ? Peut-être. Hamlet et sa folie, c’est aussi son incapacité à se venger, sa capacité à trouver toujours des prétextes pour reculer sa vengeance, avant de la mettre en scène : je pense à nouveau à la pièce de théâtre mais surtout au dénouement lui-même.
Ai-je aimé relire Hamlet ? Non, pas vraiment, pas cette oeuvre-ci en tout cas. Mon oeuvre préférée de Shakespeare reste La nuit des rois.