Archive | septembre 2017

La rivière des âmes perdues de James D. Doss

Présentation de l’éditeur :

Dans les montagnes Rocheuses du Colorado, une vieille femme indienne est troublée par des visions maléfiques. Très attachée aux croyances taditionnelles de son peuple, Daisy Perika a cette certitude : les forces des ténèbres sont à l’oeuvre… Le meurtre d’une jeune scientifique, non loin de là, dans la petite ville de Granite Creck, en est-il à l’épreuve ? Meurtre brutal et déroutant de l’avis de Scott Paris, chef de la police. L’enquête dangereuse qu’il s’apprête à conduire va le mener aux frontières d’un monde qu’il connaît, mais aussi de lui-même. C’est initialement par pure curiosité qu’il consent à rencontrer Daisy, la tante de Charlie Moon, un policier indien de la réserve voisine. Elle insistait tant pour être présentée au matukash venu de l’Est. En fait, dans ses rêves, la vieille femme a déjà rencontré Scott Paris. C’était sur la rivière des âmes perdues…

Mon avis : 

Amateur de série policière franchouillarde, adepte de la rationalité, du cartésianisme, passez votre chemin : ce livre n’est pas pour vous. Par contre, si vous aimez Tony Hillerman (cité par un des personnages, en forme d’hommage), Kirk Mitchell ou Craig Johnson, n’hésitez pas si ces livres croisent votre route, vous ne le regretterez pas.
Une jeune scientifique a été assassinée dans des circonstances particulièrement sordides, un suspect est immédiatement pourchassé par la police qui, il faut bien le dire, n’est pas forcément toujours à la hauteur. La situation ne serait pas si tragique, elle en serait presque risible, comme un running gag du suspect roi de l’évasion si des victimes collatérales ne se trouvaient sur sa route et si, finalement, il fallait bien se rendre à l’évidence : un suspect n’est pas un coupable.
Scott Parish est quelqu’un de rationnel, oui. Ou plutôt, quelqu’un qui ne veut pas s’abandonner à ce monde qu’il pressent, qu’il ressent. Il essaie de ne pas se raccrocher à ses sensations, et à écarter ce que lui a dit Daisy, la tante de Charlie Moon. Il a déjà suffisamment à faire avec les indices qui s’accumulent, les suspicions envers certains membres de l’université, trop polis, ou trop mystérieux pour être honnête. Je ne vous parle même pas de cette journaliste qui s’est invitée dans sa vie. Ambitieuse, Amanda vise plus haut que le journal dans lequel elle travaille, que les compte-rendu qu’elle écrit. Se servir de Scott Paris ? Non, pas vraiment – cependant, elle reste journaliste.
Oui, mon avis n’est pas très long, mais les oeuvres de James D Doss sont des romans que j’aime partager plutôt qu’analyser, surtout quand un auteur nous emporte ainsi dans son univers.

La mariée était en blanc de Mary Higgins Clark et Alafair Burke

Présentation de l’éditeur :

L’étrange disparition d’Amanda Pierce le jour de ses noces est un sujet tout indiqué pour l’équipe de Suspicion. Les invités, réunis dans le somptueux hôtel de Palm Beach en Floride où devait se dérouler ce mariage de rêve, sont tous au rendez-vous. Mais certains regrettent d’avoir accepté car les rumeurs se propagent et les petits secrets de chacun commencent à percer… Après le succès de L’Affaire Cendrillon, Laurie Moran, productrice de l’émission Suspicion qui reconstitue des cas d’affaires classées, mène une nouvelle enquête passionnante.

Mon avis :

Ce roman policier est parfait pour les personnes qui lisent peu de polars, pour ceux qui aiment les oeuvres par trop sombres, pas trop douloureuses, avec juste ce qu’il faut de rebondissement pour les tenir en haleine. Je dirai presque, pour les lecteurs réguliers de polars comme moi, une lecture de vacances, entre plusieurs oeuvres véritablement fortes.
Le problème est qu’à peine refermé, le livre est quasiment aussitôt oublié. Il s’agit d’un cold case – une disparition. Bien sûr, l’enquête, menée par une journaliste et non un policier, a lieu dans un milieu très aisé. Oui, les riches, les très riches peuvent aussi avoir de gros problèmes mais l’ensemble reste très aseptisé, à mes yeux. Je n’ai même pas l’impression qu’il y ait véritablement du suspens parce qu’avec Mary Higgins Clark, le lecteur sait bien que le coupable sera identifié.
Un livre à réserver aux fans.


