Archive | 7 décembre 2019

Hercule, chat policier – Panique au poulailler ! de Christian Grenier

Présentation de l’éditeur :

Qui profite de la nuit pour voler les oeufs et les poules de Thibault ? Puisque les humains sont incapables de le découvrir, Hercule le chat décide d’enquêter.

Mon avis :

C’est un roman de littérature jeunesse, et je l’ai trouvé un peu court – parce que j’aurai aimé passer encore un peu plus de temps avec Hercule, Joyeuse, Albane et Brutus. Je me doute bien que ce n’est pas facile d’écrire pour un jeune public : un roman policier, oui, mais sanglant, non. Si la triste réalité de la vie des poules en élevage industriel est évoquée, en revanche aucun volatile ne sera blessé pendant l’enquête. Dit ainsi, cela ressemble à un avertissement pour film de la part de la SPA, cependant il est important de ne pas dire qu’il est normal d’avoir recours à la violence dans les polars – et peu importe contre qui cette violence est dirigée. La vraie violence, ici montrée, est celle qui condamne les poules au bout d’un an, parce qu’elles ne sont plus assez productives. Je note aussi l’apparition d’une renarde et de ses renardeaux, qui eux aussi seront laissés tranquilles, juste écartés du poulailler par les bons soin du Roi (le coq) et des humains. Brutus ? Très occupé à dormir pendant toute l’intrigue. Ce n’est pas que les chiens policiers sont en vacances, c’est que Brutus est avant tout le chien d’un policier.

Alors oui, des oeufs disparaissent, puis des poules : il est difficile de déranger la police pour cela puisqu’il faut déjà prouver la disparition des oeufs, et non une simple baisse momentanée de la ponte. Il faut aussi se demander qui vole, et pourquoi. Ce n’est pas que voler ne soit pas grave, c’est que l’intention dans lequel ces vols ont été perpétrés est intéressante : le récit montre que l’intention compte aussi, même si elle n’est pas exempte de maladresse.

Ou comment les fans de Logicielle peuvent ainsi faire découvrir à leurs enfants les enfants de Logicielle (oui, j’aime bien faire ce petit rappel).

 

Il vous suffira de mourir, tome 1 et 2 de Jean Failler

Présentation de l’éditeur :

Un singulier concours de circonstances amène Mary Lester sur les bords du lac de Guerlédan, en centre Bretagne : la voiture de son ami Lilian, qui venait la retrouver pour une semaine de vacances, a été accidentée en traversant le bourg de Saint-Gwénécan et le voilà immobilisé. Elle vient donc le récupérer pour aller, comme prévu, faire de la voile à la Trinité-sur-Mer, mais au cours de la nuit qu’elle passe au motel des Forges, sur les bords du lac, elle est témoin d’une scène troublante : la jeune et jolie hôtelière est victime d’un coup de téléphone anonyme qui la déstabilise complètement. Le même soir, son compagnon, qui avait disparu, réapparaît en piteux état en compagnie d’un type inquiétant, et ne s’explique pas sur le motif de son absence. Il n’en faut pas plus à Mary Lester pour subodorer quelque chose de louche.

Mon avis :

Les vacances, ce ne sera pas encore pour cette fois – ou alors, d’une drôle de manière. Mary Lester attend son ami Lilian pour partir faire de la voile, mais celui-ci a un accident dans un petit village. Personne pour témoigner, faire un constat, même le policier municipal ne met pas vraiment du sien pour dresser le susdit constat d’accident. Seule une jeune femme, Claire, nouvelle venue dans les lieux, se range du côté de Lilian, une jeune femme, arrivée depuis un an et depuis, victime d’appels anonymes. Bref, rien ne va, alors que tout aurait pu être très simple si, et seulement si, ce simple constat avait été rempli.

Mary Lester arrive dans un microcosme villageois où le temps semble s’être arrêté. Les gendarmes ? Tant que les menaces restent verbales, ce n’est pas bien grave, et si la jeune hôtelière n’est pas contente, elle n’a qu’à déménager. La réponse vous choque ? Tant mieux, parce que c’est pourtant quelque chose qui est tenu pour admis, encore et toujours : chercher du côté de la victime plutôt que du coupable. Vous me direz que, de nos jours, avec la présentation du numéro et autres systèmes qui nous permettent de savoir quasiment à coup sûr qui nous appelle, cela ne peut plus arriver. Certes. Cependant, le cyberharcèlement a remplacé le harcèlement téléphonique, et c’est tout aussi pénible. Quant au compagnon de la jeune femme, il lui arrive aussi quelque bricole. Porter plainte ? Non. Personne ne porte plainte, soit parce que cela ne sert pas à  grand chose, soit parce que l’on ne veut pas perdre la face.

Puis, une autre affaire occupe les gendarmes depuis deux ans : la disparition de deux garde-chasse. Rien ne prouve qu’ils sont morts. Rien ne prouve non plus qu’ils soient vivants. Depuis deux ans, les gendarmes ont une seule et unique piste : les braconniers. S’il est bien un secteur économique qui ne connaît pas la crise, c’est bien celui-là. Seul problème, et de taille : impossible de les coincer, ils ont toujours une longueur d’avance, même en cas de barrage routier. Impossible aussi de les impliquer dans la disparition des garde-chasse, puisque pas l’ombre d’un indice ne les implique – à commencer par l’absence de corps.

Mary Lester, dans le cadre de la collaboration gendarmerie/police (rappelons-le : le ministre de l’époque y tenait particulièrement) se retrouve à enquêter à son tour, et l’on n’attend qu’une chose d’elle : qu’elle se plante. Non, on ne le lui dit pas, voyons, pas devant elle, non, mais elle le comprend aisément. Alors oui, elle explore une piste qui ne l’avait pas été. Pourquoi ? Les gendarmes ont-ils vraiment été aussi butés, ou aussi aveugles ? Difficile à dire. Dans un tout autre roman, avec une enquêtrice pour qui « la loi est la loi », le dénouement aurait été tout autre. Mary fait un choix, un choix implicitement soutenu par la gendarmerie – pour une fois qu’elle obéit à un ordre.

Un échec de Mary Lester ? Pas vraiment. On lui avait demandé d’enquêter sur les braconniers, elle a enquêté sur les braconniers ! Alors oui, l’économie parallèle locale, l’équilibre fragile qui régnait dans les villages se retrouvent déstabilisés : ils ne l’auraient pas été si, quelque part, l’école, les services sociaux n’avaient pas été mis en échec. Pour que certains mènent une vie dite « normale », il aurait fallu lutter contre l’alcoolisme, empêcher la guerre d’Algérie (vaste programme), ne pas laisser les instituteurs de village aussi seuls qu’ils l’ont été. Vaste sujet. Et une seule personne ne peut remédier à tout, plusieurs peuvent essayer d’éviter que les problèmes ne soient encore plus nombreux.