Archive | août 2016

L’incandescente de Claudie Huntzinger

Merci à Netgalley et aux éditions Grasset pour ce partenariat.

Présentation de l’éditeur :

L’Incandescente, c’est Marcelle, une adolescente vive, casse-cou, seize ans au début du roman, vingt-deux à la fin. Ce sont ses lettres écrites à Emma, la mère de la narratrice (la romancière Claudie Hunzinger), qui tissent la trame de ce roman d’amour. Autour de Marcelle et d’Emma, évoluent d’autres jeunes filles. Toute cette joyeuse bande est guettée par la maladie de ce temps, la tuberculose, ici vécue et racontée par une « enfant terrible », Marcelle, ce qui donne à l’histoire une hardiesse intrépide.
Il y a aussi dans ce roman un autre personnage clef, Marcel, le père de la narratrice, dont la face sombre et cachée se révélera soudain…

Préambule (long) :

Un partenariat, ce n’est pas exactement la même démarche que d’aller en librairie, chez le bouquiniste ou en bibliothèque choisir un livre. Déjà parce qu’on n’est pas sûre de l’obtenir – je n’ai pas cette prétention de penser obtenir chacune de mes demandes, mais qui ne tente rien n’a rien- ensuite parce que la rencontre peut être catastrophique, et il faut l’assumer. Pas possible de se dispenser d’écrire un compte-rendu. Tout ça pour en venir à dire que sans Irène, cousine de mon grand-père, morte de la tuberculose en 1944, je n’aurai pas demandé ce roman.

Mon avis :

Ce roman aurait pu être  présentée uniquement sous une forme épistolaire : c’est à partir des lettres retrouvées, échangées entre Emma et Marcelle que la narratrice retrace l’histoire des deux jeunes filles. Ce n’est pas le cas, fort heureusement : il y a une vie entre les lettres, après les lettres. Il y a, surtout, toute la période où elles furent ensemble et n’eurent pas besoin de s’écrire, les périodes de retrouvailles, et la fin de leur correspondance.

Je vous rassure : la narratrice ne nous gâche pas la lecture en nous racontant comment leur histoire s’est terminée. Si elle anticipe certains événements, ce sont uniquement ceux qui la concernent directement, elle, ses parents et ses frères et soeurs. Ou comment Emma, sa mère, a aimé Marcelle, puis Marcel, troublante homonymie. En lisant ce livre, nous découvrons à la fois l’histoire des deux épistolières, mais aussi l’histoire de la narratrice en train de lire ces lettres, de s’interroger sur l’attitude d’Emma, de le rapprocher de la manière dont elle se comporta envers sa fille, comportement dont elle ne détient pas encore l’explication, juste des interprétations possibles. Emma ne se laisse pas deviner si facilement, contrairement à Marcelle ou à Thérèse, une autre jeune fille dont elle fut très proche.

Oui, ce livre nous montre un univers presque exclusivement féminin, ce qui ne signifie nullement qu’il est niais ou éthéré. Les jeunes filles que nous croisons sont toutes les aspirantes enseignantes, les toutes premières quasiment, hussardes noires qui allaient être envoyées aux quatre coins de France, si leurs résultats le leur permettaient. Leurs résultats, et leur santé. J’ai eu envie de rentrer sur la pointe des pieds dans cet établissement où étaient envoyées Marcelle, Marguerite,Hélène et toutes celles qui n’avaient pas de prénoms, pour soigner leurs poumons malades. Elles sont unies, parce que quasiment seules avec la maladie, le médecin qui autorise ou non telle ou telle traitement selon la gravité de leur état. C’est Marcelle, toujours (forcément) qui écrit, avec une lucidité parfois effrayante. Nous ne sommes pas à la douce époque où l’on parle de pensées positives, de la volonté qui permet de guérir, et autres discours fades. L’on est à une époque où il manque l’essentiel pour guérir : un traitement réellement efficace. Nous voyons ces jeunes filles profiter de la vie malgré tout, malgré l’avis des médecins parfois. Marcelle parvient à faire rentrer, à travers les défis qu’elle se lance, à travers la nature qu’elle observe, une énergie poétique.