Tombé du ciel de Nikki Goodwind

Présentation de l’éditeur :

Tous les repères de Ridge McCoy, un adolescent de seize ans, se sont écrasés et sont partis en fumée lorsque son père est décédé dans un accident d’avion. Il voit dans ce camp d’été de basket-ball une chance d’améliorer son jeu et d’échapper à ses problèmes quotidiens. Mais il prend un tournant inattendu lorsqu’il rencontre Micah Yougblood, l’homme qui tient le manège du centre commercial local et qui a pour réputation de dévorer les illusions hétérosexuelles des hommes en guise de petit déjeuner, accompagné de pancakes au chocolat.

Merci à Netgalley et aux éditions MxM Bookmark pour ce partenariat.

Mon avis :

Le livre pourrait s’appeler « un amour de vacances » mais non. Ridge participe à un stage de basket parce que son père est mort, parce que son petit frère capte toute l’attention de leur mère et que sa petite amie ne reste avec lui que parce qu’il a perdu son père et que rompre avec lui en ce moment ne serait « pas bien ». Ridge a cependant une image assez juste de ses dons de basketteurs : il deviendra coach, pas professionnel.
Il ne savait pas trop comment allaient se passer ces deux mois, jusqu’à ce qu’il rencontre Micah, un jeune homme tout sauf simple. Ce n’est pas qu’il est gay, non, c’est qu’il se refuse à entrer dans des cases – il tombe amoureux d’une personne, peu importe qu’elle soit une fille ou un garçon (enfin, il n’est pas encore à ce jour tombé amoureux d’une fille). Ridge se demande bien ce qui lui arrive, lui qui n’est pas gay, n’est-ce pas ? Il a une petite amie ! (Excuse classique, bien sûr).
Beaucoup de questionnement dans ce livre, qui pourront toucher les ados-lecteurs. Qu’est-ce qu’un couple gay, finalement ? Comment est-on censé se comporter (ou pas) ? Il est aussi difficile de le faire accepter aux autres que de l’accepter soi-même.
Il est question aussi de la culture indienne, ou plutôt de sa dilution. Micah vit dans une réserve, certes, mais qui n’a rien à voir avec les clichés que Ridge peut avoir en tête. Le grand-père transmet encore, oralement, les contes, sans se reconnaître dans ses petits enfants qui ne sont pas allés à l’école de la réserve, et qui, pour l’un d’entre eux, est gay. Difficile aussi de construire une famille : si Ridge n’a plus de père, Micah, lui, n’en a jamais véritablement eu.
Tombé du ciel est une romance qui sait éviter les clichés. Je lirai le tome 2 avec plaisir.

Mon ami Adèle de Sarah Pinborough

LOUISE
Mère célibataire, elle est coincée dans un quotidien minuté. Un soir pourtant elle embrasse un homme dans un bar… sans savoir qu’il est son nouveau patron.
DAVID
Psychiatre renommé et dévoué à sa femme, il regrette ce baiser mais ne peut s’empêcher de tomber amoureux de son assistante.
ADÈLE
L’épouse de David semble n’avoir aucun défaut. Si ce n’est de vouloir à tout prix devenir l’amie de Louise… Fascinée par ce couple modèle, Louise se retrouve malgré elle piégée au coeur de leur mariage. Et peu à peu, elle commence à entrevoir des failles.
David est-il l’homme qu’il prétend être ?
Adèle, aussi vulnérable qu’elle y paraît ?
Et par quel secret inavouable sont-ils liés l’un à l’autre ?

