Mon avis :
J’ai l’impression, en rédigeant cette critique, que mon habit de professeur est encore sur les épaules – si tant est que je porte réellement un habit de professeur. Et pourtant… je ne peux pas m’empêcher de me dédoubler et de me dire : que penseraient les parents et les enseignants en lisant ce livre ?
Pour les parents, c’est très simple : il réagiraient exactement comme les parents d’élèves de ce livre. Certains soutiendraient « la remplaçante » qui permet à leurs enfants de s’épanouir. D’autres seraient totalement contre elle. Au milieu, les indécis, qui ne sauraient pas vraiment dans quel camp se ranger.
Songez-donc : Melle Bonjour est arrivée dans la classe d’Héléna. Elle est arrivée un peu en retard mais elle est arrivée de façon flamboyante, sur sa moto, et remplace la maîtresse qui était moyennement appréciée des élèves. C’est son premier remplacement, et ceci explique peut-être qu’elle ose. Elle ose confronter ses élèves au théâtre, à la scène, et elle décide de leur faire récrire Corneille, bref, de leur faire jouer une version plus que dépoussiérer du Cid.
Alors oui, les dictées, les exercices de grammaire, l’arithmétique et la géométrie vont un peu passer à la trappe, ces apprentissages jugés indispensables et très rassurants pour les parents d’élèves. Oui, la maîtresse se laisse débordé par tout ce qu’il faut faire pour maintenir la cohésion de groupe, l’ordre, la discipline, ne pas vexer les élèves qui n’auraient pas réussi à décrocher un des rôles principaux et aussi pour assurer la sécurité des élèves (certaines activités ont des conséquences inattendues). J’ai aimé le personnage d’Héléna, la jeune narratrice, toujours juste, toujours touchante, bref un personnage qui agit comme un enfant de son âge, ni plus, ni moins.
Et Corneille, dans tout cela ? Costume de professeur sur le dos, je vous dirai que nous sommes bien loin du texte original et que les puristes hurleront au sacrilège – oui, ceux-à même qui m’ont demandé un jour si mes élèves saisissaient les beautés des diphtongues dans le Bourgeois gentilhomme de Molière (vraie question qui me fut posée). Mais les élèves ont compris l’esprit de l’oeuvre, ils ont compris de quoi parlait le Cid. N’est-ce pas le plus important ?
Une oeuvre drôle, émouvante parfois, qui nous montre aussi comment les adultes projettent leurs propres angoisses sur leurs enfants.
Mais qui est assez pervers pour te demander si les élèves saisissent la beauté des diphtongues dans le Bourgeois gentilhomme ? 😂😂😂
Un collègue professeur de lettres modernes croisé en formation qui lui, visiblement, le faisait. Le genre « illuminé » dont les élèves sont formidables et ont le niveau pour passer le bac en 4e.
Je vois le genre !
Dommage, les miens sont actuellement en dépression après les exercices type brevet du jour. Mais, au moins, nous avons dialogué et échangé au sujet des points délicats.
C’est aussi à ça que ça sert, même s’ils se mettent la pression en général.
Nettement moins cette année que les années antérieures. Voici deux ans, j’avais une élève très sensible, excellente, et qui m’avait pris un paquet de mouchoirs juste pour une répétition de l’oral blanc.
Parfois, on ne s’attend pas à une telle réaction. Ils sont sensibles nos petits !
Venant de sa part, je m’en doutais. Elle avait déjà dit à ses parents, en réunion parents professeurs : « papa, maman, je veux amortir le choc, je suis très mauvaises en français, mes difficultés sont insurmontables.
– Bonjour madame et monsieur, votre fille frôle les 19 de moyenne. »
Oui, je vois bien, j’en ai une aussi comme ça.
Elles sont plus nombreuses qu’on ne le dit – et l’on parle toujours plutôt de ceux qui posent problème.
C’est vrai !
J’ai cru que les diphtongues étaient une saloperie d’insectes qui ravageaient les cultures de pommes de terre ! 😆 Même avec Wiki, j’ai pas tout compris…
Heu, moi je m’en fiche des insectes qui bouffent le potager, je trouve que ça peut être chouette de dépoussiérer une pièce avec les élèves ! Et la prof, je pense que nous aurions aimé l’avoir !! :p
Sur le coup, quand il m’a dit ça, j’ai trouvé qu’il y avait franchement plus important – comme le plaisir de jouer une pièce de théâtre, par exemple.
Oui, moi aussi ! Et j’espère que mes élèves aiment ce que l’on fait !
😂😂😂