Ouvrir les portes des établissements de soin, ouvrir son coeur, dire ce que l’on a à dire, même si c’est définitif, ouvrir les armoires, les lettres, et ouvrir la fin du roman pour dresser un pont vers un autre roman. Qui sait ? Marcelle, l’incandescente, invite à ne pas renoncer, à vivre plus fort.

Haig, les guerriers perdus de Thierry Poncet

Merci aux éditions Taurnada et au forum Partage-Lecture pour ce partenariat.

Présentation de l’éditeur :

La belle Vanda nous l’avait mis profond. Elle avait fait exploser la mine d’or, mis le feu à notre campement et s’était enfuie avec l’argent. Le grand Carlo nous a fait promettre de la retrouver et de nous venger. Tous les sept, on a juré. Et je vais vous dire un truc : on n’aurait pas dû. Parce que des États-Unis à l’Afrique, des Balkans au Mexique, il nous a coûté salement cher, le serment !

Mon avis  :

Je persiste et signe : il est dommage que les romans d’aventures ne soient pas plus nombreux, et, surtout, pas plus reconnus. Pouvez-vous me citer un roman d’aventures contemporain ? Ce n’est pas évident alors que le XIXe siècle a eu Jules Verne ou Conan Doyle.

Haig est le narrateur de ses aventures, qui nous sont narrés après coup. Ces anticipations nous montrent qu’il a survécu. Il est rassurant de savoir qu’il vivra d’autres aventures, il l’est moins de savoir à quel point celles-ci seront douloureuses. Ou comment montrer que la vengeance, ce n’est pas si facile.

Le roman nous plonge tout de suite dans le coeur de l’intrigue, non comment les aventuriers ont rencontré Vanda, se sont liés avec elle, mais la trahison qu’elle leur a fait subir afin que le lecteur ressente, par la soudaineté des événements, la même stupeur que les personnages devant l’énormité de la traîtrise commise.

Se venger prend du temps – et peut-être les aventures vécues par Haig pendant ces années nous seront-elles un jour racontées. Carlo et les siens sont des aventuriers, pas des agents secrets ayant des moyens financiers et des renseignements à foison. Le temps fait évoluer les personnages, et certains ne sont plus aussi « partants », ils ont construit autre chose, ailleurs, loin des Philippines où a eu lieu leur serment originel. Ce « autre chose » se nomme le confort, la routine, l’enrichissement qui n’a rien de culturel.

S’il en est une qui n’a pas changé, quelque que soit le continent où elle sévit, c’est bien Vanda. Inchangée, et insaisissable. La parfaite femme fatale toujours entourée des personnes qui lui faut. Je vous dirai, bien sûr, que les péripéties racontées sont nombreuses et inattendues, ne serait-ce que pour regrouper les sept aventuriers, un peu comme d’Artagnan, de retour d’Angleterre, a dû à nouveau réunir les trois mousquetaires.

En conclusion, je me dis qu’Haig pourrait presque écrire un guide touristique de l’aventurier avec tous les voyages qu’il a effectué, par fidélité envers son serment. Si tant est, bien sûr, qu’un aventurier ait envie de lire un tel guide, plutôt que de voyager lui-même. En conclusion (bis), je ne dirai pas si Haig parvient ou non à venger les siens. A vous de le découvrir en lisant ce livre.

La prophétie de l’abeille de Keigo Higashino

Présentation de l’éditeur :

Un matin d’été, la voiture de l’ingénieur Yuhara pénètre dans le complexe de Nishiki Heavy Industries. C’est aujourd’hui que l’hélicoptère sur lequel il travaille depuis des années doit être livré à son commanditaire, l’Agence de défense du Japon. Sa femme et son fils l’accompagnent pour assister à la démonstration de vol. Yuhara se rend dans son bureau tandis que sa famille l’attend à la cafétéria en compagnie de l’épouse d’un collègue et de son petit garçon. Les deux enfants vont jouer dehors et réussissent à se glisser dans le hangar où se trouve l’hélicoptère, et même à bord de l’appareil. L’un des deux est encore dedans lorsque celui-ci se met à bouger. Bientôt, sous les yeux terrifiés de son compagnon de jeu, l’hélicoptère prend son envol. D’abord stupéfaits, les ingénieurs comprennent bientôt que l’appareil a été manipulé à distance. Moins d’une heure plus tard, l’hélicoptère s’immobilise au-dessus d’un réacteur nucléaire. Les autorités reçoivent un message signé de « l’Abeille du ciel » : l’appareil, chargé d’explosifs, s’écrasera sur le réacteur quand il aura épuisé son carburant si toutes les centrales du Japon ne sont pas mises immédiatement hors d’état de fonctionner…