Mon avis :

Ma tâche est de vous donner envie de lire ce livre sans vous dévoiler la fin, qui, comme dans tout bon roman qui s’inscrit dans le genre policier,vous faire revoir tout ce que vous avez lu auparavant sous un autre jour.
Le début du roman semble pourtant nous orienter vers un récit plus intimiste. Nous rencontrons une femme, Louise, divorcée, seule avec son fils, qui a une aventure d’un soir avec un homme qui se révèle son patron. Elle découvre ensuite qu’il est marié avec une femme superbe, qu’elle est amenée à rencontrer et qui sympathise avec elle.
Qui sympathise avec elle, tout est là, Louise n’a pas souhaité se rapprocher d’Adèle, c’est Adèle qui, en fine stratège, se rapproche de Louise, qu’elle juge avec acuité, tandis que Louise a le jugement troublé par son sentiment de culpabilité. Elle est de plus à un moment douloureux de l’après-divorce : son ex-mari a refait sa vie et s’apprête à devenir père à nouveau. Autant dire qu’elle est une proie facile. Mais pour qui ? Et surtout, pourquoi ?
Si l’on peut lire en Louise comme dans un livre ouvert, Adèle et David ont bien plus de choses à cacher. Nous découvrons, au cours de retour en arrière, le passé commun d’Adèle et David – cette pauvre petite fille riche qui avait tout par ses parents, sauf leur attention. Cette lecture est vraiment très prenante, et j’ai été étonnée de la rapidité avec laquelle je progressais dans le récit qui sait maintenir le lecteur en haleine – et le surprendre très souvent.
Mon amie Adèle – lecteur trop sensible s’abstenir.

Sans défense d’Harlan Coben

Présentation de l’éditeur :

Un adolescent est retrouvé à Londres dix ans après avoir été kidnappé aux États-Unis. Que s’est-il passé ? Patrick et Rhys, amis et voisins, ont été kidnappés alors qu’ils jouaient ensemble. Leurs parents ont versé une rançon mais les petits garçons n’ont jamais réapparu, laissant les deux familles dans l’angoisse et le doute. Dix ans plus tard, à Londres, Win, l’oncle de Rhys, croit reconnaître l’un des deux garçons. Il appelle en renfort son meilleur ami, le détective Myron Bolitar. Ils retrouvent Patrick mais Rhys reste introuvable. Peut-il encore être sauvé ? Que s’est-il passé pendant ces dix années ? Pourquoi Patrick refuse-t-il de confier ce qu’il a vécu ?

Mon avis : 

Je n’avais pas lu d’aventures de Myron Bolitar depuis Peur noire (et encore, je l’avais lu en VO, c’est dire si cette lecture est ancienne). Je retrouve aujourd’hui Myron dans ce qui semble être sa dernière aventure : son neveu Mickey a dors et déjà pris le relais. Là, par contre, je ne peux rien dire : je n’ai lu aucune de ses aventures.

Oui, je suis déçue. De Myron, je préférais les toutes premières aventures jusqu’à ce que les intrigues basculent dans le grand n’importe quoi et que je décroche. Là, j’ai l’impression que ce livre a été écrit pour les fans de la série, ceux qui se languissaient de savoir ce qu’était devenu leur héros – et ce qu’était devenu Win, mon personnage préféré.  Alors oui, je n’aime pas trop la façon dont certains personnages ont évolué, ou plutôt ont régressé. J’ai l’impression qu’il a fallu, presque en catastrophe, décider de leur devenir. Ils sont là, fidèles au poste, et n’apportent pas grand chose à l’intrigue à mes yeux : j’aurai préféré rester concentrer sur Win, j’ai beaucoup aimé les chapitres dont il était le narrateur. Mais il fallait bien satisfaire tout le monde, et parfois, meubler, comme lorsque le passé de Myron est rappelé avec forces détails – ceux qui suivent la série depuis le début les connaissaient déjà.

