Archive | 23 avril 2014

L’empire des lumières de Kim Young-Ha

couv57027242Présentation de l’éditeur :

Kim Kiyeong, importateur de films étrangers, père de famille sans histoire, voit sa vie basculer à la lecture d’un haïku de Bashô. Les vers du célèbre poète japonais contiennent un message codé qui le replonge dans un lointain passé. Vingt ans plus tôt, Kiyeong quittait clandestinement la Corée du Nord pour infiltrer Séoul ; l’absence de mission a finalement fait de lui un « agent dormant ». Son brusque réveil le place au moment du choix : va-t-il obéir à l’ordre de rentrer en Corée du Nord, ce qui peut-être signe aussi son arrêt de mort ?

Mon avis :

Vingt-quatre heures dans la vie d’un homme. Vingt-quatre heures pour décider de son avenir, de façon irrévocable.

Vingt-quatre heures dans la vie de sa femme, aussi, que tout sentiment semble avoir quitté. L’amour ? Elle n’aime plus son mari depuis longtemps. La peur, le remords, la compassion ? Elle semble ne jamais en avoir éprouvé – voir le froid détachement avec lequel elle pense à l’accident qui a laissé son frère aîné handicapé, ou son incompréhension face à la mélancolie de sa mère. Il lui reste les regrets de la vie qu’elle aurait aimé mener, et son attachement à sa fille unique – vous me direz que ce n’est déjà pas mal.

Son mari, Kim Kyeong, est bien plus tourmenté, et avec lui, c’est toute l’histoire des deux Corées contemporaines que nous découvrons. C’est aussi tous les tourments d’un homme qui a toujours voulu servir son pays. Il repense à ses années de formation, à ceux qui l’ont formé, qu’il voit maintenant d’un oeil neuf. Il retrouve ses réflexes d’agent, mais il n’est plus l’homme qui, embarqué dans un sous-marin, a quitté la Corée du Nord pour infiltrer le Sud et aider au mieux d’autres agents à s’intégrer. Il n’est pas non plus un authentique coréen du Sud. S’il est capable de se fondre dans la masse, de respecter leur code, de capter les modifications du langage, des comportements – et de voir les différences avec le Nord – il n’est jamais pensé comme un coréen du Sud, il est toujours resté extérieur à ce qu’il étudiait. Prêt à retourner d’où il vient ? Il en sait les conséquences, qui n’ont rien à voir avec le MI-6 des James Bond. Il sait aussi les conséquences s’il reste – pour lui, pour les siens.

Mais qui sont les siens ? Sa femme, sa fille, brillante lycéenne ? Ou son père, ses frères, restés au Nord ? Et si la cause de son comportement (un agent sûr de lui n’aurait pas hésité) n’était pas à rechercher des actes qu’il a dû commettre, et surtout, dans un acte, fondateur pour lui, dont il fut le témoin et la victime ?

Beaucoup d’interrogations, parce que le personnage principal n’a cessé de s’interroger, là où d’autres avaient des réponses toutes prêtes, et des solutions radicales, prouvant que l’honneur, la richesse, comptait plus que la vie humaine.

L’empire des Lumières est un roman passionnant, à découvrir pour tous ceux qui aiment la littérature asiatique.

 

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