Mon avis :

Ce livre, le dernier en date de Keigo Higashino (je l’ai acheté en poche au dernier salon du livre), est presque un roman d’anticipation – ou une dystopie, comme on voudra. Certains penseront aussi à un sujet pour téléfilm catastrophe : un hélicoptère télécommandé, un enfant à l’intérieur, une menace nucléaire…. Depuis l’écriture de ce roman, la catastrophe nucléaire est devenue une réalité, et j’aimerai savoir si cela a changé la réception du roman au Japon.

Pour ma part, vu de France, ce que je retiens – et qui est valable au Japon comme dans tout pays qui utilise le nucléaire – c’est à quel point on peut dépenser de l’électricité pour des choses que l’on n’aurait jamais envisagé avant (la climatisation à outrance, partout) et à quel point l’on peut en être dépendant, sans se soucier de la manière dont l’électricité est produite, le coût réel que cela peut avoir. Je reste persuadée que l’objectif de ce roman n’est pas seulement d’être un thriller efficace, mais aussi de nous amener à réfléchir sur nos propres pratiques.

Un hélicoptère près à être lancé sur une centrale nucléaire. Prouesse technique de la part des constructeurs mais aussi de la part de la personne (ou des personnes) qui ont détourné l’appareil. Frayeur, aussi, parce que les conséquences de la chute de l’hélicoptère sur la centrale ne sont pas réellement connues, juste imaginées, supposées, minimisées. Le trait de génie de l’auteur est d’avoir ajouté la présence du fils d’un des responsables de la conception de l’hélicoptère dans l’appareil. Qu’est-ce qui est plus capable d’émouvoir un terroriste (employons le mot) qu’un enfant  ? Enfin, si l’on parvient à croire que le sort d’une seule personne, que les parents ont été incapables de surveiller, puisse émouvoir quelqu’un qui envisage de causer de nombreuses victimes.

Il est des morceaux de bravoure dans ce roman, comme le sauvetage du jeune garçon. Il en est d’autres qui rappellent que le lien parents/enfants n’est pas si évident que cela – si, en France, le harcèlement n’est plus pris à la légère, ce n’est pas vraiment le cas au pays du soleil Levant. De même, la peur engendrée par le nucléaire est elle aussi passée sous silence, minimisée. Ce dont on ne parle pas n’existe pas.

La prophétie de l’abeille est un excellent roman, qui démontre à nouveau le talent de Keigo Higashino.

Asie2

Le businesss de Mr Jelly d’Arthur Upfield

Mon résumé :

Georges Lofthus a disparu. Son ami, monsieur Jelly, veuf et père de deux adorables filles, s’inquiète beaucoup alors que Mme Lofthus, la propre femme du disparu, ne semble pas si inquiète. Heureusement, Bony, en vacances non loin de là, prend les choses en main.

abc_policierMon avis :

Je le dis d’entrée de jeu, ce roman n’est pas mon préféré de la série. En cause ? Bony se montre beaucoup trop sûr de lui, jusqu’à la prétention, et c’est quasiment la seule facette de sa personnalité qu’il montrera de lui dans l’enquête, mis à part ses dons de traqueurs. Maintenant que vous avez eu cette petite précision, venons-en au coeur de l’enquête.

Déjà, nous savons que Bony est en vacances, seul, Marie Bonaparte, sa femme est restée à la maison, et ses trois fils vaquent à leurs occupations (étude ou travail selon leur âge). Apprenant la disparition inexpliquée d’un fermier (sa voiture a été retrouvée), il va aider la police locale, tout en dissimulant qu’il est un policier : les gens se confient davantage à un ouvrier de passage (il se fait engager parmi les « lapins », c’est à dire ce qui travaillent à la clôture de protection contre les lapins) qu’à un policier.