Du coup, le récit policier passe au second plan. Après tout, nous avons presque à faire avec un cold case : les deux enfants ont disparu depuis dix ans et les enquêteurs officiels ont cruellement manqué d’efficacité. La réapparition de l’un des deux est un ressort très utilisé dans les romans policiers contemporains. L’intrigue reste presque classique pour un pays comme les Etats-Unis, et ne pourrait pas avoir lieu ailleurs. Non qu’il n’y ait des disparitions d’enfants dans d’autres pays ou sur d’autres continents – d’ailleurs, le roman nous entraîne en Europe, comme souvent chez Harlan Coben, mais la manière dont l’enlèvement et ses conséquences sont traités sont typiquement américains. Le roman reste efficace, cependant, j’ai tourné les pages rapidement, tout en notant des choses pas vraiment cohérents, pas vraiment possibles, comme dans ces séries américaines que l’on regarde et qui ne doivent leur efficacité qu’au fait qu’on ne s’attarde pas trop sur la construction de leurs intrigues.

L’épilogue laisse à penser que l’on s’arrêtera là, qu’il n’y aura pas d’autres aventures, puisque tout est bien qui finit presque bien. Je ne dirai pas « dommage », je dirai que je relirai peut-être les trois premières enquêtes de Myron Bolitar.

L’art de perdre d’Alice Zeniter

Présentation de l’éditeur :
L’Algérie dont est originaire sa famille n’a longtemps été pour Naïma qu’une toile de fond sans grand intérêt. Pourtant, dans une société française traversée par les questions identitaires, tout semble vouloir la renvoyer à ses origines. Mais quel lien pourrait-elle avoir avec une histoire familiale qui jamais ne lui a été racontée ?
Son grand-père Ali, un montagnard kabyle, est mort avant qu’elle ait pu lui demander pourquoi l’Histoire avait fait de lui un « harki ».

Merci à Babelio et aux éditions Flammarion pour ce partenariat.

Mon avis :

Il n’est pas toujours facile de chroniquer un livre que l’on a beaucoup apprécié, et que l’on quitte avec regret. Le personnage de Naïma m’a accompagné même après que le livre a été refermé, et pourtant, elle n’est pas vraiment le personnage principal du livre, plutôt l’initiatrice du projet qui lui fait remonter le temps et retracer l’histoire de ses grands-parents, puis de ses parents.
Je me suis sentie proche de cette histoire, parce que mes grands-parents aussi ont émigré. Eux ont fait le choix de ne pas retourner dans leur pays et, comme Naïma, je comprends mal le concept « d’immigrés de la seconde génération », ou le fait que l’on nous renvoie à nos origines – surtout quand les ponts ont été coupés, que la culture n’a pas été transmise, volontairement. Voici pour le paragraphe personnel.
Ce qui nous est donné à voir tout d’abord est la vie en Algérie du côté de ceux qui y étaient nés, qui y vivaient, qui ont dû choisir leur camp au moment où les « événements » ont éclaté. Choix qui n’a pas été facile puisque le but était de penser à l’avenir, tout en tentant de se prémunir des dangers du présent. Si nous avions été à leur place, qu’aurions-nous fait ? Vaste question. La vie, avant, était paisible, entre mariages, naissances et le passage du temps, qui amenait les récoltes.
Viennent le départ, l’arrivée en France, et toujours pour Ali le souci de protéger les siens. En lisant le sort des « harkis », je ne puis m’empêcher de faire des rapprochements avec la manière dont les réfugiés actuels sont traités – hasard du calendrier littéraire. Je ne puis m’empêcher de penser aussi que la manière de traiter les vaincus n’a guère changé depuis les camps qui accueillirent les espagnols en 1936.
La suite ? Les études, pour les enfants, l’intégration, les différences faites entre les garçons et les filles, sans s’en rendre compte. La vie qui continue en faite, avec en point d’orgue le mariage d’Hamid et de Noémie, ainsi que la naissance de leur quatre filles – dont Naïma.
Puis, la boucle est presque bouclée, avec le retour au pays (aux sources, allais-je dire) pour elle, comme s’il avait fallu d’abord remonter l’histoire de sa famille avant qu’elle franchisse la Méditerranée en sens inverse. Il y aura aussi des questionnements sur l’art, et ce qui légitime (ou non) tel ou tel artiste. L’histoire (des arts) écrite par les vainqueurs.
J’en ai déjà beaucoup dit, alors pour conclure, je dirai que je souhaite le meilleur destin possible à cette oeuvre.

