Nuit mère de Kurt Vonnegut

Quatrième de couverture

“Je suis américain de naissance, nazi de réputation et apatride par inclination.” Ainsi s’ouvrent les confessions de Howard W. Campbell Jr. qui attend d’être jugé pour crimes de guerre dans une cellule de Jérusalem. Ce dramaturge exilé en Allemagne est connu pour avoir été le propagandiste de radio le plus zélé du régime nazi. Mais il clame aujourd’hui son innocence et prétend n’avoir été qu’un agent infiltré au service des Alliés. Il lui reste désormais peu de temps pour se disculper et sauver sa peau.

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Mon avis :

Un homme. Une nuit. Sa vérité.

Howard Campbell va être jugé pour crime contre l’humanité, quinze ans après la fin de la seconde guerre mondiale. Il nous raconte ce qu’il a vécu, comment il a été engagé, comment il a œuvré, pour le compte des Etats-Unis, sans véritablement savoir les informations qu’il transmettait via ses émissions de propagande. Il a vécu aussi, eu des amis, vécu une grande histoire d’amour avec Helga, se montra cruel aussi (là, vous vous doutez bien que j’expose mon propre point de vue).

Mon premier constat est que ce livre est facile à lire, l’écriture, ou plutôt les paroles d’Howard coulent toute seule, les chapitres sont bien conçus et nous donnent envie de poursuivre la lecture – d’en savoir plus, finalement, sur cet homme. Et cette facilité de lecture me fait immédiatement penser à une chose : puisqu’il est si facile à lire, il lui a été facile, à lui, à d’autres, d’endoctriner d’autres hommes. Le pouvoir de la parole. Preuve en est que l’on peut devenir un héros aux yeux des autres, et pas pour les bonnes raisons.

Je ne peux qu’être effarée par ce que nous montre Kurt Vonnegut : le racisme et l’antisémitisme profond, y compris après la guerre, sévissent toujours, et il suffit de peu pour se liguer les uns contre les autres, voir les autres contre une seule personne. Préserver la « pureté de la race » n’est pas l’apanage du troisième Reich. Et l’étrangeté de certaines alliances ferait presque sourire n’était la gravité de l’enjeu.

Les paroles ne se sont pas envolés, les écrits sont restés aussi – les poèmes d’Howard, les lettres qu’il reçoit sont autant d’effet de réel pour confirmer sa carrière d’auteur et présenter une version de la vérité, non replongeant ainsi dans son passé. Howard ne se définit pas (seulement) en fonction de la guerre, il se définit en fonction d’Helga, de son amour inconditionnel pour elle, de la douleur liée à sa disparition. Un seul être vous manque et plus rien n’a d’importance.

Howard n’est pas un homme, non plus que son beau-père. Howard est un symbole, au même titre que ceux qu’il a dessinés, un jour, sur la fenêtre de son appartement, le symbole de ce que les hommes « de bonne volonté » n’ont pas pu empêcher – sans oublier les quelques « ratés » du rêve américain. Howard est le symbole, aussi, de la distinction entre justice et vengeance – justice qu’il  réclame, presque seul.

Nuit mère – ou la confession d’un homme infiniment seul.

Merci au forum Partage-Lecture et aux éditions Gallmeister pour ce partenariat.

6 réflexions sur “Nuit mère de Kurt Vonnegut

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