Sa méthode fonctionne-t-elle ? Bien sûr ! Il n’y a pas que cela, puisqu’un autre mystère hante la communauté : le business de Mr Jelly. Il disparaît trois à quatre fois par an, pour une durée indéterminée. Ce veuf (sa femme a été assassinée, son meurtrier condamné) ferait-il la fête, aurait-il une maîtresse cachée ? Difficile à dire puisqu’il revient de ses escapades plus riche qu’il n’était parti. Si Bony se mêle de cet histoire, c’est à la fois pour aider Eric, l’amoureux transi de Lucy, la fille aînée (pendant que Bony parle « meurtre » avec Jelly, lui peut rester seul avec Lucy) mais aussi Lucy, qui s’inquiète des absences de son père et de ses humeurs moroses à son retour. Je reconnais qu’il m’a fallu les deux tiers du roman pour comprendre en quoi consistait son secret, néanmoins, je l’ai trouvé, ce qui n’est pas si mal. Pour ceux qui n’y seraient pas parvenus, l’épilogue est particulièrement bien conçue – et nous questionne aussi, nous, lecteurs de 2016.

La petite communauté était-elle paisible avant l’arrivée de Bony ? Pas vraiment. Le chômage (déjà) était fréquent, le racisme logique ou presque – il ne dérange personne, et certains de s’indigner que Bony, un métisse, ait pu trouver du travail alors que tant de blancs sont au chômage. Les personnalités flamboyantes ne manquent pas, non plus que les couples atypiques et attachants. La farce y côtoie la tragédie.

Le business de Mr Jelly est une triple enquête réussie pour Bony, celui qui n’échoue jamais.

Rêves de liberté de Kim Soyeon

Présentation de l’éditeur :

Quand sa famille commence à parler mariage, Myeong-hye, treize ans, demande à partir étudier à Séoul. Grâce au soutien de son frère, elle obtient l’autorisation de quitter les siens. Très vite, et faisant face aux conventions sociales, elle devient volontaire dans un hôpital pour femmes. Car elle n’a plus qu’un rêve : devenir médecin. Mais le chemin est bien long…

Préambule :

La rentrée littéraire, c’est bien. Je le sais, j’y participe. Prendre le temps de lire et de chroniquer un livre remarquable, c’est bien aussi.

Mon avis :

Il est encore des adolescentes, heureusement, qui rêvent de devenir médecin. Toutes ne souhaitent pas devenir des starlettes de la télé-réalité ! Rêver de devenir médecin, dans les années 20, en Corée était quasiment un rêve impossible. C’est un des sujets du livre, mais pas le seul.

Qu’est-ce que la Corée en 1918 ? Un pays sous la domination japonaise. Envoyer son fils Myeong-kyu étudier au Japon est la réalisation d’un rêve pour le seigneur Song, un signe de modernité aussi, lui qui va bientôt être nommé préfet par l’occupant japonais. Pour ses filles, par contre, c’est une toute autre histoire, et je ne doute pas que le lecteur occidental ne s’étonne du sort qui leur est réservé. Pas d’études secondaires. Mariage à seize ans, dix-huit ans est vraiment un âge limite pour trouver un époux. Pas de prénom pour les filles, ce n’est pas utile. « Bébé » et « petite dernière » sont bien suffisants.  Pas ou peu de soin : les médecins sont rares, les médicaments onéreux, on devient vite un fardeau pour sa famille ou sa belle-famille, sauf si celle-ci est aisée. Madame Anh, la mère de Myeong-kye et de ses soeurs, est, comme toute femme coréenne, entièrement dévouée à sa famille, à son ménage, et a oublié toute volonté face à lui, exprimant les « rêves » d’une mère pour ses filles : « Une femme ne peut espérer mieux qu’épouser un fils de bonne famille, posséder de beaux vêtements, manger des plats délicats et avoir beaucoup d’enfants, affirmait-elle à présent ».