Le meurtre d’O’Doul Bridge de Florent Marotta

Quatrième de couverture : 

San Francisco, sa baie, son océan, sa population cosmopolite. C’est dans cette ville de l’Ouest américain que Michael Ballanger a décidé de se reconstruire. Mais le voilà mêlé au meurtre d’un notable. Au moment de mourir, l’homme a composé un numéro, le sien. Alors la tourmente l’emporte. Réveillant les douleurs du passé.

Merci au forum Partage-Lecture et aux éditions Taurnada pour ce partenariat.

Mon avis : 

Michael est coach, pas un coach sportif, non, plutôt un coach mental, qui aide ses clients à reprendre leur vie en main. Fait important : il ne les leurre pas avec de beaux discours, il les met face à leur problème, leur contradiction, et cette manière de faire son métier ne plaît pas à tout le monde (« collègues » y compris). Cette méthode, qui lui assure un certain succès (et une émission de radio) a tout à voir avec le passé de Michael. Il doit vivre avec ce qui s’est passé en France, ce qui l’a éloigné de sa famille, avec cette blessure dont nous connaîtrons l’origine au fur et à mesure du récit.  On emporte toujours son passé avec soi.
Le présent se complique quand son dernier client en date est assassiné. La police interroge le french coach, la veuve interroge le french coach à son tour (beaucoup d’argent = beaucoup de pouvoir) et le french coach s’interroge parce que l’enquête n’est pas un modèle du genre – ou plutôt du genre « ne cherchons surtout pas trop loin ». Michael Bellanger va donc enquêter – à nouveau. Il va aussi renouer avec sa fille Karine, qui est venue lui rendre visite aux Etats-Unis. Il lui faudra concilier les deux. Comme les chiens ne font pas des chats, sa fille s’interroge sur les motivations de son père, et en cherche la cause dans ce passé qui l’a conduit à s’exiler. Elle s’interroge aussi sur Kim, call-girl, étudiante et assistante de son père – presque son coach personnel finalement.
Au cours de ses recherches, Michael croisera une galerie de personnages haut en couleur, qu’ils soient déterminés à lui nuire ou à l’aider. Mention spécial pour un journaliste particulièrement précautionneux, Milgram : c’est le prix à payer quand on veut vraiment faire éclater la vérité. Tout comme il est impossible de prendre son temps : cette enquête est aussi une course contre la montre, pour qu’elle ne soit pas définitivement enterrée. Mention spéciale pour la couverture, particulièrement bien adaptée au récit.
J’ai parfois pensé aux romans d’Harlan Coben en lisant ce roman, en ce qui concerne son rythme ou les caractères très marqués, hors normes de certains personnages – et pas seulement parce que le french coach a les mêmes initiales que Myron Bolitar. D’ailleurs, j’ai bien l’impression que l’on reverra Michael Bellanger pour d’autres séances de « coaching ».

 

 

 

 

Le dernier violon de Menuhin de Xavier-Marie Bonnot



Présentation de l’éditeur :

Rodolphe Meyer a été un célèbre violoniste. Le public l’adulait, les critiques l’encensaient. Il a été, il n’est plus. L’alcool a vaincu l’artiste. Reclus, il vit en compagnie du prestigieux Lord Wilton, qui fut jadis le violon de Yehudi Menuhin, modèle absolu de Rodolphe.
Un héritage va précipiter le destin de Meyer. Émilie, sa grand-mère, lui lègue une ferme isolée, dans l’Aveyron.

