Les eaux noires d’Estelle Tharreau

Présentation de l’éditeur : 

Lorsque les eaux noires recrachent le corps de la fille de Joséfa, personne ne peut imaginer la descente aux enfers qui attend les habitants de la Baie des Naufragés.
L’assassin restant introuvable, à l’abri des petits secrets et des grands vices, une mécanique de malheur va alors tout balayer sur son passage…
Les révélations d’un corbeau, la détresse d’une mère et le cynisme d’un flic alimenteront l’engrenage de la rumeur, de la suspicion et de la haine.
Joséfa réussira-t-elle à survivre à la vérité ?

Mon avis : 

Ne pas sombrer dans les clichés en rédigeant un avis : tout sauf facile. Je pourrai vous dire qu’Estelle Tharreau sait se renouveler à chaque roman, montrant à chaque fois toute la palette de son talent. Ce serait dit, et je serai tranquille, je pourrai aussi réutiliser la formule pour Il était une fois la guerre, son nouveau roman, que je vais chroniquer prochainement. Ce serait, cependant, réducteur.

Nous sommes dans la Baie des naufragées, et une jeune fille de 17 ans vient d’être assassinée. Une de plus. Si ce n’est que l’enquête piétine. Une de plus. Les médias sentent bien, cependant, qu’ils tiennent une « bonne » affaire – la mort d’une jeune fille fait toujours vendre, il suffit de savoir s’y prendre. Seulement voilà, Joséfa, la mère de Suzy, la victime, n’est pas une « bonne cliente » pour la presse, loin de là. Elle n’est pas la figure de la mère courage, prête à se montrer dans les journaux, à la télévision, pour que l’on n’oublie pas sa fille, voire même pour qu’on la réhabilite. Oui, si l’on ne peut pas placer une victime sur un piédestal, pourquoi ne pas la mettre plus bas que terre ? C’est ce que tout ou presque vont faire, comme s’il était plus acceptable de ne pas trouver le coupable si la victime avait mérité son sort. Horrible ? Oui. A nous, lecteurs, de nous interroger sur ce que nous trouvons acceptable, ou pas, en matière de justice. Liberté, égalité, fraternité ? Cela dépend – pour qui. Et Suzy ne sera pas la seule victime jugée « indigne ».

Est-ce une manière aussi pour les habitants de se protéger ? Du moins, c’est un moyen de ne pas s’interroger, parce qu’il apparaît que le coupable est sans doute l’un d’entre eux. Tous ont quelque chose non pas à cacher, mais quelque chose qu’ils n’ont pas vraiment envie de révéler. Ils sont tellement centrés sur eux-mêmes qu’ils ne se disent pas qu’il suffirait qu’ils parlent, peut-être, qu’ils révèlent certaines choses, sans doute, pour que peut-être l’enquête avance. Non, tant qu’ils dorment tranquilles, chez eux, en se disant que ce n’est pas leur faute, que le responsable, c’est l’autre sans doute, tout va bien. Tout va même très bien. Jusqu’à ce qu’un corbeau se manifeste et renforce le climat nauséabond qui régnait dans la baie des naufragés.

Ce n’est pas que l’enquête prend son temps, c’est que l’enquête prend du temps, nous rappelant que la vie n’est simple, que la résolution d’une enquête ne panse pas nécessairement les plaies. Peut-être que je spoile un peu. Mais qui peut vraiment croire que l’identification d’un coupable résout tout ?

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