Myeong-hye doit se montrer particulièrement persuasive pour obtenir le droit de faire des études secondaires. Si elle trouve en son frère aîné un adjuvant puissant, elle doit faire face aux réticences, aux oppositions de ses parents. Si les traditions la font bondir, ce n’est pas le cas de sa soeur, qui peut se montrer elle aussi une opposante discrète. Quand j’ai lu certaines pages, et en dépit des différences géographiques, je me suis crue dans un roman de Balzac. Le message est clair : les choses ne peuvent bouger que si l’on veut bien s’en donner la peine. Rien n’est facile, surtout pas la liberté. Certains sont prêts à la sacrifier, ne s’apercevant même pas qu’ils ne la possèdent pas. D’autres paient des conséquences lourdes et durables. Et j’aimerai maintenant trouver un livre qui parle de l’émigration coréenne aux Etats-Unis, un peu comme Certaines n’avaient jamais vu la mer le fait pour l’émigration japonaise.

Rêves de liberté est un livre que je tiens vraiment à faire découvrir et à partager. La collection « matins calmes » des éditions Flammarion contient de belles pépites.

Asie2?????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????challenge jeunesse

 

Fais-moi cygnes

Le titre était facile… mais à quelques jours de la rentrée scolaire, écrire des articles plus légers en période de canicule peut être drôle aussi. Alors que je viens de nettoyer entièrement le sol de mon bureau, soigneusement barbouillée de rouge par les quatre papattes de Mirabelle (elles-mêmes furent lavées, mais pas avec le même produit, forcément), je partage quelques photos prises ces derniers jours.

Tout d’abord, l’équipe de natation synchronisé des canes normandes :

IMG_8856

Puis, la formation est rejointe par leur entraîneur en chef. Je vous laisse le reconnaître :

IMG_8862Autre lieu normand, autre cygne majestueux :

IMG_9022Ses rejetons ne sont pas mal non plus :

IMG_9020Voici toute la famille réunie :

IMG_9035Je termine par une vision du ciel normand :

IMG_8799Bonne soirée à tous !

Info chatons

Non, je vous rassure, je n’ai pas adopté un nouveau chaton. Simplement, après Galopin, adopté à une semaine :

Après Lisette, adoptée à deux mois et handicapée :

j’ai adopté Mirabelle, hautement normale.

Je vous épargne le gobelet de thé renversé, les livres éparpillés, les rideaux qui ont chu, les cartouches d’encre percées (et les empruntes de coussinets de la coupable), sans oublier diverses choses emberlificotées. Le tout, bien sûr, en deux jours, avec une énergie folle. Bref, Mirabelle est très en forme et s’entend presque bien avec Galopin et Lisette. Galopin, qui s’isole parfois au sommet de l’armoire, trouve que deux filles, c’est deux de trop – définitivement. Cependant, de temps en temps, il n’a rien contre le fait de partager un petit moment avec elles.

IMG_9008Bonne journée à tous !

Les mots entre mes mains de Guinevere Glasfurd

Merci à Netgalley et aux éditions Preludes pour ce partenariat.

Présentation de l’éditeur :

Quand Helena Jans van der Strom arrive à Amsterdam pour travailler chez un libraire, la jeune femme, fascinée par les mots, a appris seule à lire et à écrire. Son appétit pour la vie et sa soif de connaissance trouveront des échos dans le cœur et l’esprit du philosophe René Descartes. Mais dans ce XVIIe siècle d’ombres et de lumières, où les penseurs sont souvent sévèrement punis, où les femmes n’ont aucun droit, leur liaison pourrait les perdre.
Descartes est catholique, Helena est protestante. Il est philosophe, elle est servante. Que peut être leur avenir?

Mon avis :