Mon avis :

C’est un curieux objet littéraire que nous avons dans les mains. Il est question de Yehudi Menuhin, oui, mais pas seulement. Il est présent, en filigrane, dans l’oeuvre, sans jamais être un prétexte pour évoquer le sujet principal du livre.
Et quel est-il, d’ailleurs ? La musique, l’amour de la musique ? La difficulté à jouer, jour après jour, à rester au sommet, à interpréter des oeuvres que des génies ont sublimé avant vous ? Rodolphe est un violoniste qui a lâché prise. Dernier membre vivant de sa famille, il revient dans l’Aveyron pour enterrer sa grand-mère Emilie, qui lui a légué une vaste bâtisse, et quelques secrets aussi. Il se rend compte qu’il l’a négligé, qu’il ne sais presque rien, finalement, de la manière dont sa propre mère, disparue elle aussi, a grandi dans cet endroit. A la recherche des souvenirs, de son passé ? Ou aussi, et de cet amour maternelle qu’il devait partager avec son frère aîné, mort de ses addictions, de cette part d’ombre, de sauvagerie, qui l’a dévoré.
Les relations mère/fils sont au coeur de ce roman, ainsi que les relations père/fils. Le père apparaît tout puissant, ambitieux, accomplissant ses rêves à travers son fils. Sa mère, ayant abandonné ses études contre l’avis de ses parents, est une simple femme au foyer qui ne s’oppose pas à son mari. Et Rodolphe de découvrir que sa mère était plus proche de sa propre mère (Emilie donc) qu’il ne le pensait, et que cette dernière pensait très souvent à son unique petit fils survivant, bien que celui-ci ait bien d’autres choses à faire que de venir au fin fond de l’Aveyron.
Puis vient l’irruption du fantastique – réussi, je dois le dire, s’appuie sur la légende de Victor, l’enfant sauvage. Victor, ce prénom se répercute dans le roman, passant d’un enfant mort-né en 1797 au frère d’Emilie, porté disparu pendant la première guerre mondiale, sans oublier cet enfant sauvage dessiné par Jean-Etienne, frère aîné de Rodolphe. Victor, encore, qui vient hanter Rodolphe dans l’Aveyron et s’avère presque son double, sa part de sauvagerie. Ce basculement dans une autre dimension, oscillant entre réel et étrange, assure une montée en puissance dans l’écriture du roman, après la dimension plus intimiste du début du roman.
Le dernier violon de Yehudi Menuhin

Dernier appel pour les vivants de Peter Farris

Présentation de l’éditeur :

Pour Charlie, ce ne devait être rien d’autre qu’une banale journée de travail à la banque. Pour Hicklin, ce ne devait être qu’un casse de plus. Histoire de se refaire un peu à sa sortie de prison. Pour sa petite amie accro au crack, peu importe, puisque de toute façon rien ne se passe jamais comme prévu. Surtout si, dès le départ, on tente de doubler ses partenaires de la Fraternité aryenne. Et puis pourquoi prendre le jeune guichetier en otage ? Maintenant, combien de temps faudra-t-il aux flics et aux membres du gang pour les retrouver ?

Mon avis :

Avant de chroniquer Le diable en personne, il me semblait logique/judicieux de chroniquer Dernier appel pour les vivants, le premier roman de Peter Farris. Un roman fort, violent, cruel, qui nous montre une des facettes de cette Amérique que l’on ne montre jamais, celle de la classe très moyenne, à la limite des laissez-pour-compte.
Charlie, le guichetier, passionné par les fusées, est un garçon très ordinaire qui ne s’en sort pas trop mal, sa mère travaille également, et même s’il y a du Tanguy en lui, il n’est pas vraiment à plaindre. Du moins, jusqu’à ce samedi matin où il a pris son travail, comme d’habitude, où la banque est braquée et où il est pris en otage – et non tué, comme sa collègue.
Il se retrouve alors plongé dans l’univers d’Hicklin, un dur, un vrai. Il sort de prison, il a une petite amie accro au crac, il est de mèche avec des membres de la fraternité aryenne qu’il tente de doubler. Ce n’était pas vraiment une bonne idée, le déchaînement de violence qui suit le prouve.
J’ai lu ce roman à un rythme assez lent, faisant des pauses assez longues entre chaque session. Est-ce pour cette raison que j’ai vraiment été sensibles à l’évolution de Charlie et, ans une moindre mesure, à celle d’Hicklin – ou le dernier baroud d’honneur d’un truand. Il faut dire aussi que Charlie se voit projeter dans le passé, et découvrir que tout n’est pas si lisse dans le passé de sa mère.
Un livre à lire pour les amateurs de romans noirs.

