Archive | 31 août 2018

Black out de Cécile Delarue

Présentation de l’éditeur :

Los Angeles, années 1980. Le crack a envahi les rues de South Central, un quartier noir, le plus pauvre de la ville. Cinq ou six tueurs en série sévissent en même temps sur ce territoire abandonné de tous. Parmi eux, celui que la presse a surnommé le Grim Sleeper. Son premier meurtre date de 1985, son dernier de 2007. On lui connaît dix-sept victimes, dix-sept femmes noires. Seules deux d’entre elles ont survécu. Quand Cécile Delarue arrive à Los Angeles en 2010, il vient d’être arrêté. Mais c’est aux victimes qu’elle décide de s’intéresser. Elle s’immerge dans leurs vies, rencontre leurs familles, retrouve l’une des survivantes, et retrace avec elles et tous les autres protagonistes de l’affaire (policiers, magistrats, militants…) la longue traque du tueur.Une plongée vertigineuse dans un pays en morceaux, où Noirs et Blancs, riches et pauvres vivent séparés, où la défiance ronge tous les liens.

Merci aux éditions Plein Jour et à Netgalley pour ce partenariat.

Mon avis :

Les tueurs en série fascinent. Ils sont les héros de films, de romans, et leur psychologie est plus ou moins construite. En bref, ils ont élevé au rang de héros. En découvrant Black out, ce qui m’a tout de suite plu dans ce livre qui n’est pas un roman mais une véritable enquête, c’est que son centre d’intérêt était les victimes. Celles qui sont toujours les grandes oubliées. L’auteure n’est pas la seule à avoir écrit un livre, un documentaire sur ce tueur qui a sévi pendant des décennies. Elle cherche à savoir pourquoi il a fallu tant de temps pour qu’il soit arrêté, comment la police a enquêté, les magistrats ont instruit cette affaire – explorer ces trois axes n’a pas été simple. Elle nous parle un peu d’elle, aussi, des raisons qui l’ont poussé à vivre aux Etats-Unis, de sa vie, là-bas, pendant ces recherches, mais ces instants de sa vie ne parasitent jamais le récit.
Les points essentiels de cette affaire sont peut-être les suivants : les victimes sont noires. Les victimes sont pauvres. Les victimes vivent à Los Angeles, pas dans les quartiers qui font rêver, non, dans les quartiers à la limite de l’insalubrité, pour lesquels les riches citoyens de la ville n’ont pas vraiment envie que leurs impôts soient dépensés. Dans ces quartiers – aussi – la police est débordée et manque de moyens.
L’auteure n’a pas baissé les bras lorsqu’elle faisait des recherches pour écrire son livre – certains estiment que tout a été dit, d’autres ont des réflexes communautaires. Parler n’est pas si facile que cela, comme le lui confiera une survivante. Surtout, ce qui est frappant est à quel point les familles des victimes ont été laissées dans l’ignorance. Là aussi, on est bien loin des clichés montrant les policiers tenir au courant les proches de la moindre avancée de l’enquête. Rien ne leur était communiqué, et il a fallu bien des années pour qu’ils découvrent toute la vérité, et se retrouvent avec une interrogation de plus – pourquoi ce silence ?
Au final, un livre passionnant, qui nous montre un autre aspect du rêve américain.