Je dois avouer que le sujet m’attirait : un roman historique inspirée de la vie d’un philosophe français avait tout pour me plaire. Pourtant, je suis restée un peu extérieure à ce roman, que j’ai eu l’impression de découvrir par le petit bout de la lorgnette. Nous avons beau découvrir la vie quotidienne d’Helena, servante de M. Sergeant, libraire anglais en Hollande de son état, puis de Monsieur, son hôte français (Descartes), nous découvrons surtout ce qu’est être une domestique en même temps qu’Helena, qui n’était pas préparée à cette vie. Tâches (très) ingrates, mépris de tous, parce que servante, parce que femme, isolement, éloignement des siens, Helena ne vaut guère mieux, aux yeux de ses employeurs, qu’un objet qu’on se prête, et qui n’a guère de valeurs en lui-même.
Il faut attendre le tiers du roman pour que, dans cet univers feutré et meurtri, la vie d’Helena change – un peu. L’a rencontre de deux solitudes, de deux incompris, dirai-je, si le terme ne sonnait pas si moderne, si peu philosophique se noue en histoire d’amour. La lutte pour savoir (un peu) d’un côté, la lutte pour développer le savoir (de l’autre). Et les instants d’apaisement, de plénitude sont rares, très rares, en un temps où la quête du savoir pouvait mener à la prison ou à la mort.
Les mots entre mes mains (le titre est particulièrement évocateur) montre une époque dont on n’a plus vraiment conscience, à une époque où savoir lire, écrire est une évidence, où l’accès au savoir est extrêmement facile – du moins en France.  Un roman pour nous rappeler que tout n’a pas toujours été aussi simple, et que les auteurs que l’on étudie aisément aujourd’hui ont dû se battre uniquement pour pouvoir écrire.

Edit de 16 h 29 : voici quelques citations, pour vous permettre de mieux cerner le livre.

« J’imagine ce que ce serait d’écrire sans cesse, de remplir mes journées de mots. Cela paraît si incroyable de passer son temps ainsi, de ne pas avoir à tirer de l’eau, à préparer le feu, les repas, nettoyer, balayer, récurer. »

« Désormais, Monsieur, que reste-t-il ? Qui sommes-nous maintenant qu’elle n’est plus ? A-t-elle fait de nous ce que nous étions, plus que nous ne pouvions être ? Est-ce qu’une partie de nous s’en est allée avec elle ? Sa perte est un gouffre qu’aucun océan ne peut remplir ; un gouffre dans lequel l’océan se déversera à jamais.  »

« Je ne peux supporter que mes mots survivent et pas elle. « 

L’affaire Baskerville, tome 1 : une étude en Soie d’Emma Jane Holloway

Présentation de l’éditeur :

Evelina Cooper, la nièce de Sherlock Holmes, s’apprête à vivre sa première saison dans la haute société londonienne. Mais quand de terribles meurtres secouent le manoir de son amie et hôte, la jeune femme se retrouve plongée au cœur d’un complot remettant en question le monopole des barons de la vapeur sur la ville. Une enquête à hauts risques.

Mon avis :

Beaucoup d’auteurs s’inspirent des aventures de Sherlock Holmes. Pour certains, c’est une réussite. Pour d’autres, c’est un désastre. Heureusement, ce livre appartient plutôt à la première catégorie.
La bonne idée est de faire de Sherlock Holmes et de Watson (lui aussi est présent ainsi que sa femme) des personnages secondaires de l’intrigue, enquêtant sur une autre affaire, tout en se mêlant, parfois, à celle qui est en cours. La seconde bonne idée est de situer l’intrigue dans une Angleterre romancée, avec beaucoup de Steampunk et un peu de magie. Ne croyez pas cependant que l’enquête se résout d’un coup de baguette magique, ce serait vraiment faire offense à Sherlock Holmes, Sir Arthur Conan Doyle mais aussi Evelina Cooper, la nièce de Sherlock, une jeune fille absolument pas sotte.
Evelina est la fille de la soeur de Sherlock et Mycroft (les soeurs, que des problèmes, me souffle-t-on). Sa mère, qui était promise à un bel avenir, s’est enfuie avec un bel officier, qui se fit tuer au champ d’horreur. Elle ne tarda pas à le rejoindre, et c’est grand-mère Cooper qui éleva Evelina dans le cirque itinérant familial,jusqu’à ce que grand-mère Holmes ne la récupère afin d’assurer son avenir, qu’elle espère meilleure que celui de sa propre fille. Autant dire que ce n’est pas forcément gagné. Cependant, Evelina a une amie dans la meilleure société, Imogen. De santé délicate, sincère, la douce jeune fille, dont la soeur jumelle est décédée, est dotée d’un frère aîné turbulent et inventif, et d’un père dans la lignée du parfait aristocrate anglais, qui cache, de plus, de nombreux secrets. Est-il lié à la mort de la jeune servante ?
Ce n’est pas vraiment cette mort qui inquiète, ce sont les conséquences – les policiers, pire Sherlock Holmes qui menacent de fourrer leur nez partout et de découvrir quelques secrets. Sans parler d’Evelina qui sait bien que rendre justice à une simple servante est tout sauf chose aisée alors que les seigneurs de la vapeur, les véritables maîtres du royaume, ont d’autres chats à fouetter.
Evelina, de par son appartenance à deux mondes, est capable de faire face à des situations qu’une jeune lady ne pourrait même pas imaginer. Même si une romance se glisse dans l’intrigue, avec deux soupirants en prime, Evelina est capable, au fil de ses aventures, de juger de manière assez sévère l’un d’entre eux. Il est une grande différence entre devoir se faire tout seul et chercher un modèle parce qu’on n’est pas capable de penser par soi-même.
J’ai bien aimé lire ce premier tome, et je lirai sans doute la suite de cette « affaire Baskerville » dont, u final, on sait peu de choses à la lecture de ce roman.