Nature morte avec pivert de Tom Robbins

Présentation de l’éditeur :

Leigh-Cheri, vingt ans, rousse, végétarienne, idéaliste et princesse de son état, vit en exil près de Seattle avec ses parents. Elle vient de quitter la fac, le cœur brisé par un membre de l’équipe de football et ne croit plus en l’amour. Mais alors qu’elle assiste à un festival écolo à Hawaï, au milieu des scientifiques et politiciens assemblés, elle rencontre Bernard Mickey Wrangle, hors-la-loi en cavale surnommé le Pivert. Il est roux comme elle, il veut dynamiter le festival, et il va lui prouver que l’amour existe.

Mon avis : 

Ce livre est le quatrième roman que je lis de Tom Robbins – il n’est resté que quatre mois dans ma PAL, ce qui est tout de même un progrès par rapport à ma vitesse habituelle à sortir un livre de ma PAL. Cependant, cette lecture est une petite déception.
La première partie (qui correspond aux phases I et II) est vraiment emballante, foutraque, mouvementée en un mot. Nous découvrons le Pivert, alias Bernard Mickey Wrangle, qui est un hors-la-loi bien décidé à ne tenir absolument aucun compte des lois, justement. Ni du verbiage dont les membres du festival semble avoir fait leur spécialité. Ces participants écolos, à une époque où on ne l’était pas temps que cela, parlent beaucoup, disent énormément d’ineptie et ne réfléchissent pas vraiment. Quant à écouter ceux qui ont un raisonnement qui se tient, on oublie ! Le Pivert, lui, est nettement plus directif : « Quand tu rends la société responsable, tu finis par te tourner vers la société pour trouver des solutions. Exactement comme ces pauvres névrosés du festival. On a tendance aujourd’hui à éliminer la responsabilité morale individuelle et à traiter les gens comme des victimes du contexte social. »
Il faut dire qu’à ce festival, le Pivert a rencontré une authentique princesse, Leigh-Cheri, fille d’un roi déchu qui ne pense plus qu’au poker, et d’une reine qui a attrapé quelques tics américains. Depuis la révolution qui a secoué leur petit pays, ils ont trouvé refuge aux USA, pays qui les espionne au cas où – et les bévues des personnes chargées de les espionner et d’interpréter leurs propos sont confondantes de drôlerie. Toute ressemblance avec des souverains déchus ne serait que coïncidence, bien entendu, cependant j’ai trouvé amusant que ce livre parle du duc d’Orléans, et de son frère Thibault, qui était encore vivant au moment où ce livre a été écrit. J’ai aimé aussi, dans un tout autre registre, qu’il soit fait allusion aux Enfants du paradis de Marcel Carné. J’ai aimé aussi les interruptions du romancier, aux prises avec sa machine électrique flambant neuve. On n’arrête pas le progrès ! « Si cette machine à écrire n’y arrive pas, eh bien je déclare que c’est foutrement infaisable ».
Cependant, après la phase III disparaît le Pivert, et nous retrouvons, par amour, Leigh-Cheri recluse volontaire dans le grenier familial. Elle ne fait rien, si ce n’est regarder la lune, et échafauder une théorie métaphysique au sujet du paquet de Camel dont Bernard, alias le Pivert, lui avait dit qu’il était son meilleur ami en cas d’enfermement. Son interprétation ésotérique m’a vraiment ennuyée et je n’ai vraiment retrouvé tout mon intérêt qu’au moment où le Pivert revient en scène, à quelques pages du dénouement.
Bien sûr, les fans de l’auteur retrouveront l’univers bien particulier de Tom Robbins, ses thèmes de prédilection, même ses manières de créer des péripéties dans l’intrigue (le lecteur n’est ni à une explosion ni à un départ pour le moyen-orient près). Je regrette simplement que ce tome n’ait pas eu, tout du long, la saveur des cent premières pages.