Je crois que je parlerai davantage de moi que du film dans ce billet. Je l’ai découvert d’abord par la musique, que j’ai immédiatement aimé. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai écouté le CD, à l’époque, sans l’associer aux images, et j’ai eu beau voir le film plusieurs fois depuis, je les dissocie toujours.
Je ne lisais pas Première à l’époque (quinze ans que j’y suis abonnée, maintenant), je lisais encore le journal de Mickey et une chanteuse de l’époque avait déclaré dans les colonnes de ce prestigieux journal avoir détesté ce film, qu’elle jugeait prétentieux. Quand j’ai enfin vu le film pour la première fois – à la télé, avec Lise-Marie, j’ai eu une certitude : cette jeune personne était une très mauvaise critique, et ne connaissait pas grand chose à la musique. J’ai presque envie d’ajouter une lapalissade : ce n’est pas parce qu’un personnage est prétentieux que le film l’est.
Tous les matins du monde cède d’abord à un aspect pratique : pour son premier rôle, Guillaume Depardieu joue Marin Marais, jeune, et partage le personnage avec son illustre père. C’est la première fois, ce n’est pas la dernière (je pense au Comte de Monte-Christo, pour TF1). Guillaume ne quittera jamais réellement l’ombre de son père, et sa disparition prématuré m’a attristé plus que je ne saurai dire.
Face à eux, Anne Brochet, excellente dans le rôle tourmenté de Madeleine, la fille aînée de Sainte-Colombe. Depuis, je n’ai pas l’impression qu’elle ait à nouveau trouvé un rôle à sa mesure. J’espère qu’il n’en est pas de même au théâtre. Elle a été récompensée du césar du meilleur second rôle féminin – je me demande bien quel pouvait être le premier ! Séduite, abandonnée, absolument seule enfin, Madeleine n’est que douleur – plus encore quand elle se rend compte de qui est vraiment l’homme qu’elle a passionnément aimé. Sa soeur Toinette s’en est beaucoup mieux sortie.
Je n’ai garde d’oublier monsieur de Sainte-Colombe, personnage central plus que Marin Marais à mes yeux. Veuf, il ne parvient pas à oublier sa femme, et élève ses filles du mieux qu’il peut. S’il n’est pas démonstratif, son amour pour ses filles ne peut être nié. Sans être historienne de formation, mais pour avoir beaucoup lu les registres d’état civil, les veufs se remariaient rapidement, surtout s’ils avaient des enfants. La « belle-mère » est une réalité, dans le théâtre de Molière ou les contes de Perrault. Monsieur de Sainte-Colombe ne peut se remarier, tant son amour pour sa femme est vivace. Il la « voit ». Hallucination ? Fantôme ? Madame de Sainte-Colombe est au centre des plus belles scènes du film (la barque, en pleine nuit, avec les Leçons de Ténèbres de Couperin).
Film de cour, Tous les matins du monde l’irrésistible ascension d’un homme pour qui la musique était au début un moyen, non un but ou une passion. Il en aura fallu du temps – pour changer
Pour terminer, cet extrait de la BO du film :