logopolarssharon2

La jeune fille et la guerre de Sara Novic

Merci à Netgalley et aux éditions Fayard pour ce partenariat.

Mon avis :

Ce livre est certainement mon premier coup de coeur de cette rentrée littéraire 2016, j’espère qu’il y en aura d’autres. Ce roman en quatre parties nous raconte l’histoire d’Ana, une enfant presque ordinaire. Elle vit dans une famille aimante, mais peu aisée. Sa mère est professeur, corrige fréquemment des copies, son père a des soucis avec son travail, sa petite soeur Rahela, encore un bébé, a des soucis de santé certains. Oui, Ana serait une enfant ordinaire si elle ne grandissait en Yougoslavie, aux premières heures de la guerre qui déchira le pays. C’est sa voix que l’on entend, son quotidien. Elle mène une vie libre, sans entrave, joue avec Luka, son meilleur ami, sort pour faire les courses des adultes (des cigarettes !), s’habille en garçon non parce que ses parents en voulaient un, mais parce qu’ils n’ont pas les moyens de lui en acheter. Et le quotidien de la guerre n’est pas sans rappeler, pour ceux qui en ont lu les récits, celui de la seconde guerre mondiale : les alertes, les décentes dans les abris, les restrictions.

La différence, majeure, est que l’ennemi était intérieur, et que l’aide extérieur tarda à venir. Les journalistes étaient là, oui, et Ana ne les épargne pas dans ses commentaires. Les américains non plus. Là où d’autres leur reprochent de se considérer comme les sauveurs du monde, Ana, qui a grandi, leur reproche surtout de ne rien avoir fait, pas plus que l’ONU d’ailleurs.

Certains pourraient se plaindre parce que l’on sait, dès que la quatrième de couverture (et dès le début de la seconde partie) qu’Ana a survécu à la guerre. Il nous reste cependant à savoir comment elle a pu survivre, et comment elle parvient à (re) vivre. L’auteur aurait pu choisir de laisser l’imagination du lecteur combler l’ellipse entre la première et la seconde partie. Non, la troisième partie permet de découvrir ce que fut la vie d’Ana juste avant son départ pour les Etats-Unis, une partie qui permet de découvrir une réalité dont on a peu parler, lors de cette guerre qui était si proche de nous. J’ai aimé la façon dont le récit était raconté, de façon précise, sans volonté de surenchérir sur les descriptions. Ce que nous voyons (les mots font vraiment naître des images) suffit. Pas non plus d’analyse démesurément longue du ressenti d’Ana pendant ou après. ce qu’elle ressent, a ressenti, nous sera livré de manière simple, direct. Ana a parcouru un long chemin – mentalement. Elle en parcourt un autre – physiquement – pour son retour au pays natal. Cette réalité-là n’est pas montré souvent non plus, la reconstruction, le souvenir, al vie d’après pour ceux qui ont survécu et doivent vivre avec ou sans.

La jeune fille et la guerre est un livre sur le souvenir et sur la reconstruction, de pays et des êtres qui y vivent.