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La mort et un peu d’amour d’Alexandra Marinina

Mon avis :

Je commence cette série par la fin, ou du moins, par l’un des derniers tomes parus. Anastasia, l’héroïne, qui travaille dans la milice, va se marier. Sans grand enthousiasme, me semble-t-il : son compagnon (ils sont en couple depuis quinze ans) l’a demandé maintes fois en mariage, et c’est seulement maintenant qu’elle accepte, parce qu’elle se rend compte que personne ne la connaît mieux que lui, qu’il sait exactement ce qu’elle aime. Son petit frère Alex s’est débrouillé pour que lui et sa soeur puissent se marier le même jour. Pas dans le même bureau d’état civil cependant, puisqu’ils ne dépendent pas du même (subtilité russe – nous en apprendrons quelques-uns en lisant ce volume). C’est beau, la tendresse fraternelle. Cependant, Anastasia ne veut pas d’une grande fête, juste le minimum – en gros, le mariage ne prendra pas plus de dix minutes, et elle sera vêtue « comme tous les jours ». Note : je ne suis pas très mariage, mais je ne vois pas l’intérêt de se marier si on attache si peu d’importance à la cérémonie.

Tout se passe selon ses voeux. Tout ? Non : elle a reçu une lettre de menace, et si elle l’a signalé à qui de droit, il est hors de question pour elle de renoncer à se marier. Pire : un meurtre est commis juste après son mariage, et un second a eu lieu juste avant. Même si Anastasia est en congé, elle enquête tout de même, elle est même sur plusieurs affaires en même temps. Elle débauche même le photographe de la cérémonie pour l’aider ! Elle découvre ainsi qu’elle n’est pas la seule à avoir reçu une lettre de menace – mais la seule à avoir porter plainte, toutes les autres victimes pensaient connaître la personne qui les avait menacées.

Bien sûr, j’ai lu ce livre avec mon regard d’occidentale – et je n’ai pu m’empêcher de penser à la manière dont l’enquête se serait déroulée si nous avions été en France. Anastasia n’est pas à proprement parlé une enquêtrice, elle est une analyste qui ne va pas (encore) sur le terrain, ce qui explique certaines « bourdes » initiales. Sa vie privée et familiale envahit le roman – en est-il de même dans les autres tomes, ou est-ce seulement à cause de ses circonstances particulières ? Les moyens de communication entre les services sont très minces – même le téléphone fait défaut.

Plus encore, c’est une immense solitude qui se dégage de ce roman. La famille traditionnelle est aux oubliettes. Les mariages sont des sources de conflits entre parents et enfants – et parfois, ce sont les parents les mariés ou les re-mariés. Anastasia elle-même est issue de parents divorcés, et sa mère vit séparée de son second mari, du moins, jusqu’au début du roman. Quant aux couples, ils semblent parfois être davantage un partenariat plutôt qu’une union amoureuse – et les conjoints se méconnaissent souvent profondément.

En fait, peu de personnages sont véritablement sympathiques dans ce roman. Elia et Valeri, le jeune couple dont le mariage a été retardé, ne font pas exception à la règle. Il n’est guère que la mère de Valeri qui sorte du lot – et, malgré tout, Anastasia, capable de véritablement ressentir de l’empathie. Une dernière mention spéciale pour les trois « mafieux » qui complotent au parc avec leurs chiens comme témoin et prétexte.

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Le conseiller d’état de Boris Akounine

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Mon résumé :

1891. Le général Krapov est envoyé en Sibérie. A cause de lui, une jeune détenue s’est suicidée. Il ne se sent pas responsable, il ne pouvait imaginer qu’une femme qui n’appartenait pas à la noblesse pourrait être  sensible aux affronts ! Décidément, le général est un grand incompris. Il n’aura guère le temps de méditer : il est assassiné dans le train par Evariste Fandorine – ou plutôt, pour un révolutionnaire qui s’est fait passer pour lui.

Mon avis :

Ce livre est long, plus de 460 pages. Du coup, j’aurai aimé vous écrire une longue analyse, vous expliquant l’importance de ce récit, son intérêt historique et policier, et je m’aperçois que je n’ai pas grand chose à dire, et encore moins à écrire.

Je n’ai pas tremblé pour Fandorine, le héros, même si sa vie est plusieurs fois en danger. Il est « le » héros, et se sort indemne quasiment en toutes circonstances. Oui, il est un tout petit peu soupçonné de meurtres au début du roman, ce quiproquo tragi-comique ne dure pas longtemps.

Les personnages les plus intéressants sont sans conteste les révolutionnaires, avec Grine à leur tête, mais aussi le Bouvreuil, l’Aiguille. Leurs motivations leurs actes sont soigneusement analysés, et pour des personnes qui veulent vraiment faire changer les choses – ceux que j’ai nommés – combien sont devenus révolutionnaires par goût du danger ou par opportunisme ?

Je m’intéresse aussi aux personnages féminins. L’Aiguille, encore une fois, est de loin le plus intéressant. L’amour, au sens le plus large du terme, la guide, loin des préjugés qui devraient être ceux de sa caste. Elle est courageuse, fidèle, lucide aussi, entièrement dévouée aux autres. Et si elle est prise en défaut une fois – une seule fois – je mets au défi quiconque de ne pas l’avoir été à sa place. Esther est le nouvel amour de Fandorine, mais aussi le symbole de l’oppression à peine discrète subie par le peuple juif. Elle est le pendant féminin, protégée par la richesse de sa famille, de Grine – combien de temps durera cette protection ? Difficile à dire. Julie, quant à elle, pourrait symboliser le sort réservé aux femmes sans famille, sans appui. Julie n’est pas une maitresse-femme, elle se laisse entraînée par ses sentiments, sans réellement penser aux autres. Elle est l’antithèse de l’Aiguille.

Plus que l’intrigue policière, c’est la peinture de la Russie au XIXe siècle qui est intéressante. Nous assistons à une véritable guerre civile entre exaction tolérée, violence, torture. Tout est permis pour conserver la puissance du Tsar, et surtout de sa police. Désespérant ? Oui. Et l’impression que la Russie, en 2015, n’est toujours pas sortie de son chaos.

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